Alors que j'étais sortie me promener en dehors de ma cabine quelle ne fut pas ma surprise en y retournant de trouver une magnifique robe qui ne m'appartenait pas avec un petit mot du capitaine dessus : "Pour vous Miss Masters, petit cadeau pour la réception de ce soir, j'espère qu'elle vous plaira." Je ne sais pas s'il s'était donné autant de mal pour tout le monde en tout cas, il avait très bon goût concernant la robe qu'il m'avait "offerte". Pourtant, même si la robe était simplement magnifique, je ne savais pas si je me présenterais à la soirée, ce n'était pas mon genre, pas mon style, pas mon envie non plus. Mais la beauté ce présent me donnait presque envie de m'y rendre, même si j'irais certainement seule ou presque. Je n'étais pas du genre à me mettre en avant dans une foule, mais si j'avais reçu une robe, d'autres aussi certainement, ainsi, nous serions tous sur un piédestal, sans que nous puissions reconnaître les différentes classes, sauf si l'on connaissait personnellement les personnes bien entendu. Et puis, il ne me serait pas difficile de fondre dans le foule, comme si je n'existais pas. Je ne savais pas si Alfred serait de la soirée, lui le prêtre n'était pas du genre à faire la fête comme moi d'ailleurs, mais peut être se laisserait-il gagner par l'ambiance qui pointait le bout de son nez. De toute façon, je l'appréciais mais ça s'arrêtais là, enfin c'est ce que je tuais à me dire, même si dans la réalité tout est bien plus compliqué. Il était un homme d'église, autrement dit pas question pour lui d'aimer qui que ce soit d'autres que Dieu. Mais pourtant, il était mort, comme moi mais nous ne l'étions pas vraiment. Nous étions sur le Titanic, tout du moins dans un monde qui ressemblait à celui-ci, puisque dans la logique des choses, le véritable Titanic gît au fond des eaux entre l'Europe et les Amériques.

Bref, je m'étais déjà poser ces questions un millier de fois depuis notre retour, il y a de cela dix mois environ. Je sais, je me poserais toujours ces questions mais si pour une fois j'essayais vraiment de me mettre dans l'ambiance. Je décidais donc de me rendre à la soirée avec cette belle robe bleue que l'on m'avait gentiment offert. Je rentrais dans la pièce, il y avait un monde fou déjà, mais n'étais-ce pas étonnant ? Tout de suite, je ne me suis pas sentie à ma place, comme si cette soirée chic n'était pas faite pour moi. Mais je ne rebrousserais pas chemin pour autant, j'essayerais de me vider la tête pour faire genre que mon corps et mon esprit était bien là. J'essayais, encore et encore. Il n'y avait pourtant rien à faire, j'étais physiquement présente, mais c'était comme si la musique et l'ambiance qu'il y avait glissaient sur mon corps sans atteindre mon coeur, sans m'atteindre, comme si je n'étais pas là. Je me suis mise alors à observer la salle, à la recherche d'une autre âme en peine comme la mienne et je suis tombée sur cette jeune femme dans un coin de la salle. Elle faisait apparemment partie du personnel du bateau mais elle n'allait pas très bien. Je prenais un verre sur l'un des plateaux d'un des serveurs pour me rendre dans sa direction. Elle semblait tellement dans ces pensées que quand je suis arrivée devant elle fut à peine affolé mais très vite son visage redevint plus "normal".

" Je dois avouer que je ne me sens pas non plus à ma place à cette réception. J'ai l'impression que c'est pareil pour vous, je me trompe ? "

Oui, j'abordais la conversation avec cette jeune femme rousse inconnue, mais depuis que j'étais ici, j'avais forcé ma nature bon nombre de fois pour faire de bonnes rencontres. En serait-il de même avec cette jeune femme ? Je l'espérais, mais n'étais-je sûre de rien car les apparences sont parfois trompeuses. Peut être me parlerait-elle, ou peut être pas, je ne saurais le dire, en tout cas, elle avait un visage assez doux, reflétant sa personne ?

Est ce que je faisais bien de parler avec cette jeune femme inconnue ? Est ce qu'elle me répondrait ? Est ce qu'elle ferrait bon genre en jouant son rôle d'hôtesse ? Ou me répondrait-elle franchement ? Comment allait-elle réagir ? Penserait-elle que je me jouais d'elle ? Je ne savais pas tellement quoi penser de tout cela. La dernière fois que j'avais parlé avec un membre d'équipage, c'était avec Jefferson et cela s'était très bien passé, mais avec elle, en serait-il de même ? Impossible de savoir pourtant son visage en disait long, il semblerait que j'ai touché là où cela fait mal, car son visage fit en quelques sortes la grimace. J'aurais peut être du m'abstenir pour ce coup là, non ? Simplement aurai-je pu lui dire que la fête était sympathique et tout ce qui va avec, mais je n'avais pas pour habitude d'utiliser la langue de bois. J'étais sincère sur ce que je voyais, sur ce que je pensais de telle ou telle chose, loin de moi l'idée de me jouer d'elle. Il faut bien avouer que je ne connaissais pas tellement les manières habituelles des passagers sur ce genre de navire. Sont-ils tous odieux avec les personnes qui gèrent notamment les 1ères classes ? Je faisais partie de la classe intermédiaire pour ma part, la 2ème même si je dois bien l'avouer avec cette robe bleue je ne ressemblais pas forcément à cela mais peut importe, la robe ne fait pas de vous une personne tout d'un coup hautaine et narcissique. L'extérieur pour moi n'avait plus tellement d'importance je dois bien vous le dire, mais l'intérieur par contre avait un supplément d'âme que j'appréciais. Comme toute cette nourriture qui passait devant moi ou qui était à ces tables, l'extérieur était enviable mais l'intérieur l'était-il tout autant ? Oui, je sais, je suis en train de comparer des humains à de la nourriture mais au fond, ne sommes nous pas semblable ? Un fruit gâté ne va-t-il pas gâté le reste de la panière de fruit ? Pour les hommes, il suffit d'une mauvaise personne pour que cela rejaillisse sur plusieurs autres. Vous me direz, les plus courageux, les plus chanceux sont restés en vie, ils ne sont donc plus là pour nous dire tout un tas de choses, seul les moins courageux ou les plus malchanceux, au choix, sont encore ici à se plaindre ou au contraire à profiter de la vie comme elle se doit. Je faisais partie d'une catégorie à part, je ne suis pas malchanceuse et encore moins courageuse, je suis simplement entre les deux, je voulais ma mort, je l'ai eu mais jamais je ne pensais que tout cela serait ainsi.

La jeune femme me répondit alors en essayant d'hausser le ton, comme si sa petite voie serait couverte par la musique si jamais elle parlait comme à son habitude. Et elle me répondit que la soirée lui était tout à fait charmante, mais elle n'était pas si convaincante que ça. J'aurais pu lui dire qu'elle se fichait de moi et tout ça, que je voyais bien que la soirée ne lui plaisait pas tant que ça, mais même si elle était morte, elle était toujours dans son personnage d'équipage. Cela fait 10 mois, 10 mois qu'elle travaille, 10 mois que je suis en "vacances", alors ne pourrait-elle pas lâcher un peu la bride le temps d'une soirée ? N'en a-t-elle pas un peu marre d'essayer de faire toujours bonne impression devant presque tout le monde ? Je pense que si j'étais à sa place, je profiterais un peu de cette soirée, car elle ne peut pas être dans le même état psychologique que moi, dépressive à souhait ... Mais je ne disais rien à ce propos, je ne relevais pas, elle semblait ne pas vouloir se livrer à une inconnue et dans un sens je la comprenais tout à fait. Est ce que je livrerais mes pensées les plus intimes à quelqu'un que je ne connais pas ? Je l'ai bien fait avec Alfred, mais le cas est différent, enfin vous me direz, même s'il joue encore son rôle pour beaucoup, il pourrait très bien se décider à livrer tout ces petits secrets à d'autres qui ne devrait pas savoir. Mais je sais que je peux lui faire confiance à ce niveau, il n'est pas du genre à répandre les rumeurs comme une traînée de poudre. Je n'étais pas non plus comme ça, si l'on me disait quelques choses, je le gardais pour moi, je ne vois pas l'intérêt d'aller colporter des ragots sur des personnes que je connais à des personnes que je ne connais pas. Puis la serveuse enchaîna sur les hors d'oeuvre. Elle avait ce petit sourire forcé, pas forcément naturel, comme on avait du lui apprendre en son temps.

" J'ai déjà goûter à tout cela, pas la peine de faire venir un serveur. "

Devais-je ajouter quelques choses à cela, ou faire comme si la conversation ne continuerait pas vraiment plus ? Je ne voulais pas la faire fuir, ni la forcer à parler de toute façon. Mais je ne pu m’empêcher d'ajouter quelques mots.

" Vous savez, en montant sur le Titanic j'avais pour idée de me suicider, mais le navire a été plus rapide que moi ... "

En lui parlant de quelques d'assez intime me concernant, peut être qu'elle s'ouvrirait un peu plus à moi. Cela pouvait très bien avoir également l'effet inverse, mais de toute façon, si elle ne me parlait pas, la conversation s'arrêterais sans doute, alors autant tenter le tout pour le tout. La jeune femme rousse resterait-elle à mes côtés ou irait-elle voir un peu plus loin ?

Seule dans ma cabine A38, je me préparais tranquillement. Me faisant belle comme toujours, j’avais de très belles parures là je décidais de mettre une robe blanche et argenté. Avec les bijoux j’étincelais de mille feux. Je portais un châle noir sur les épaules, même en fantôme je gardais les mêmes habitudes. J’étais mélancolique, et comme une âme en peine cela me ferait du bien d’assister à la réception. J’étais une invitée de marque surement l’une des plus riches des premières classes, qui plus est issue d’une famille de renom. Je devais être éblouissante ce soir et faire bonne impression. Je mis le médaillon de ma mère, dernière touche à ma tenue d’apparat. Je sortis de ma cabine, et me dirigeais à petit pas vers la salle de réception.

En chemin, traversant les ponts qui séparaient ma cabine et à la salle de réception je m’arrêtai un moment pour fumer une cigarette. J’avais de mauvaises habitudes de ce genre, mais depuis que j’avais plus de symptômes de la maladie je pouvais me permettre certains plaisirs. Etre morte, me permettais d’être libre ce qui était un luxe que je n’avais jamais pu m’offrir. Je trouvais que ça me donnait un côté glamour. Un moment passa, je soupirais attendant que ma cigarette se termine je restais tranquillement sur le pont, voyant les invités se dirigeaient vers la réception. Tout le monde s’était fait beaux, cela faisait plaisir à voir.

Je me joignis aux invités, j’aperçue Sasha une vague connaissance que je connaissais à peine et qui m’intriguais. Je pris une coupe de champagne, et resta dans mon coin tranquillement. J’étais souvent seule ces temps-ci, moi qui ai besoin d’être au cœur des attentions et qu’on me chouchoute. Ma sœur me manquait, je restais toujours avec elle, je n’étais jamais seule et voilà que là perdu au milieu des passagers je me sentais seule. Je fis un geste de la tête au capitaine que je connaissais personnellement. Je pris des mets délicieux que servait le personnel du bateau. Mmmh, quel délice ! L’ambiance était très bonne ce soir, c’était agréable. On allait pouvoir s’amuser et oubliait notre condition.

Les rumeurs étaient véridiques, des troisièmes classes faisaient partie de la fête. Cela ne me dérangeait pas du tout, j’avais sympathisé avec bon nombre d’entre eux. J’étais tolérante, et je ne faisais plus de différence. Nous étions tous bloqués ici, nous partagions tous (ou presque) le même chagrin. Pour moi, nous étions tous pareils. Qui viendraient à cette réception ? J’avais peur de faire de mauvaises rencontres, je me sentais vulnérable sur ce paquebot. J’observais la salle à la recherche d’une tête amicale avec qui je pourrais passer le restant de la soirée. Je pris une gorgée de champagne, cela me piqua la gorge et je me laissais aller au rythme de la musique.

Ce soir, je voulais oublier. Ce soir, je voulais m’amuser.

Pour cette soirée qui semblait être encore plus fastueuse que toutes les autres, Noah avait sorti son plus beau smoking, le plus cher, fait sur mesure à Londres pour lui, sans oublier le nœud papillon blanc qu'il se devait de porter au moins les premières heures. A voir où cela l'emmènerait.

Et il n'était pas déçu de s'être mit son trente et un. Tout était encore plus beau qu'à l'accoutumée et il y voyait de nouvelles têtes, ce qui n'était pas rien quand on vivait en huit clos comme c'était leur cas à tous.

Comment pouvait-on ne pas être heureux d'être mort dans un endroit pareil ? Il se sentait plus vivant que jamais, ne savait plus où donner de la tête et c'était un petit plaisir de voir les passagers de sa classe mélangés aux Premières Classes. Certains d'entre eux semblaient se satisfaire du changement, et d'autres avaient l'air d'être sur le point de s'étouffer avec les olives contenues dans leurs cocktails. C'était terriblement amusant et il allait falloir qu'il aille se présenter à ses personnes là un peu plus tard.

Il fallait qu'il pousse les gens, c'était dans sa nature, surtout les gens qui les regardaient de très haut, c'était presque un devoir en tant que fils de fermier irlandais sans le sou qui souhaitait leur démontrer qu'il pouvait se comporter comme eux tous, si ce n'était mieux.

Le blond avait déjà échangé quelques mots avec plusieurs groupes de personnes qu'il connaissait fort bien et s'apprêtait à demander la main d'une jolie brune pour l'accompagner sur la piste de danse quand son regard s'accrocha sur quelqu'un d'autre.

Elle n'était pas la seule rousse du paquebot mais dès qu'il voyait rien qu'une de ses mèches de cheveux, il était bien souvent certain de savoir si c'était elle ou non. Et dans sa robe noire de personnel du bateau, il n'y avait pas d'autres solutions. Il avait donc abandonné son idée de danse pour se rapprocher de la belle qui n'était pas seule... bizarre.

Il toussota un instant pour faire remarquer son arrivée et patienta simplement quelques secondes avant de se placer entre elles deux pour saisir la main de Rosabelle et y apposer ses lèvres en la fixant. Elle allait rougir, c'était une évidence.


« Rosa... cette soirée est splendide. »

Il aurait continué sur sa lancée s'ils étaient seuls, ce qui n'était pas le cas. Il se retourna alors pour faire face à la blonde et lui tendit sobrement sa main en espérant qu'elle la prenne, première classe ou non.


« Noah O'Driscoll, enchanté Mademoiselle... »

De vue, elle lui disait quelque chose, rien d'autre. Mais cela lui importait peu, il voulait surtout parler avec la rouquine qui semblait sur le point de faire un malaise.

En avais-je trop dit à cette hôtesse d'accueil ? Avais-je été trop loin dans mes propos simplement pour la faire réagir ? Je ne savais pas trop en vérité, je ne savais pas quoi en penser à vrai dire. Mais j'allais vite comprendre que finalement, elle n'était pas si désespérée que cela sur ce navire, du moins c'est ce que j'ai cru voir à travers son regard. En effet, elle semblait désolé que j'ai pu envisager le suicide, elle me paraissait pour la première fois sincère avec moi. Avait-elle aussi envisagé cela un jour ou l'autre ? Je ne savais pas trop, sans doute, qui ici n'a pas déjà pensé au suicide. Certes, nous sommes déjà mort, mais la réalité est parfois bien plus sournoise qu'il n'y parait. Une éternité sur le Titanic ? Le terrain de jeu semble assez vaste dans un premier temps mais au final, ce ne sont que des étages, des cabines, des machines qui très vite nous semblent familiers, trop vite même. 10 mois, c'était approximativement ce que nous avions passé ici, et déjà pour certains du moins, la non-vie sur le bateau semblait avoir été plus longue que l'éternité. J'étais pessimiste quand à l'avenir même si, même si, grâce à Alfred, j'avais pu relativiser certaines choses. D'ailleurs, l'hôtesse me parla de lui. J'eus un léger sourire à cette parole, il avait été le premier vers qui je m'étais tourné dans ces premiers jours de non-vie sur le navire. Il m'avait aidé, il m'aidait toujours, il y avait ce lien qui naissait entre nous, entre nos anciennes et nos nouvelles convictions sur bon nombre de choses. Elle trouvait Alfred compréhensif, et elle avait parfaitement raison, il comprenait les choses mieux que personne, bien mieux que moi en tout cas.

Mais alors que j'allais lui répondre, son regard se trouva d'un seul coup obnubilé par un autre visage que le mien, un visage qui semblait la réjouir, du moins c'est que je pensais en voyant le beau jeune homme arriver à nos côtés. Il avait toussé très légèrement comme pour montrer qu'il était ici. De toute évidence, Rosa et Noah se connaissait. Je ne savais pas si Rosa était son prénom complet mais au moins je pouvais mettre un nom sur son visage. Il était évident que j'étais de trop dans cette situation, et que je ne parlerais plus de mon éventuel suicide. La présence du jeune homme rassurerait sans doute la rousse car il venait de lui faire un magnifique compliment ainsi qu'un baise main très gracieux. Je ne saurais vous dire de quelle classe il était car il avait la classe avec son beau noeud papillon. Alors que je pensais qu'il allait me faire la même chose, il me tendit simplement la main en se présentant donc comme Noah O'Driscoll. Je la saisis donc pour ne pas paraître hautaine ou je ne trop quoi en lui disant donc mon prénom également.

" Sacha, Sacha Masters, enchantée également. "

Et c'est à ce moment là que je savais plus quoi faire. Devais-je les laisser tout les deux entre "amis" ? "amoureux" ? Ou pouvais-je rester un petit peu pour faire connaissance ? J'avais envie de connaître d'autres personnes sur ce bateau mais je ne sais pas, je me pensais de trop entre les deux tourtereaux. Je me suis mise alors à balayer la pièce du regard comme pour rechercher une connaissance, ou une autre âme en peine. C'est alors que j'ai pu apercevoir Elisabeth, une première classe que je connaissais un peu. Mon esprit me disait d'aller à sa rencontre, mais mon coeur me disait de rester ici encore quelques secondes histoire de sympathiser avec eux deux, même si cela serait peut être difficile avec Rosa maintenant que je lui avais dit tout cela, même si finalement ce n'était pas grand chose pour moi qui avait l'habitude de tout cela.

" Donc Noah ... vous et ... "

Oui, j'avais ouvert la bouche mais je ne savais pas quoi dire sans faire tâche parce que je ne le sentais pas bien. Cette soirée ne démarrait pas sous les meilleurs auspices pour moi, et là, je sentais que je mettais les pieds dans le plat. Ce que je voulais demander ne se faisait pas, du coup, j'avais prononcé quelques mots qui n'avaient pas forcément de sens même si ... J'avais envie de me cacher dans ma robe à ce moment précis mais j'essayais de faire bonne figure en souriant bêtement.

Se sentir hors de son milieu.

Jamais elle n'avait porté de robe aussi jolie. Georgiana n'en revenait pas elle même de porter un tissus aussi fin. Elle qui d'habitude devait réparer, coudre ce genre de robe, sans jamais les porter. Pour la première fois, elle pouvait se vêtir de l'une d'elle. Alors qu'elle s'admirait dans une miroir, la jeune femme souriait bêtement. Maintenant elle comprenait pourquoi la noblesse portait de telles robes. Ces robes sublimaient la femme et Georgiana se sentait plus belle, moins pauvre. Elle avait l'impression d'être dans un rêve.
La robe, la troisième classe ne savait pas à qui elle appartenait, mais elle avait travaillé dessus pendant une semaine, pour pouvoir la mettre à sa taille et aussi à l'embellir. La brune était peut être pauvre, mais elle avait tout de même du goût. Fréquenter les riches aidaient à voir les modes et à les parfaire.
Georgiana se trouvait en compagnie de Bridget, elle aussi était parée d'une toute nouvelle robe, retouchée elle aussi par la jeune couturière. Toutes deux avaient l'impression d'être comme des étrangères dans leur petit dortoir. Le contraste était fort, si fort que les deux amies quittèrent leur lieu de vie pour rejoindre la réception.
Cette même réception avait été l'étonnement de tous, surtout les conditions et le fait que les troisièmes classes et les premières classes allaient se côtoyer pendant une soirée, faisait douter Georgiana. Elle se demandait vraiment si les choses allaient bien se passer. Déjà elle était rassurée de voir que tous allaient pouvoir porter des costumes convenables, ainsi les troisièmes classes n'auraient pas à être traqué par les plus riches. Bien sûr, il allait y avoir une différence dans les comportements, mais l'irrespect ne serait peut-être pas de mise dans cette soirée.
Les deux jeunes femmes gravirent quelques escaliers, puis elles prirent un ascenseur pour se rendre jusqu'à la salle de réception qui se situait au pont D. Georgiana n'avait jamais mis les pieds dans cette salle. Habituellement, elle évitait les soirées des premières classes, la brune préféraient nettement les fêtes des troisièmes classes qui étaient bien plus conviviales et joyeuses.
Au début, elle ne voulait pas se rendre à cette réception, mais Bridget avait fini par la convaincre et maintenant, les voilà toutes les deux, vêtues comme elles ne l'avaient jamais été de leurs vies.
Les deux jeunes femmes franchirent alors les portes et là elles virent l'éclatante salle. Tout respirait le luxe. Le Titanic n'avait jamais paru aussi majestueux. Georgiana était émerveillée, elle n'avait jamais rien vu de pareille, sauf peut-être à l'opéra.
La troisième classe se lança dans l'arène, elle navigua entre les passagers regardant à peine qui se trouvait autour d'elle. Elle se trouvait là, mais la jeune femme ne savait pas ce qu'elle devait faire. Se rendre vers le buffet ? Prendre une coupe de champagne ? Ou encore partir en quête d'un futur compagnon de danse ?
Georgiana ne mit pas longtemps à se décider, alors qu'un serveur passait par là, elle prit une coupe de champagne et elle se plaça dans un coin. De là, elle put regarder l'assemblée. Elle se sentait à part et mal à l'aise. La brune en était sûre, elle ne resterait pas bien longtemps à cette réception.

J'étais donc en tête à tête avec Rosabelle Wilde et Noah O'Driscoll qui formait peut être un couple. Je dis bien peut être car ils semblaient s'apprécier, mais les choses ne sont peut être pas ce qu'il y parait. En tout cas, la rouquine me confirma qu'ils étaient bons amis, mais elle n'alla pas au delà de ça. Pourtant, cela semblait être clair qu'elle en pinçait pour lui, et cela semblait être réciproque. Mais je n'étais pas du genre à colporter des ragots dont je n'étais pas sûre, et comme je me voyais mal demander directement aux deux intéressés s'ils étaient ensemble, je n'en dirais pas plus. Je ne savais pas quoi faire à présent. Devais-je les laisser tout les deux profiter de cette soirée ? Devais-je jouer les boulets en leur tenant la grappe ? Devais-je faire un peu connaissance avant de leur fausser compagnie ? Décidément, je me posais trop de questions. Des questions, et souvent les réponses étaient vagues, ou alors je ne les avais pas faisant quelques supputations sans véritable fondement. Si Noah et Rosabelle étaient amis, c'était très bien pour eux, mais voulaient-ils devenir "mes" amis également ? Vu ce que j'avais dit à la rousse, je ne savais pas si elle voulait devenir mon amie sur le moment mais peut importe finalement, elle ferrait comme bon lui semble, je ne la forcerais en rien. J'ai à nouveau jeter un coup d'oeil sur l'assemblée. J’aperçus de cette manière Georgiana qui était magnifiquement habillé pour l'occasion. Je ne pensais pas forcément la voir à cette fête, car étant une 3ème classe, elle ne devait pas se sentir très à l'aise, un peu comme moi mais pas forcément pour les même raisons. Bref, je me suis mise alors à regarder Noah, comme pour guetter un geste de sa part, comme pour essayer de voir ce qu'il pensait de moi au premier abord. M'inviterait-il à rester un peu plus ? Ferrait-il un peu la conversation pour que je reste ou au contraire pour que je ne reste pas ? Il ferrait ce qu'il veut de toute façon, je n'étais pas mettre de ces gestes et de ces paroles. Mais je ne me sentais clairement pas à ma place. J'en avais trop ou pas assez dit selon les points de vue. Mais c'est Rosabelle qui enchaîna. Elle me demanda si j'étais venue accompagnée à la soirée. J'aurais bien aimé lui dire que j'étais venue avec Alfred, mais c'était un mensonge. D'ailleurs, je ne le voyais pas ici, il ne viendrait sans doute pas, sachant que je lui raconterais ce qu'il se sera passer à la soirée. Je fis donc un petit signe négatif de tête avant de le confirmer à haute voie.

" Non, je suis venu seule ... "

J'aurais aimé en dire plus, dire que malheureusement, j'avais laissé mon mari et ma fille vivre, alors que j'étais morte, mais cela n'aurait pas été dans le sens positif de la conversation. Enfin, je sentais que Rosabelle n'avais pas tellement apprécié le fait que je parle de suicide, pour des raisons évidentes. Avait-elle tenté de se suicider elle aussi ? Avait-elle des amis qui l'avait fait ? Un proche parent ? Avait-elle déjà vu un suicide pour que ce souvenir lui glace le sang ? Je me posais encore des questions, c'était terrifiant, mais depuis que j'étais ici, ma non-vie se résumait presque à cela. Sa vie ne me regardait pas, je n'avais pas savoir où elle se trouvait à tel moment. Bref, que dire de plus à présent ? Mon regard était assez fuyant, comme s'il était attiré par quelques choses, quelqu'un. Mais avant de les laisser tranquille, j'attendais une éventuelle réaction de monsieur O'Driscoll.

C'est que tout devenait soudainement très ennuyant après le petit pic d'adrénaline qui avait parcourut ses veines quand la blonde leur avait demandé à demi mot s'ils étaient un couple. Il s'était imaginé la rouquine murmurer quelque chose qui ne lui plairait pas, qu'elle allait le présenter comme étant un passager qu'elle voyait souvent. Mais non, ils étaient de bons amis et ce n'était pas rien.

Leur dernière entrevue avait été une vraie catastrophe, du jamais vu pour l'irlandais qui faisait s'évanouir les femme et avait de nombreux amis qui l'adorait. Avec Rosabelle c'était juste toujours spécial parce qu'ils semblaient être des opposés. Rien de plus, rien de moins.

Et étrangement, il essayait absolument de lui plaire afin de la garder dans son carnet de connaissances. Il y avait quelque chose qui le touchait chez elle et ce n'était pas rien. Combien de fois ne l'avait-on traité de sang coeur quand il avait fait pleurer des amantes ? Il détestait cela bien entendu, voir une femme pleurer lui donnait envie de s'enterrer dans un trou et ne jamais sortir. Heureusement que cela n'arrivait pas souvent.

Sauf avec elle, bien entendu. Il était mauvais et l'avait vu pleurer plus d'une fois sans savoir quoi dire ou faire. Il se savait mauvais dans certains cas mais avec elle, cela devenait pire.


« Il y a tellement de monde ce soir, personne ne va rester seul bien longtemps, je puis vous l'assurer. Je vous conseille grandement de passer un moment avec Lady Pimpleton... avec la robe noire sur notre gauche, elle est d'excellente compagnie, elle est ravie d'avoir été séparée de son mari lors du naufrage et est capable de parler pendant de longues heures. Une femme charmante... »

Il se retint d'attraper la main de la rousse qui semblait ne plus être avec eux. Quelque chose n'allait pas, le blond en était certain. Son regard était encore plus fuyant qu'à son habitude et même si elle tentait de garder la face, il n'était pas dupe.


« Je vous prie de bien vouloir nous excuser et je vous souhaite une agréable soirée. »

Il lui avait sourit chaleureusement avant de se placer aux côtés de son amie et de lui faire passer son bras autour du sien sans lui demander son avis. Et quand cela fut enfin fait, il les éloigna des personnes les plus proches, se rapprochant d'une des portes donnant accès au pont.


« Est-ce que tu veux qu'on sorte un instant ? »

Oui, j'étais venue seule à la réception, il faut bien l'avouer, je n'étais pas forcément de très bonne compagnie et je crois que Rosabelle ne dira pas le contraire, elle n'avait pas du m'apprécier grandement. Quant à Noah, il n'avait pas voulu vraiment faire ma connaissance, il semblerait que seule la rouquine soit sa priorité. Il était étonné que je sois là, avec elle, et il avait sans doute raison. Mais, celui que je pensais être une sorte de gentleman n'en était pas un. Il avait du charme, il ne fallait pas le nier, surtout dans cette très belle tenue qu'il portait mais on aurait dit que je faisais partie des meubles avec lui. Ros' m'avait demandé si j'étais venue avec quelqu'un et j'ai été franche, en répondant par la négative. Mister O'Driscoll pensa alors bien dire en me désignant, je ne sais plus qui, une femme qui semblait avoir beaucoup de choses à dire et qui me tiendrait la chandelle pour qu'ils puissent partir, pour qu'ils me larguent. Je n'avais pas du tout apprécier ces manières, mais alors pas le moins du monde. Bon d'accord, il s'excusait mais voilà, il me faussait compagnie sans que je puisse en dire plus. Il ne demanda pas non plus son reste à son amie quelques soit leur degré d'affinité en la prenant par le bras. J'étais donc à nouveau seule, j'aurais aimé les connaitre un peu plus mais apparemment, monsieur n'en avait pas envie, et comme je n'avais pas forcément fait bonne impression à madame, c'était finalement logique qu'ils me faussent compagnie.

Je scrutais alors la salle des yeux. Je m'y perdais allègrement, j'avais aperçue des connaissances tout à l'heure, mais je ne les voyais plus à présent. Avaient-elle quitter la pièce ? Ou s'étaient-elles mises dans un coin pour qu'on ne les remarque pas trop ? Mon regard balayait la pièce quand soudain, j'ai vu Georgiana qui semblait être aussi seule que moi à cette petite fête. Elle avait une coupe de champagne à la main, et elle regardait aux alentours, comme pour attendre une main secourable. Elle était une 3ème classe, elle devait être un peu perdue sans doute dans cette fête mondaine. Je dois avouer que je ne me sentais pas forcément à ma place non plus mais bon, en allant la voir, sans doute que nous parlerions de tout et de rien comme à chaque fois. Finalement, je ne la connaissais pas tellement à vrai dire et vis versa. Je ne sais pas si elle m'avait vu mais je lui faisais un petit signe de la main tout en me rapprochant d'elle. Il y avait peu de chance qu'elle me mette un vent mais sait-on jamais. J'arrivais donc en face d'elle avec un petit sourire comme pour lui dire que ça allait.

" Bonsoir Georgiana, toi aussi tu ne te sens pas vraiment à ta place ici, je me trompe ? "

Je la connaissais, un peu, elle me répondrais certainement avec logique par la positive. Oui, je sais, une fête c'est fait pour s'amuser dans la logique des choses, mais, je n'en avais pas vraiment envie. De quoi avais-je envie ? C'est une bonne question à laquelle je ne saurais répondre. Je faisais mon train train sur le navire, sans plus. Des évènements comme celui de ce soir ne m'intéresse pas spécialement, comme si je pouvais m'en passer. Il faut dire que dans mon ancienne vie, je ne sortais jamais, je m'occupais de ma fille ...

Se sentir hors de son milieu.

Ne pas être à sa place était un euphémisme, les mots n'étaient même pas assez fort pour qualifier ce que ressentait Georgiana. Elle regardait autour d'elle avait un petit intérêt les personnes qui se trouvaient dans la salle. La jeune femme voyait très bien, que comme elle, de nombreux troisièmes classes ne savaient pas comment agir. Certains craignaient de faire un faux pas et d'autres subissaient les regards tortueux de commères.
Georgiana n'aimait pas ce genre de soirée, elle préférait nettement les fêtes entre troisièmes classes, avec un petit supplément de secondes classes. Au moins, durant ces soirées on pouvait s'amuser, sans avoir à doser nos envies de boire et encore moins de danser. Ici, elle ne se sentait à pas son aise, si elle voulait danser, elle l'aurait fait, mais là que pouvait-elle faire ? Elle n'avait pas de compagnons pour danser et surtout, elle n'aimait pas valser. Bien souvent, elle dansait seule, exécutant des pas difficiles ou sinon avec quelques troisièmes classes, avec qui elle pouvait danser plus vivement. Là le rythme était lent et Georgiana commençait à mourir d'ennuis. Elle soupira bruyamment d'exaspération, ce qui entraîna quelques regards horrifiés dans sa direction. Mon Dieu, la noblesse était-elle vraiment si étriquée ? La brune avait déjà entendu des règles de comportements que la noblesse et la bourgeoisie se devait de respecter en publique, elle n'avait jamais pensé, qu'elles soient aussi bêtes. En même temps, elle se mit sur la pointe des pieds pour regarder si elle pouvait apercevoir Bridget. Elle vit alors cette dernière en compagnie d'un jeune homme, Georgiana n'irait donc pas la déranger. La solitude provoqua chez elle, un nouveau soupir.
La jeune femme vint à boire une gorgée de ce délicieux champagne, quand soudain une âme salvatrice arriva vers elle. C'était Sacha Masters, une personne que Georgiana appréciait beaucoup, pour sa discrétion et aussi pour sa gentillesse. Elle ne la connaissait d'ailleurs pas plus que cela, malgré, leurs nombreuses conversations, mais cela plaisaient aux deux jeunes femmes. Sacha lui demanda alors si elle se sentait à l'écart. La brunette lui fit un maigre sourire.

« Bonsoir Sacha. Non tu as mis le doigt sur le problème. Pour moi cette soirée n'est qu'une mascarade. Et toi, quand penses-tu de la trouvaille de notre cher capitaine. »

Le ton de la jeune femme fut calme au début pour saluer son amie, mais par la suite, quand elle évoqué la soirée, elle se montra plus mesquine. Elle espérait aussi, ne pas être la seule à penser que cette soirée n'était pas la bienvenue. A moins, que soit l'unique personne à être réfractaire à tout. Elle termina alors sa coupe de champagne et la déposa sur le premier plateau qui lui passa sous le nez. Elle fit alors un sourire amical au serveur, qui était assez débordé face à l'ampleur de la fête. En effet qui aurait pu imaginer que les trois classes du Titanic aurait pu tenir dans une même salle. Le pire, c'était l'organisation qu'il devait y avoir derrière. Par chance, le personnel du paquebot était plus que conséquent. Sauf que certains semblaient déserter. En effet, Georgiana vit la non moins désagréable Rosabelle Wilde en compagnie de Noah, un troisième classe, qu'elle connaissait très bien. La jeune femme ne s'occupa pas bien longtemps de la rouquine se retourna vers Sacha qui venait tout juste de lui répondre.

la reception

Le capitaine me sortit de ma rêverie, en effet le cliquetis du couvert sur sa coupe de champagne se fit entendre, tout le monde fit silence et la musique s’arrêta. Je posais ma propre coupe sur une table, et écouta attentivement le discours du capitaine. Il annonçait la chanson, je n’avais pas vu Eléonore de la soirée. J’espérais qu’elle n’allait pas me faire faux bond, j’avais le trac. C’était elle, la chanteuse pas moi. On s’était entrainées d’arrache pieds pour ce duo. Nous n’avions pas seulement travaillé notre voix, mais aussi notre prestance et notre allure. Le capitaine annonçait nos prénoms, les autres invités se mis à nous applaudir et quand il descendit de la scène. Je me remis ma robe en place, m’assurant que j’étais parfaite. Et je m’apprêtais à monter sur scène pour commencer la chanson. Je me dirigeais, d’abord, vers les musiciens pour voir si tout était en ordre. Apparemment oui. Le capitaine avait vraiment tout prévu.

Je balayais un peu inquiète la salle du regard. Eléonore allait venir j’en étais certaine c’était son rêve de devenir chanteuse. On avait beaucoup discuté de cela, et j’avais même peut-être dans l’idée d’écrire un roman à ce sujet sur une jeune étoile montante… même si, cela ne servait plus à rien de gâcher du papier, je ne serais plus publiée. Je me raclais la gorge, et chercha un endroit qui me renverrait mon reflet. Je remis mes cheveux en place, salua en faisant une légère réverance le capitaine. Et je montais sur scène, anxieuse et stresser comme jamais. Pourquoi avais-je accepté cela ? Des fois, on fait des choses puis on le regrette ensuite, j’étais sûre que tout allait bien se passer on s’était bien entrainées, il n’y avait aucunes raisons pour que cela se passe mal. Je n’aspirais pas à devenir chanteuse, mais j’admirais le rêve d’Eleonore, je le trouvais agréable et je l’avais déjà imaginée sur les planches à New York, elle aurait été grandiose. Elle avait la tête à l’emploie.

Je respirais un bon coup, je me ressaisis il ne fallait pas submerger par les émotions. J’arrivais sur la scène toute sourire, je n’étais pas dans mon univers mais je n’étais pas de nature très timide. J’étais une première classe qui se permettait beaucoup de choses, je n’avais pas peur d’agir j’avais les moyens, l’ambition. Chanter avec Eléonore serait un vrai plaisir, je ne voyais pas la différence de classe entre nous. Eléonore avait la prestance d’une grande dame. J’avais promis au capitaine d’assurer le spectacle, et je comptais bien m’y tenir. J’attendais encore un peu Eléonore qui allait arriver, et puis nous pourrions commencer notre chanson. Je fis un dernier sourire aux musiciens, ils étaient moins stressés que moi mais plus habitués surement aussi. Je respirais un bon coup, tout allait bien se passer. Reste calme Elisabeth. Reste calme, tout va bien, respire.

Je m'étais à moitié trompé avec Rosabelle, à moitié seulement car j'avais bien vu qu'elle essayait de sauver les apparences devant moi, comme un membre de l'équipage ne pouvais pas vraiment s'amuser à cette petite soirée. Ce n'est pas comme si nous étions durant la traversée. Si cela avait été à ce moment là, cela aurait été mal vu mais là, les membres d'équipage ne pouvaient pas être tout le temps à 100% dans leur travail ce n'est pas possible. Bref, j'avais donc quitté sa présence ainsi que celle de messire O'Driscoll pour me diriger dans la direction de Georgiana, seul véritable visage que j'appréciais dans les parages. J'avais bien vu Elisabeth mais je ne savais pas où est ce qu'elle était passé mais peu importe. Je sentais qu'elle n'était pas à l'aise comme moi d'ailleurs et je ne me trompais pas, elle me le confirmait oralement. Elle pensait que cette soirée n'était qu'une mascarade. Je ne savais pas trop quoi en penser à vrai dire, pour moi, cette soirée était une soirée de 1ère classe, donc je ne m'y sentais pas forcément à l'aise mais voilà quoi, sans plus, je n'étais pas du genre à penser à mal des intentions du capitaine. Il essayait sans doute de bien faire, je ne sais pas, il s'était donné du mal pour organiser tout cela. Mais je ne contredirais pas Georgiana sur ce point.

" Je ne sais pas trop quoi en penser, on se croirait dans une soirée de 1ère classe alors que ce n'est pas le cas ... "

Oui, je n'avais pas tellement d'avis sur la question, je ne me sentais pas à ma place, enfin comme souvent, je n'étais pas à ma place sur ce bateau de toute façon c'était ainsi, et ça le resterait. Je devais mourir mais de façon définitive, alors que là, non, je ne meurs pas, enfin, j'essaye de vivre cette non-vie en huis clos sur ce Titanic. Je me posais des questions sur le pourquoi du comment mais à quoi bon ? Alors que j'étais à moitié perdue dans mes pensées, j'entendit un bruit cristallin résonner dans mes oreilles. Le capitaine justement venait de prendre la parole annonçant qu'Eléonore et Elisabeth allaient chanter en duo. Eléonore avait une voix magnifique, mais en ce qui concerne Lizzie, je ne saurais vous dire si elle chantait bien. Ce devait être le cas, sinon le capitaine ne les auraient pas mise en duo. Ce devait être préparer depuis des semaines sans doute pour que tout soit parfait, ou alors cela venait de se faire à l'improviste, impossible de savoir. Une fois le discours du capitaine, un crépitement se fit entendre dans la salle, tout le monde ou presque applaudissait, mais je n'étais même pas d'humeur à cela, alors je crois que je me suis mise à sourire bêtement, sans doute parce que 2 amis allaient être mises en avant et que au fond de moi, ça me faisait plaisir. La chanson allait commencer dans quelques secondes, je pouvais sentir dans le regard de l'écrivaine une pointe d'anxiété mais j'étais persuadée que tout se passerait bien.

Il avait toujours quelque chose à raconter, ce n'était donc pas bien complexe de trouver quelque chose quand elle ne disait rien. Et ma foi, en cette belle journée comme les autres, Rosabelle n'était pas loquace et semblait encore plus paniquée qu'à son habitude. Il ignorait ce que la blonde venait de lui dire mais il ne voyait pas d'autre raisons au mal être de son amie.

Il fallait tout de même avouer qu'elle n'aimait pas être au centre de l'attention et n'appréciait pas réellement les conversations mondaines... du moins c'était l'impression qu'il s'était faites depuis les mois qu'il la fréquentait. Mais cette fois on atteignait des sommets et il avait une jolie envie de lui demander ce qui pouvait bien se passer.

Ce n'était pas pour rien qu'il lui avait demandé si elle souhaitait prendre l'air. Et même s'il avait terriblement envie de rester à cette soirée... il était prêt à la suivre dehors le temps qu'il faudrait. Il se sentait encore coupable de leur dernière rencontre lors du pique nique où il avait été odieux même sans le savoir.

Mais ils n'étaient pas sorti et son regard s'était porté sur les demoiselles qui étaient au centre de l'attention puis sur Rosabelle et plus particulièrement sa question. Est-ce qu'il connaissait Elizabeth ? Oh que oui et sous toutes les coutures. Mais ce n'était pas la réponse qu'allait obtenir la rouquine.

Il plongea ses mains dans ses poches dans un soupir avant de les passer dans ses cheveux impeccablement plaqués.


« Hum... on peut dire ça oui. »

Et l'irlandais avait tourné son visage vers Rosabelle pour afficher un sourire forcé. Il n'aimait pas être prit la main dans le sac de la sorte et préférait décider de lui même que dire sur ses compagnes d'une nuit ou plus. Là il n'avait pas le choix et ne pouvait décemment pas lui mentir.


« Et toi ? »

Se sentir hors de son milieu.

« Nous n'avons rien à faire ici. Nous jouons le jeu simplement pour cette soirée, mais demain les choses reviendront à la normal, il y aura les riches et à côté les pauvres. » Ajouta Georgiana à la suite des paroles de Sacha.

En effet, la troisième classe se trouvait toujours en compagnie de la blonde, avec elle, elle se sentait beaucoup moins seule et au moins, elle faisait bien moins tâche sur le paysage. Elle prit une coupe de champagne sur un plateau et la tendit à Sacha, ainsi, elle ne serait plus seule à savourer cette boisson probablement hors de prix. L'opulence était la caractéristique de ce bateau, ici on voulait que tout soit riche et cette soirée en était la preuve. Même les plus pauvres semblaient être des riches. Georgiana avait l'impression de perdre son identité, elle qui était toujours vêtue pauvrement, mais proprement. Pour rien au monde, elle n'aimerait qu'on la compare à l'une de ces filles de riches, elle était une fille d'ouvrier et rien d'autre.
A ce moment même, le capitaine du Titanic prit la parole, il voulait faire monter sur scène deux personnes. Éléonore Garnier et Élisabeth Cavendish. Georgiana connaissait, la première qui était une personne qu'elle appréciait pour son talent, quant à la seconde jeune femme, la brune la connaissait aussi. D'ailleurs, entendre ce nom la choqua, puisqu'elle n'avait pas vu Élisabeth Cavendish depuis sa plus tendre enfance. La troisième classe avait même oublié son ancienne amie d'enfance jusqu'à aujourd'hui. Cette situation était vraiment étrange, pourquoi donc le destin avait remis sur le même chemin, la petite pauvresse et la fillette de bonne famille. Non cela était bien trop gros, cela devait être une autre Elisabeth Cavendish, après tout, les homonymes étaient nombreux.

« Sacha, connais-tu cette personne Elisabeth Cavendish ? » demanda la jeune femme.

En effet, Georgiana préférait vérifier auprès de son amie, voir si cette Elisabeth était bien la sienne. Si Sacha ne pouvait confirmer, la troisième classe irait elle-même se renseigner, il fallait qu'elle sache. Après tout Elisabeth et elle avaient été de très bonnes amies durant leur enfance et Georgiana avait beaucoup apprécié cette amitié, notamment parce que son amie avait été tolérante envers elle et sa condition.
Pourtant, même si les deux fillettes s'appréciaient à l'époque, leurs chemins s'étaient séparés, Elisabeth était restée dans son univers luxueux et la petite Georgiana dans son petit appartement, deux pièces. Deux univers éloignés, mais pourtant, à l'époque, elles avaient été la preuve, que les riches et les pauvres pouvaient ensemble nouer une amitié.
Pour se remettre, Georgiana but d'une traite son verre de champagne et le posa sur une table à côté. Elle tourna son regard vers la scène, pour regarder les deux jeunes femmes qui s'approchaient de la scène. Eléonore avait beaucoup de talent, Georgiana ne doutait pas de sa prestation, mais pour Elisabeth, la troisième classe ne savait pas ce que cela allait donner. En tout cas, la première classe semblait nerveuse.

Si je constatais que finalement la différence entre les riches et les pauvres n'étaient pas trop prononcé ce soir, je me sentais plus à une fête de riches qu'à une fête de pauvre, sans doute parce que nous étions dans la salle de réception des 1ères classes. Mais cela m'était finalement assez égale. Georgiana était quant à elle moins équivoque. Elle était franche, cela était certains mais il faudrait essayé de nous immiscer dans cette petite soirée que le capitaine avait préparé pour tout le monde, pas seulement les plus riches. Mais elle avait raison, je ne pouvais la contredire, demain cela redeviendrait comme c'est le cas depuis 10 mois. La plupart encore des 1ères classes mépriseraient les moins riches. Si j'étais une deuxième classe, autrement dit, d'une richesse intermédiaire, je me sentais plus l'âme d'une pauvre qu'autres choses. Je n'avais jamais eu des grandes choses et même si je ne travaillais presque pas avant de venir sur le bateau, mon mari ramenant l'argent, nous n'avions pas tout le luxe qu'il y a dans la pièce. Mais je ne portais plus tellement mon regard sur la beauté de la pièce. Elisabeth était là sur scène, la chanson commençait mais toujours pas d'Eléonore. La pauvre devait être morte de trouille, parce qu'elle n'était pas du genre à chanter devant tout le monde comme ça. Elle le faisait devant un petit comité mais là, il y avait au moins la moitié du navire si ce n'est plus alors elle devait avoir peur. C'est ce moment là que choisit Georgiana pour me demander si je connaissais Elisabeth. Et bien pour l'avouer, oui, je la connais, un petit peu.

" Oui, je la connais un peu, elle est très gentille, et toi tu la connais ? "

Oui, parce que je suppose que si elle me demande c'est qu'elle doit aussi la connaître, non ? Enfin, je ne sais pas, elle semblait être surprise de voir miss Cavendish devant nous. Elle but d'ailleurs sa coupe de champagne d'une traite alors que j'avais toujours dans la main celle qu'elle m'avait gentiment donné. Je ne savais pas trop quoi faire en vérité, mais j'attendais que le show démarre comme il faut. La musique résonnait, Eléonore apparut enfin sur la scène comme si elle ne voulait pas venir. Pourtant, elle était très douée mais devant les autres, elle semblait être un peu apeurée. Il en allait de même pour Elisabeth d'ailleurs, elle semblait avoir un peu le trac, mais ce duo était original au moins, un mélange de classe sympathique. La musique était là, les voix se mêlaient à présent à la mélodie. La soirée semblait être parfaite, trop parfaite justement. Le Titanic ne serait peut être pas content que toutes les classes semblent si bien s'entendre. Il allait se passer quelques choses de mauvais, une bagarre un truc comme ça, ça ne pouvait pas se passer aussi bien jusqu'au bout. Enfin, j'avais ce pressentiment, mais si cela se trouve j'étais complètement à côté de la plaque.