Aurore sentait une pluie drue et violente battre la peau délicate de son visage, embourber ses jupons, tremper ses cheveux et ruisseler sur son corps. Mais elle sentait aussi l’étreinte chaude et rassurante de Malik et de ses bras. Il la tenait tout contre lui, enfouissant son visage dans sa chevelure ruisselante. Elle parvenait tout juste à sentir sa respiration chaude et haletante tout contre sa peau. Son corps frissonnait malgré elle tandis qu’elle savait la fin proche. Le sol tremblait sous leurs pieds, le crissement des roues sur les rails de fer transperçant le vacarme de la pluie envahissait l’espace. Ses oreilles bourdonnèrent bientôt, à mesure que le train se rapprochait d’eux, les amenant vers leur prochaine chute. Aurore se raccrochait à cette idée qu’ils allaient enfin être tous réunis. C’était devenu une évidence, de même que dans l’esprit de Malik. Durant toute une vie, ils n’avaient jamais cessé d’essayer d’accomplir la promesse qu’ils avaient faite à leur mère. Ils devaient tous se retrouver ensembles, ne jamais se séparer car ils étaient une famille. Sur le Titanic, ils étaient si près du but ! Tristan était avec eux, il ne manquait plus que leur tendre Yasmine, mais il était là, en chair et en os devant ses yeux. Il ne lui manquait plus que la mémoire que les trois jeunes gens comptaient bien lui rendre. Malheureusement, ils n’avaient pas prévu le naufrage et c’est ce qui avait causé leur chute. Si proche, si proche… et en une nuit à peine, tout avait basculé, toutes ces années de souffrance et de quête pour en arriver là… perde la trace de Yasmine, la mort tragique de Tristan… ils ne pourraient jamais plus être ensembles car le mur de la mort les séparait de manière immuable. La seule solution qui subsistait alors était de franchir par eux-mêmes la muraille de l’autre-monde. Il n’y avait guère plus que dans ce monde qu’ils pourraient enfin être ensembles comme ils l’avaient promis à leur mère. « Ensembles… » avait-elle soufflé à Malik avant que le train ne les fauche brutalement et ne les condamne à la nuit. Les ténèbres. Un vide immuable. Un grand éclat. Et soudain. « MALIK ! ». Aurore avait hurlé de toutes ses forces, se redressant brusquement sur sa couche. Ses prunelles affolées se posèrent sur chaque chose qui l’entourait. Elle mit quelques temps avant de comprendre réellement où elle se trouvait et de reconnaître sa propre cabine. « Non, c’est impossible… » murmura-t-elle pour elle-même. Elle s’extirpa de son lit en toute hâte, s’embronchant dans les couvertures et tombant à la renverse. Avait-elle seulement fait un mauvais rêve ? Avait-elle jamais quitté le Titanic en définitive ? Le naufrage, la mort de Tristan, leur suicide… tout cela n’était donc qu’un cauchemar ? Pourtant, tout avait semblé si réel. Non, ce ne pouvait être un songe. Alors que faisait-elle ici ? N’était-elle pas morte ? Le train les avait pourtant fauchés. Son esprit se mit à réfléchir à toute vitesse, envisageant toutes les possibilités qui pouvaient s’offrir à elle. Quelle étrange magie l’avait faite atterrir ici ? Etait-ce cela le Paradis ? Elle se releva, les jambes toutes flageolantes. Les sensations qui s’appliquaient à son corps étaient quelque peu étranges, comme un grand tourbillon. Titubant, elle marcha jusqu’à sa porte et en sortit. Elle se retrouva dans le couloir des secondes classes et observa l’animation autour d’elle. Quelques passagers passaient par là, visiblement, elle n’était pas seule ici. Toutefois, les lieux n’avaient pas l’allure du jardin d’Eden. Elle se risqua dans le long corridor et courut jusqu’à la cabine de Malik. Elle frappa plusieurs fois à la porte, l’appela à maintes reprises mais aucune réponse. Elle tenta de l’ouvrir, mais la serrure semblait verrouiller. Elle s’essaya ensuite au même exercice sur la porte de son frère Tristan, mais le triste résultat fut le même. Aucun des deux n’était présent, comme s’ils avaient tout à coup désertés le paquebot. Elle n’y comprenait décidément plus rien. Où étaient-ils ? Pourquoi était-elle seule, elle qui, de toute son existence, ne l’avait jamais été ? Elle se sentit tout à coup suffoquer. Manquant cruellement d’air, elle s’engagea en tout hâte vers les ponts supérieurs. La tête lui tournait, sa poitrine l’opprimait. Elle était perdue. Elle parvint finalement jusqu’aux ponts des promenades, mais tout l’air nouveau qui s’y trouvait ne lui fut d’aucun secours. Elle s’accrocha au bastingage, étourdie et haletante. Plusieurs minutes, elle tenta de regonfler ses poumons en oxygènes mais ils s’y refusaient. Ses jambes ne la soutirent bientôt plus et elle glissa lentement au sol, manquant désespéramment de vie car désormais, elle était un fantôme.
L'île ou le Titanic? Jack se posait la question de savoir ou il devait aller. C'était là les suites d'une longue interrogation qu'il se faisait depuis plusieurs jours sans discontinuer. Il avait petit à petit ouvert les yeux, finit par panser une plaie qui ne cicatriserait jamais. Il pouvait juste y apposer un pansement mais jamais elle ne se pourrait recoudre, ce gouffre béant était si fragile, qu'un rien le faisait rouvrir à nouveau, le faisant saigner comme jamais, déclenchant une souffrance sans précédent. Le résultat d'une blessure causé par le plus vil et plus beau des sentiments: celui qui emballait le cœur, l'amour. Alors, Jack avait longuement réfléchi, cherchant un moyen utile d'aller mieux, de ne plus faire apparaître l'inquiétude sur le visage de sa sœur ou des personnes qui lui étaient proches. Il fallait aller de l'avant pour mieux renaître de ses cendres. Sa vie avait volé en éclat, son intégrité avait été piétiné sans relâche, ni remords. Pourtant, malgré cela, Jack n'avait jamais songé une seule fois à la vengeance ou à faire souffrir. Non, il n'était pas comme ça. Préférant l'ignorance, il savait que le rejet pouvait parfois être la pire des vengeances. Et puis, au pire, ce ne serait pas la première fois qu'il l'ignorerait.
Elle... Héloise...
Autant ce prénom avait, autrefois, pu lui faire provoquer d'agréables frissons, désormais, il lui faisait grincer les dents. Il ne voulait plus en entendre parler, décrétant que c'était fini: elle faisait partie de son passé et pourtant, malgré cela, il souffrait de cette séparation préférant se réfugier derrière un sourire figé. Malgré cela, il savait qu'il ne pouvait rester ainsi. Jack ne supporterait pas bien longtemps l'état dans lequel il se trouvait. À un moment donné, sa patience atteindrait des limites et il finirait par exploser à nouveau parce qu'il ne supporterait d'avoir été dupé ainsi, de savoir que tout était réellement terminé. Il se savait capable d'aller à nouveau la voir et peut être de la supplier de lui laisser une chance, de lui hurler à nouveau dessus, de s'accrocher à un souvenir désormais disparu. L'indécision régnait en lui et il ne savait pas par ou commencer pour guérir d'une blessure d'amour. La seule réponse qu'il avait pour l'instant était de prendre de la distance avec Héloise, de passer à autre chose. Ce ne serait pas évident mais il le fallait. Il avait envie d'être heureux, de rire avec insouciance. Cela prendrait du temps certes, mais Jack se pensait prêt. Prêt à un nouveau départ, une nouvelle vie sans qu'elle soit à ses côtés comme autrefois. C'était ainsi, c'était la vie.
Il s'était réveillé tôt ce matin dans le but de démarrer sa journée plongé dans sa profonde réflexion. L'île ou le Titanic? Son cœur penchait pour le bateau parce que ce bout de terre n'avait rien de rassurant, peut être était ce manoir surplombant le village? La petite ville entourée de maisons semblait paisible et abandonnée et déjà plusieurs passagers y avaient pris possession. Malgré cela, Jack se sentait mal à l'aise , chose qu'il ne ressentait quand il foulait le plancher du paquebot. Le seul bémol: c'est quelle vivait ici, que sa cabine était dans le même couloir que la sienne et que les rencontres étaient malheureusement fréquentes. Aussi, afin de l'éviter le plus possible, le jeune homme, instinctivement, s'était levé plus tôt et couché le plus tard possible. Ce matin là, une fois lavé, sapé et paré pour quitter le coin des Troisièmes Classes, le blondinet avait laissé sa sœur pour se rendre sur le pont. Le soleil était en train de se lever et les rayons s'étalaient paresseusement sur la mer tandis que le demi cercle de la boule de feu s'élevait dans le ciel derrière l'île la frappant de sa lumière céleste. Le spectacle était magnifique et rappelait à Jack qu'il y avait parfois des fondamentaux dans la vie. Héloise avait été un pilier important de sa vie mais leurs chemins avaient fini par se séparer, ils ne s'entendaient plus. A quoi bon la mettre continuellement sur un piédestal? Il y avait certainement des choses bien plus importantes...
... Comme cette femme qui était en train de suffoquer, s'accrochant au bastingage du bateau. Jack resta médusé le temps de quelques secondes avant de se précipiter vers elle afin de lui porter secours. Elle était brune et semblait vraiment mal en point comme si elle n'arrivait plus à respirer: Jack la voyait essayer d'insuffler de l'air, son visage commençant à devenir violet. Ils ne pouvaient pas mourir encore une fois, c'était un fantôme, toutefois, le jeune homme n'avait pas envie de se trimballer un cadavre jusqu'à sa cabine qu'elle devait avoir et ce, afin d'attendre son réveil. Il s'approcha et posa une main rassurante sur son épaule, l'autre s'accrochant au bastingage.
" Mademoiselle, calmez vous! Écoutez ma voix... " murmura t-il se penchant vers elle. " Tout va bien... Calmez vous... Faites le vide autour de vous.. Voilà c'est bien.. " la rassura t-il en lui souriant quand elle releva la tête afin de voir qui était en train de lui parler. " calmez vous.. Et maintenant inspirez légèrement... " ajoutat-il ne délaissant pas son sourire tandis que son cerveau réfléchissait à toute vitesse: son visage lui était totalement inconnu, enfin, elle avait une ressemblance par la couleur des cheveux et des yeux avec un passage. Mais en dehors de cela, elle ne lui rappelait rien du tout.
L’air manquait dans ses poumons qui essayaient goulument de faire entre de l’oxygène dans leurs bronches. Aurore suffoquait, ses agrippant fermement la barre du bastingage tandis qu’elle était tombée à genoux. Tout ce qu’il se passait ne pouvait être réel. Pourquoi se retrouvait-elle ici à bord du Titanic alors que quelques secondes plus tôt, elle était dans les bras de Malik, prête à rejoindre les plaines lumineuses du Paradis ? Et d’ailleurs, où était-il ? Et si elle s’était retrouvée sur le paquebot, pourquoi n’avait-elle pas non plus trouvé Tristan ? Tant de questions se bousculaient dans son esprit affolé auxquelles elle ne parvenait à trouver de réponses. Non ! Non ! Non ! Tout ça est impossible. Je rêve ! Les yeux rivés sur le parquet ciré du pont des seconde et troisième classes, Aurore n’osait véritablement y croire. Son esprit se rebellait contre cette idée tandis que son corps tremblait encore du choc de sa mort si brutale mais désirée. La douleur, la souffrance, la solitude de ces derniers mois ne pouvaient être factice. Ça ne pouvait qu’être un simple cauchemar. Le naufrage avait bien eu lieu, avec ses cris et ses pleurs. Aurore se souvenait de cet instant où elle avait retrouvé Edward. Il avait promis qu’il la retrouverait et d’une certaine manière, il y était parvenu. Sur ce même bateau, ils avaient été tous rassemblés comme dans les tendres rêves d’Aurore. Yasmine, Malik, Tristan, Edward et elle. Tout aurait pu s’arranger et reprendre le cours normal des jours. Ils auraient enfin pu accomplir la promesse faite à leur mère et marcher fièrement sur le chemin dans la vie, la tête haute et main dans la main. L’impitoyable destin en avait choisi autrement. Il avait préféré que Tristan leur soit arraché par les bras de la mort, il avait préféré qu’ils perdent Yasmine, ne sachant jamais si elle avait péri sur le Titanic ou non, il avait préféré effacer toutes traces du passage d’Edward et faire de lui une simple ombre au passage aveugle. Le monde n’avait décidé de lui rendre que Malik. Un Malik encore plus dévasté par la perte de tous ces êtres chers. C’était lui qui devait accomplir la promesse, c’était lui qui devait tous les réunir un jour et il avait échoué. Aurore se souvenait de ces longues heures qu’elle avait passé auprès de son frère, à tenter de le réconforter, de panser leurs blessures ensembles mais cela avait été bien vain. Il s’était enfermé dans un profond mutisme duquel elle ne parvenait à le délivrer. Elle qui avait toujours su trouver les mots pour apaiser l’esprit tourmenté de son aîné, voilà qu’elle était impuissante. Sans nul doute parce qu’elle était tout aussi abattue que lui. Alors ils se contentaient de rester durant des heures dans les bras l’un de l’autre, étouffant parfois quelques sanglots. Et c’était la chaleur réconfortante de ces bras forts et chauds qui lui manquait terriblement à cet instant. « Malik… » gémit-elle à travers l’un de ses halètements. Elle parvenait à peine à former ce simple nom tant l’air lui manquait. Une main se posant sur son épaule la vit tout à coup sursauter. Elle releva le visage et une tête blonde apparut dans son champ de vision. C’était un jeune homme qu’une vingtaine d’année, la mine soucieuse et le regard franc. Elle se raccrocha à ses prunelles d’azurs, semblant revoir dans ces yeux ceux de Malik et Tristan. La main plaquée contre sa poitrine, elle écoutait les murmures de l’inconnu, calant sa respiration sur son ton calme et serein. Et à mesure qu’il lui intimait le calme, elle sentait l’air affluer de nouveau dans ses poumons. Elle prit tout à coup une grande inspiration, comme si on venait tout à coup de lui sortir la tête de l’eau. Elle eut un léger sourire soulagé en retrouvant enfin son souffle, répondant à celui du jeune homme. Elle mit plusieurs minutes avant de reprendre un rythme plus apaisé et que les battements de son cœur se ralentissent. « Merci… » souffla-t-elle, essoufflée. Ses membres tremblaient encore d’émotions et elle ne parvenait à les faire taire. Ces nerfs lâchèrent soudain et elle se mit à éclater en sanglots. Les larmes dévalèrent ses joues tandis que ses pâles prunelles se posaient sur tout ce qu’il l’entourait, sur cet océan qui s’étendait à perte de vue. « Je ne comprends pas… qu’est-ce qu’on fait ici ? Pourquoi je suis là ? » demanda-t-elle, sentant les battements de son cœur s’emballer de nouveau alors que les questions se pressaient en elle. « J-je… l-le naufrage… n’y en a-t-il pas eu un ? » Les prunelles d’Aurore se posèrent sur le visage du jeune homme, attendant désespéramment des réponses. « Excusez-moi… vous devez me prendre pour une folle. Ce que je dis n’a aucun sens… »
Jack ne savait pas si sa technique allait fonctionner ou non. Permettre à la jeune femme de reprendre son souffle lui semblait une tâche bien ardue alors il s'était calqué sur cette panique qu'elle semblait avoir au fond d'elle. Ses yeux hagards tentaient de reprendre le contrôle sur quelque chose qu'elle ne maîtrisait plus. Alors le blondinet tentait du mieux qu'il pouvait pour l'aider. Parler à voix basse, poser sa main sur son épaule, avoir un air et un ton des plus rassurants. À ses yeux, il n'était pas certain de la réussite de son intervention mais il y mettait du sien pour y arriver. Avec une satisfaction certaine, il la vit l'écouter et calquer son souffle sur son intonation calme. La jeune femme finit par reprendre une goulée d'air qui sembla la délivrer de cette impossibilité de respirer qu'elle semblait subir. Jack lui fit un sourire encourageant et ajouta à nouveau: " C'est bien ... Continuez ainsi ... "
Il la laissa continuer à reprendre son souffle petit à petit et resta près d'elle afin qu'elle se remette de ses émotions. Au bout d'un certain temps, l'air s'insuffla dans ses poumons et elle parut aller mieux. Elle leva ses yeux aussi bleus que les siens et le remercia d'une petite voix. Et puis, son visage se décomposa et elle éclata en sanglots se demandant ce qu'elle faisait ici. Ses paroles furent lourdes de sens aux yeux de Jack qui fut certain d'être face à ces passagers que l'on appelait des revenants. Cela faisait plus d'un an qu'ils étaient tous coincés ici, alors forcément, quand un "nouveau" ne comprenait sa présence ici et parlait du naufrage, il était certain qu'il ne s'agissait pas d'un passager lambda mort sur le paquebot. C'était le cas pour cette jeune femme et il restait alors une partie très difficile à faire pour Jack: expliquer par des mots simples et rassurants sa propre présence. Autant avec Pernelle, cela avait été évident tant la jeune femme s'était montré entreprenante et emplie de compréhension mais cette jeune femme, elle était décomposée, effarée. Le joueur de poker craignait que ses paroles ne la perturbent davantage. Se raclant la gorge, Jack se redressa et sa main qui était posée sur l'épaule de l'inconnue, se posa alors sur le bastingage. Restant néanmoins à côté de la revenante, le blond aux yeux d'azurs tenta de lui expliquer la situation actuelle:
" A vrai dire... C'est un peu compliqué. Si vous êtes ici, c'est que vous êtes morte. " Lui expliqua t-il d'une voix sombre. " Manifestement, vous me semblez avoir survécu au naufrage du 14 avril 1912. Vous êtes arrivés à New York, vous avez eu l'opportunité de vivre votre propre vie jusqu'à ce que la mort soit arrivée. Dès que cela est arrivée, vous êtes, en en quelque sorte, revenue sur le paquebot, coincée dans l'enveloppe corporelle que vous aviez en 1912. " Jack lui fit un sourire encourageant s'inquiétant de l'impact qu'allait produire ses paroles : " Ici, vous êtes ce qu'on appelle une "revenante"
Il posa sa main sur son torse et continua de parler en essayant toujours d'adopter un ton aussi rassurant : " Je m'appelle Jack et moi, je suis mort lors du naufrage. Au lieu d'atteindre un quelconque paradis ou enfer, je me suis retrouvé coincé sur ce bateau, figé dans ma vie que j'avais autrefois. C'est à dire que je ne peux vieillir ou mourir. Et quand bien même, je voudrais mourir, que je penserais y arriver, je me réveillerais le lendemain sur ce bateau. Nous sommes... " Sa voix s'éteignit dans un murmure et Jack, soudain inquiet, regarda le visage de la jeune femme.
" Tout va bien? Vous voulez peut être vous asseoir? "
Mon esprit était si embrouillé que les paroles qui sortaient de ma bouche aurait tout aussi bien pu être celles d’un fou. Peut-être l’étais-je devenue ? Que faire alors… J’espérais seulement à cette heure que mon sauveur ne se montrerait pas trop intransigeant. Après, sans doute étais-je déboussolée par mon manque d’oxygène. Je m’étais réveillée d’un mauvais rêve, celui du naufrage et j’avais fait une petite crise d’angoisse, rien de bien méchant. Malik et Tristan devaient être dans le restaurant des deuxièmes classes, en train d’apprécier un bon petit déjeuner. Non. Je ne devais pas m’en faire. Peu à peu, je retrouvais mon sang-froid et la maîtrise de moi. Je balayais les larmes qui s’étaient échouées sur mon visage. J’aurai aimé effacer toutes les paroles que j’avais sorties à l’homme, me rendant compte de leur manque de pertinence. Soit il me prendrait pour une folle, soit il penserait que j’étais sotte. Dans les deux cas, rien de bien enviable, mais je pouvais encore corriger ma faute pour lui faire comprendre que je n’avais été victime que d’un bref moment d’égarement. Quand bien même, ce n’était pas grave si je n’arrivais pas à le convaincre. Je doutais que nous puissions nous revoir quand nous aurons débarqué en Amérique. Ils m’oublieraient et je l’oublierai. Le mal n’était pas bien grand. J’allais m’apprêter à me justifier quand j’interceptai le regard énigmatique de l’inconnu. Je ne sus pourquoi, mais je n’osais aller plus loin et j’attendis en silence. Quelque chose dans son attitude m’intimait que je n’avais pas complètement tort. Mais comment pourrai-je avoir raison dans une telle situation ? Je le suivais des yeux tandis qu’il se relevait. J’imitai son mouvement, m’accrochant au bastingage pour être à sa hauteur. Un peu de prestance que diable ! Mes prunelles cherchaient désespéramment les siennes, à la recherche de réponses. « A vrai dire... C'est un peu compliqué. Si vous êtes ici, c'est que vous êtes morte. » J’ouvrais de grands yeux effarés avant que ma surprise ne se transforme en un rire. Ça y est ! Je comprenais tout. Cet homme se payait ma tête ! Quel soulagement ! Mais une fois encore, quelque chose dans son regard me stoppa dans mon rire et m’astreint au silence. « Manifestement, vous me semblez avoir survécu au naufrage du 14 avril 1912. Vous êtes arrivés à New York, vous avez eu l'opportunité de vivre votre propre vie jusqu'à ce que la mort soit arrivée. Dès que cela est arrivée, vous êtes, en en quelque sorte, revenue sur le paquebot, coincée dans l'enveloppe corporelle que vous aviez en 1912. Ici, vous êtes ce qu'on appelle une "revenante Je m'appelle Jack et moi, je suis mort lors du naufrage. Au lieu d'atteindre un quelconque paradis ou enfer, je me suis retrouvé coincé sur ce bateau, figé dans ma vie que j'avais autrefois. C'est à dire que je ne peux vieillir ou mourir. Et quand bien même, je voudrais mourir, que je penserais y arriver, je me réveillerais le lendemain sur ce bateau. Nous sommes...» Je l’observais tout le long qu’il parlait. A mesure que les mots s’échappaient de sa bouche, je sentais mon visage devenir marbre et mon sourire s’évanouir. Mes prunelles n’avaient jamais dû être aussi glacées qu’à cet instant. Manifestement, tout ce beau discours avait dû être bien préparé depuis longtemps ou bien était-ce l’inspiration d’un artiste visiblement débile. Toujours était-il que la farce n’était pas à mon goût. Je voulais bien rire un peu mais cet homme allait trop loin. Pourtant, si j’avais eu un minimum de jugeote, j’aurai pu me rendre aussi compte qu’il retraçait avec exactitude les éléments qui constituaient les souvenirs de mon rêve. Il avait tout bonnement raison mais ça, mon esprit ne pouvait pas encore l’accepter. Tout ce que je voyais en lui, c’était un pauvre bouffon qui avait trouvé sa victime du jour pour se payer sa tête. Et je n’appréciais guère qu’on rit à mes dépends. En tout cas, il avait un incontestable don d’acteur car il jouait à la perfection l’inquiétude. Je ne devais pas être sa première victime, bonne poire que j’étais ! « Tout va bien? Vous voulez peut être vous asseoir ? » Et en plus, il osait se montrer prévenant et me demander si j’allais bien alors qu’il était évident que ce pauvre homme avait un grain. Je reculais d’un pas, dardant un regard coléreux sur lui. « Je vais très bien mais il semble que cela ne soit manifestement pas votre cas ! Ça vous amuse de vous moquer des gens comme vous le faites ? Croyez bien que je ne suis pas assez sotte pour croire en de telles balivernes ! » Je jetais des derniers mots plutôt abruptement. J’étais en colère et perdue. Je refusais de croire ce qu’il me disait. Autant être dans le déni. « Ce… cette situation est absurde ! » fis-je d’une voix soudain mal assurée. « Vous dites n’importe quoi ! » Et je commençai à m’éloigner sur le pont, bien décidée à trouver Malik et Tristan. Et surtout, à quitter la compagnie de ce Jack !
Il avait tenté d'être le plus explicite et le plus réaliste possible. Mais c'était une tâche qui s'avérait plutôt ardue. Enfin tout dépendait du revenant qu'il avait eu en face de lui. C'était la deuxième fois qu'il faisait face à une personne de cet acabit et pourtant, Jack avait la sensation que rien ne se passerait comme avec Pernelle. Cette dernière avait été des plus détendues lorsqu'elle était tombée nez à nez avec lui. Elle s'était littéralement affalée sur le joueur de poker parce qu'elle avait la tête ailleurs. Elle avait compris ou elle se trouvait et ce que cela impliquait. A vrai dire, elle avait même été heureuse de se retrouver ici coincé dans sa jeunesse éternelle. La jeune blonde avait été si enjouée, si gaie que Jack avait immédiatement sympathisé avec elle. Le fait que tout avait été si simple était peut être l'une des principales raisons ou il avait été pendant un laps de temps attiré par elle, par ce personnage un peu loufoque qu'elle était. Il n'avait jamais eu l'opportunité de la revoir mais désormais que tout était désormais clair entre lui et Héloise, il était peut être temps de la revoir sans se soucier des quelconques crises de jalousie de chacun. Dans tous les cas Pernelle ne réagissait pas de la même manière que cette inconnue. Ou de la même manière que lui. À son réveil, Jack s'était réveillé dans sa cabine ou s'y trouvait sa sœur également ainsi qu'Heloise. Il n'avait pas compris, tout était encore flou. L'impression d'avoir fait un terrible cauchemar accaparait complètement son esprit. D'habitude, il ne réveillait pas sa sœur pour si peu mais là... Il sentait que quelque chose n'allait pas, tout comme il avait le cœur en miette et une douleur sourde. Il avait réveillé sa sœur et l'avait tiré de son sommeil sans venir voir Héloise parce que quand il avait besoin de parler ou de faire part de ses impressions, c'était Lydia et personne d'autres. Mais quand sa fougueuse frangine s'était réveillée et qu'elle avait littéralement explosé de rage contre Héloise, la secouant du sommeil au passage, Jack avait compris qu'il n'avait pas rêvé, que tout était réel y compris ce mensonge... Non cela ne pouvait pas être possible et pourtant ça l'était, alors Jack n'avait plus dit mot et dès lors qu'il avait croisé le regard d'Heloise, il avait tourné les talons et avait quitté la chambre. Le souvenir de sa mort, de cette terrible vérité le torturaient et il ne pouvait regarder Héloise sans penser à la veille de naufrage. Maintenant, il réalisait que chaque passager avait eu son réveil et son lot de conséquence. Le plus dur restait à le faire accepter ce qui n'était pas gagné d'avance. Quand il lui expliqua qu'ils étaient morts, elle le regarda d'un air surpris avant de se mettre à rire. Bon si elle le prenait bien, tant mieux pour lui: il ne lui restait qu'à lui expliquer comme elle était arrivée ici et qui étaient ces passagers. Mais au fur et à mesure qu'il lui parlait, son visage sembla se fermer, ses sourcils se froncèrent. Peut être que c'était trop irréaliste pour elle. C'était sans nulle doute le cas. Alors Jack lui avait demandé si elle voulait s'asseoir. Mais au lieu d'un quelconque acquiescement, elle le regarda d'un air sévère et puis, elle se mît à lui répondre d'un ton sec. Elle ne le croyait pas. Ce qui ne l'étonna pas du tout. En revanche, le ton qu'elle employait avec lui comme s'il était fou ne lui plaisait pas. Et Jack depuis quelques temps n'était plus le gentil, n'était plus celui qui acceptait tout sans broncher. Néanmoins, il la laissa continuer à parler puis fière comme d'Artagnan, elle lui tourna le dos repartant dans l'autre direction. Alors Jack eut un sourire sarcastique à son égard et il lui lança bien fort:
" Rappelez moi ... Pour la prochaine fois... De vous laisser vous étouffer toute seule et surtout... D'éviter de vous répondre quand vous me demanderez ou vous vous trouvez! " Lui lança t-il sur un ton hargneux. Oui, Jack se moquait des conséquences, il se moquait de savoir s'il allait la choquer ou l'énerver encore plus par ces propos. Il avait mangé du lion. Et Jack Cooper n'était plus le genre d'homme à se laisser faire. Faisant face au dos de la jeune prude, il accouda son bras gauche et la regarda d'un air moqueur tout en ajoutant: " Les revenants sont de plus en plus impolis, ça devient une maladie. "
Je ne parvenais tout bonnement pas à croire un traître mot de ce qu’il me disait. Dans mon esprit, tout n’était qu’affabulation, qu’invention de la pire sorte afin de se moquer de moi. Je trouvais son comportement fortement inconvenant car il profitait de ma faiblesse et exploiter mes failles dans ce moment d’égarement pour se jouer de moi. Néanmoins, je n’étais pas aussi sotte qu’il pouvait le croire et je me défendais autant que je le pouvais avec les armes que je possédais contre lui. J’étais aussi bien déçue car tout en lui m’inspirait sympathie et sincérité. Je pensais avoir trouvé un allié dans cette situation plus que déroutante, mais il n’en avait eu que faire de mes états d’âme. Toutefois, la vie m’avait appris à relever la tête et à être forte face aux agressions d’autrui et c’était avec la plus de prestance que je pouvais que je désirais quitter cet endroit et les paroles blessantes de ce Jack Cooper. Il était bien présomptueux de penser qu’il pourrait se moquer de moi de la sorte. J’espérais alors partir et retrouver mes frères Malik et Tristan. Je savais qu’ils seraient en mesure de m’apporter plus d’explications que ce piètre « gourgandin ». Et après cela, sans doute irai-je voir mon tendre fian… Je m’arrêtais soudain, réalisant le fil de ma pensée. Edward. Je songeais tout à coup à cet instant où je l’avais retrouvé durant le naufrage, au fait que je l’avais perdu quand qu’il m’ait fait monter dans une embarcation. Tout m’avait semblé si réel mais… c’était un rêve n’est-ce pas ? Tout mon esprit était embrumé par les vagues de souvenirs qui ressurgissaient en moi. Ma sœur sur le paquebot, l’iceberg, le tumulte, les retrouvailles avec Edward, ma chute du canot de sauvetage, Malik qui saute à l’eau, New York, la mort de Tristan et celle de Malik et moi en ce jour de pluie… Le train. « Rappelez moi ... Pour la prochaine fois... De vous laisser vous étouffer toute seule et surtout... D'éviter de vous répondre quand vous me demanderez ou vous vous trouvez ! » J’entends à peine ses paroles qui résonnent dans mon esprit. Tout à coup, tout ce qu’il dit me semble si lointain mais je reste tout de même quelque peu ébranlée par le ton vexé qu’il prend. Se pourrait-il que… qu’il m’ait dit la vérité depuis le début ? Mais comment était-ce possible ? Comment pouvions-nous tous être morts ? L’idée même que tout cela fut vrai et que je sois morte et emprisonnée à bord même du Titanic me faisait tourner la tête. Une fois encore, je sentis l’air me manquer et je m’accrochais à la rambarde pour ne pas perdre pied. J’aurais souhaité que Malik soit là pour me rassurer, qu’il me prenne dans ses bras et qu’il me caresse les cheveux comme il le faisait à chaque fois pour apaiser mes craintes. J’aurai aimé avoir Tristan qui me rassurait toujours de son ton posé, de ces paroles pleines de sens qui avaient toujours pour don de rasséréner mon esprit. Où pouvaient-ils bien être ? Et Malik… si tout cela était bien vrai… était-il arrivé sur le Titanic lui aussi ? Subirait-il le même sort que moi ? Et qu’en était-il de mon fiancé ? Ou bien de ma sœur…. Je ne savais même pas si elle avait survécu au naufrage ou non… Yasmine…. Je sentis les larmes me monter aux yeux et je retins un sanglot en plaquant ma main contre ma bouche. « Les revenants sont de plus en plus impolis, ça devient une maladie. » Je me retournais tout à coup vers le troisième classe, la mine interrogatrice. « Les quoi ? » je balbutie, sentant les larmes rouler sur mes joues. Tout à coup, les paroles du jeune homme prenait un souvent sens dans mon esprit. Je réalisais tout ce que représentait ce décor, la situation improbable dans laquelle nous étions et qui me plongeait dans une angoisse indicible. J’observais ensuite la mine froide que Jack portait sur moi et je sentis mon cœur se serrer dans ma poitrine. Il avait raison. Je sentais ma poitrine s’élever et se rabaisser au rythme douloureux de ma respiration. Finalement, je revenais vers le jeune homme, brisant en quelques pas la distance qui nous séparait l’un de l’autre. Je restais un moment face à lui sans rien dire, les yeux rivés sur le parquet ciré du pont. Quand enfin je relevais mes prunelles vers lui, elles étaient toutes embrumées de larmes. « Je… je ne comprends toujours pas… comment se fait-il que nous soyons ici ? Et comment vivez-vous depuis un an ? Qu’est-ce que… » Ma pensée s’embrouillait en même temps que les mots s’emmêlaient dans ma bouche. Je pris une nouvelle respiration et tâchais de faire taire les tremblements dans ma voix. « Tout… tout le monde est revenu alors ? Je retrouverais ma famille ? » demandais-je d’une voix étranglée par l’émotion.
Il n’avait pas été des plus tendres avec la jeune femme. Elle était déboussolée, cela se comprenait. Qui aurait pu croire une telle chose dans le monde des vivants que chacun avait connu un jour ou l’autre ? Qui enseignait aux enfants que la mort serait ainsi ? Qui pourrait croire que le Titanic serait leur prison dorée, leur purgatoire dans lequel les vivants n’avaient pas leur place ? Ils étaient maudits et pour l’éternité. Parfois, le Paradis semblait ouvrir leur porte et souvent, des passagers disparaissaient ou mourraient sans jamais se réveiller. Mais à ceux dont leur cœur battait toujours, que leur restaient-ils mis à part le néant ? La seule solution était alors de combattre le vide abyssal par un semblant de vie dont chacun se cachait. Repos salvateur ou fausse vérité. Personne ne savait et tout le monde faisait comme si de rien n’était. Il arrivait parfois qu’un passager puisse en avoir gros sur le cœur, qu’il puisse envisager que la mort soit le meilleur des repos. Et cela avait été le cas avec Jack. Il était malheureux. Il était en colère. Il était triste. Il ne fallait pas l’énerver parce qu’il était prompt à réagir de manière trop impulsive. Un brin ingérable, le troisième classe savait qu’il passait pour un fou furieux aux yeux d’autrui mais à vrai dire, il s’en moquait fortement. Plus rien ne comptait en dehors de cette peine immense qui lui lacérait le cœur comme jamais.
Elle t’avait menti. Elle t’avait caché l’existence de ce bébé, ton enfant, le tien. Celui qui aurait été la chair de ta chair, ce sang issu du tien coulant dans ses petites veines.
Cette pensée traversant son esprit lui était tout bonnement insupportable. Pourquoi tout cela ? Pourquoi devait-il subir tant de souffrances, lui qui avait cru durant quelques mois que tout irait pour le mieux. Il avait tant de haine envers la Comtesse, tant de colère… Il aurait voulu la réduire en charpie, la gifler pour lui remettre les idées en place. Mais en lieu et place de cela, il avait préféré prendre la fuite, préférant ne pas écouter les excuses de la jeune femme. De toute manière, il était convaincu qu’elle lui tisserait encore un ignoble tissu de mensonges. Elle n’était bonne qu’à ça de toute manière. Tout comme ces imbéciles qui l’entouraient comme cette femme qui s’offusquait croyant qu’il mentait. Lui ?! Lui, mentir ?! C’était peut être cette accusation qui fut de trop, qui le fit bondir. Même ses paroles furent un peu trop hargneuses. Il les regretta dès l’instant ou elles étaient sorties de sa bouche, de les avoir dites. Pourtant, il ne s’excusa pas. Trop fier, trop orgueilleux et parfois un tantinet trop stupide. Le peu d’empathie dont il pouvait faire preuve parfois ne semblait pas fonctionner avec cette jeune femme. Pourtant, elle ne semblait pas méchante, bien au contraire. A sa dernière phrase, elle avait tourné les talons et était revenue vers lui. Le mot « revenant » semblait avoir eu un effet sur elle parce qu’elle le regarda sans comprendre. Ses yeux s’emplirent de larmes tandis qu’elle lui posa des questions. En faite, elle n’avait pas vraiment écouté les paroles de Jack avant de s’offusquer… Le joueur de poker fit un effort intense pour ne pas l’envoyer sur les roses à nouveau. Il suffisait de voir ces yeux brillants : Jack avait horreur de faire pleurer les femmes. Poussant un soupir, il tenta d’expliquer au mieux :
« Croyez moi, je ne vous mens pas. Vous êtes mortes il y a peu non ? » Il se passa la main derrière la nuque, embarrassé. Il avait l’impression de ne pas utiliser les bons mots. « Moi, je me souviens de ma mort, j’étais sur le bateau et il n’y avait plus de place sur les canots. J’ai fini dans l’eau et le froid m’a tué. Quand je me suis réveillé, j’étais ici. Et pourtant, je me souvenais d’avoir senti la vie me quitter. C’est fou ce que je dis mais c’est la vérité. Tout ceux qui ont été sur ce bateau qu’ils aient survécu ou bien soient morts ici, sont tous ici. »
Jack s’était arrêté de parler, lui laissant digérer la nouvelle qu’il venait de lui dire. Elle semblait toutefois comprendre et cette fois ci, le jeune homme ne se vit pas accuser de mensonges. Non, au contraire. C’est d’une voix lente qu’il l’entendit lui demander si sa famille se trouvait ici. Face à sa docilité, le bon cœur de Jack refit surface et il s’apaisa également tandis qu’il lui fit un sourire encourageant. Elle serait certainement contente de retrouver les siens. Il suffisait juste de savoir qui ils étaient. Peut être même qu’il les connaissait.
« C’est fort probable que votre famille soit ici. Ont-ils survécu au naufrage ou bien les avez-vous laissé ici en montant dans un canot. » Jack n’attendit pas la réponse à sa question pour lui en poser une nouvelle : « Comment s’appellent-ils ? Je pourrais alors vous aider à les retrouver ? Le bateau est certes grand. Mais à force de vivre ici, on finit par connaître les visages et les prénoms s’y accompagnant. »
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