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 Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]

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MessageSujet: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyDim 22 Sep - 10:08

Loin du froid

de décembre...




Il était près de minuit passé et je ne dormais toujours pas. Mes yeux étaient grands ouverts et je me trouvais dans une salle remplie d'instrument de musique. J'étais allongée sur un piano à queue dont j'avais refermé le couvercle pour pouvoir m'y poser. Et je fixais le luminaire, immobile, perdue dans mes pensées les plus sombres. J'avais à mes côtés une bouteille de champagne subtilisée dans les cuisines. Je découvrrais, cette nuit, la fragrance parfumée du raisin, le pétillement des bulles sur mon palais. Je découvrais la liberté, celle de ne dépendre de personne, de n'avoir aucun patron de ne pas être enfermé mes bras immobilisés dans une camisole. J'étais libre mais je me sentais prisonnière dans ce navire voguant sans but depuis un an déjà.
Je ne savais qu'elle serait alors mon destin par la suite. La seule chose c'est que tout se faisait au jour le jour. A la seule différence, c'est que ma schizophrénie avait empirée plus que jamais et mes pulsions revenaient plus souvent, sans arrêt. L'appel du sang, de la mort me torturait sans arrêt et je me sentais faible à l'envie qui me ténaillait. Aussi, j'évitais le plus possible les gens de jour préférant être éveillée la nuit quand le bateau était plus calme, quand croiser les passagers devenait moins périlleux. Ne voulant pas qu'on me découvre avec ma maladie, je préférais m'isoler.
J'étais donc allongée et je sentais l'enivrement m'envahir petit à petit et je songeais à cette chanson, cette mélodie qui m'avait berçée tant de fois. C'était une chanteuse célèbre qui en était l'interprète. Je l'avais entendu après mon retour sur la terre ferme, aux États Unis. Elle avait été reprise par une jeune femme. Mais l'unique interprète, une chanteuse du nom de Amy en était l'auteur. Je n'avais jamais entendu sa véritable version. La douce voix mélodieuse de la chanteuse me faisait toujours un effet désastreux, elle m'emportait vers d'autres horizons. La chanson me rappelait tant de souvenirs, je songeais à ma mère et son amour. Et je ne pouvais m'empêcher de frédonner les paroles

" Des images me reviennent .." chantonnais je dans la vaste salle plongée dans une obscurité à demi teinte. Et je continuais ainsi: "comme le souvenir tendre....Une ancienne ritournelle... "Et je la revoyais, ma chère mère avec son sourire et cette amour dont elle m'abreuvait tout le temps. Je voyais ses longs cheveux bruns et son visage si similaire au mien. Qu'autrefois en Décembre..."

Décembre, ce fut à ce moment là que ma vie avait basculé. C'est là que mon père a tué ma mère, c'est là que je me suis vengée à mon tour, que je l'ai tué de sang froid. Il venait de tomber les premières neiges en montagne et mon cœur était devenu aussi froid que la consistance blanche. J'étais encore qu'une enfant et je venais de faire mourir mon propre père.

Je me souviens, il me semble... Et une larme roula le long de ma joue pour finir sa route dans mon cou. Il était tellement dur de vivre ici, il était tellement difficile de pouvoir avoir confiance en quelqu'un. Tant d'émotions me submergeaient ce soir qu'elle libérait le peu d'humanité qui me restait. J'étais dans la sphère de mes souvenirs et je me rappelais encore et encore. Se rappeler des moments heureux étaient une expérience à la fois courte et intense, j'avais été tellement peu de fois heureuse.


Des jeux qu'on inventait ensemble... Et ma voix se figea dans les airs. Je venais d'entendre du bruit.

Une porte qui s'ouvrait plus précisément. Celle qui ouvrait et fermait la pièce dans laquelle je me trouvais. C'est alors que je vis une femme entrer. Je ne disais mot tandis que je l'observais toujours allongée sur le piano. Je ne faisais de bruit ayant cessé de chanter. Au tâtonnement de ces pas, à la vision de ses mains semblant la diriger, j'en déduisais qu'elle était sans doute aveugle et semblait même perdu. Je ne disais mot de peur de la faire sursauter. Après tout, il faisait nuit et le paquebot était désert, était ce ma voix, ma chanson qui l'avait conduite à moi? Cela était possible car la porte était restée entrebâillée... Depuis, le silence avait envahi la salle. À un moment donné, je la vis foncer vers une impasse. Et c'est alors que je me manifestais :

" C'est droit vers un mur que vous vous dirigez..." murmurais je.
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyDim 22 Sep - 21:05

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Loin du Froid de Décembre.


Une mélodie…
Une douce mélodie familière…
Une douce mélodie qu’elle ne connaissait que trop. Le son du violon emplissait l’atmosphère et ensorcelait Ambre comme la première fois qu’elle l’avait entendu, un jour d’automne à Paris lorsqu’elle était enfant. C’était le violon de Dimitri qui pleurait et qui envoûtait le cœur de la jeune femme, comme le suave chant des sirènes. Elle voulait aller à lui, elle devait aller à lui, comme un marin perdu se raccrochant à son phare. Ambre ouvrit les yeux et elle vit.
Elle vit pour la première fois depuis des années. Les rues se dessinaient à ses pieds tandis que les habitations du majestueux Paris se dressaient autour d’elle. Les gens passaient, couraient… Les dames de la haute société se pressaient dans des froissements d’étoffes et de plumes qui couvraient leur chapeau. Les martèlements des sabots des chevaux faisaient vibrer le sol et le coup de fouet claquait dans l’air, se mêlant à la cacophonie générale.
Mais Ambre n’entendait que le mélodieux chant du violon qui s’élevait au loin. Et ses pas l’y menaient, la guidant à travers la foule agitée. Qui était-elle dans cette population qui ne faisait pas attention à elle ? Elle était redevenue la petite fille qu’elle était autrefois. Celle qui était encore Ambre mais qui ne connaissait pas le garçon qui hanterait ses pensées toute sa vie. Alors pourquoi savait-elle déjà qu’elle allait le trouver ? Pourquoi savait-elle déjà quel visage prendrait l’enfant qui jouait ainsi du violon comme si elle l’avait toujours connu ? Mais elle ne songeait plus qu’à rejoindre la musique…sa musique…
Quand enfin, elle parvint sur l’un des ponts de la Seine. Et il était là. Il était là comme s’il l’attendait depuis toujours, jouant du violon avec une telle intensité qu’on aurait pu croire qu’il pleurait avec son instrument. Les larmes montèrent aux yeux de la petite fille et roulèrent sur ses joues. Pourquoi pleurait-elle ? Elle n’aurait su le dire mais un prénom lui vint instantanément à l’esprit, telle la clef de son cœur…

« Dimitri… » hoqueta-t-elle dans un murmure.

Elle tendit son bras en avant, prête à le rejoindre. L’étrange garçon s’arrêta soudain de jouer et observa Ambre, lui souriant comme s’il l’avait attendu et qu’il était désormais heureux de sa présence. Elle avait la sensation qu’il ne lui était pas étranger. Un triste sourire naquit sur son visage baigné de larmes et au moment même où leurs doigts allaient s’entrelacer, une sourde détonation se fit entendre. Le souffle de l’enfant se coupa instantanément à ce cou feu qui avait retenti comme une déchirure. Et soudain, elle vit un voile passer dans le regard de Dimitri. Elle vit ses lèvres trembler, sa main se dérober à la sienne et ses muscles se tendre sous l’effet du choc. Son cœur s’arrêta de battre lorsqu’elle avisa une tâche de sang grossir sur la poitrine du violoniste et imbiber progressivement sa chemise à une vitesse effrayante.

« Non… » s’étrangla la petite fille, horrifiée.

Le garçon tomba bientôt à genoux et Ambre se jeta à terre pour le soutenir. Elle sentit la chaleur de son sang se déverser sur sa robe, les battements de son cœur qui se faisaient de plus en plus faibles. La respiration de Dimitri se fit sifflante, douloureuse. Non, il ne pouvait pas mourir ! Pas encore ! Ses doigts tremblaient alors qu’elle écartait les pans de sa chemise pour observer la blessure de l’enfant, la balle qui avait perforé sa poitrine. Un gémissement d’horreur s’échappa de ses lèvres, le sang coulant toujours de sa plaie béante.

« Pourquoi tu ne m’as pas sauvé Ambre ? » demanda tout à coup Dimitri, haletant.

La petite fille frémit à cette question, aux regards suppliants du garçon. Pourquoi ? Oui. Pourquoi avait-elle encore failli ?...

« Je… je n’ai pas pu… » hoqueta-t-elle. « J’aurai tellement voulu te sauver mais je suis trop faible… Je n’ai pas pu… Pardonne-moi… »

Les sanglots se pressaient douloureusement dans sa poitrine, l’empêchant presque de respirer. Son cœur était prêt à exploser, étreint par la souffrance. Elle porta ses mains ensanglantées au visage de l’enfant et l’implora de son regard empli de larmes.

« Je t’en supplie… Ne meurs pas… Ne me laisse pas encore. » gémit-elle. « Je t’en prie ! je t’en prie ! »

Et les larmes continuaient de perler sur ses joues tandis qu’elle sentait la vie quitter peu à peu le corps de Dimitri. Elle pressa alors ses lèvres contre les siennes, comme dans une tentative désespérée pour le ramener à la vie. Mais sa peau était déjà glacée, aussi froide que la mort. Elle éloigna son visage du sien et contempla avec horreur l’expression figée du violoniste. Les doigts de l’enfant se desserrèrent et le précieux instrument glissa, se fracassant sur le sol en une multitude de copeaux de bois comme s’il s’agissait d’un violon fait de verre.

« NON ! » hurla-t-elle au comble du désespoir, s’accrochant à son corps sans vie.

Dans un cri terrorisé, Ambre se redressa sur son lit, accueillie par les ténèbres. Le corps en sueur et la respiration haletante, elle tremblait comme une feuille. Elle éclata immédiatement en sanglot, sentant encore l’étreinte du corps froid de Dimitri contre le sien. Elle avait envie de crier, de hurler, de se débattre contre cette vision effrayante. Elle plaqua aussitôt ses mains contre sa bouche pour étouffer un gémissement mêlé d’horreur. De l’air ! Il lui fallait de l’air ! Elle étouffait !
Rejetant ses draps d’un geste maladroit et paniqué, elle s’emmêla tout d’abord dedans avant de parvenir à s’extirper de sa couche. Elle était toujours habillée ? Pourquoi ? S’était-elle assoupie durant la journée ? Elle ne le savait plus. Ses pensées étaient confuses, totalement brouillées. Elle ne savait plus ce qu’elle faisait, qui elle était, où elle était. Elle était juste animée par ce besoin urgent d’oxygène et toutes les images de sang, de mort qui envahissaient son être. En toute hâte, elle sortit de sa cabine et elle se mit à courir. Elle courait sans but, à perdre haleine, comme si le démon était à ses trousses. Elle avait besoin d’aide, elle avait besoin de quelqu’un pour calmer son esprit. Et soudain un nom se grava dans son esprit. Jack. Mais comment le trouver ? Dans son esprit, elle se mit à prier sa venue, ne pouvant s’empêcher de courir tout de même. Elle se heurtait aux murs, cherchait à tâtons une issue, reprenait sa course, jusqu’à ce que ses doigts rencontrent une poignée de porte. Persuadée que cela pouvait la mener aux ponts inférieurs, elle s’engouffra par l’ouverture entrebâillée.

« Jack ? » balbutia-t-elle.

Elle continua de s’enfoncer dans la salle, réalisant peu à peu qu’elle s’était certainement trompée de lieu. Quand soudain une voix résonna dans les ténèbres. Une voix de femme qui lui indiqua dans un murmure qu’elle se dirigeait vers un mur. Un murmure qui l’inquiéta. L’aveugle se figea instantanément, glacée par cette présence étrangère.

« Qui est là ? » s’effraya-t-elle en sondant l’obscurité. « Aidez-moi ! Je vous en prie ! »
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyVen 27 Sep - 21:41

Je fixais la jeune femme venant d'arriver dans la salle de musique. Je lui avais murmuré doucement qu'elle se trompait de destination. Elle était aveuglé, cela se voyait, la pièce était auréolée d'une lumière tamisée, il était possible de voir ou la salle de musique se fermait par ses murs. D'ailleurs, ce fut une grossière erreur de parler aussi doucement, la pauvre femme eut tellement peur que j'en éprouvais de la tristesse. Comme cela devait être dur de vivre ainsi, sans jamais voir la lumière, le soleil, le ciel. Seule l'obscurité la guettait et l'enveloppait. Et cela, maintenant, pour l'éternité. Oh seigneur, je ne pourrais vivre ainsi, c'était quelque chose qui me dépasserait, serait au dessus de mes forces. J'avais envie de l'aider mais je n'osais pas, j'avais bien trop peur de ce contact humain. Je ne voulais ressentir l'envie de tuer, ce serait alors m'attaquer à un être sans défense puisqu'elle ne pouvait me voir. Et puis, la jeune aveugle avait besoin de moi car elle se mît à crier de l'aider, elle ne savait plus ou se diriger.

Me relevant d'un bond agile, j'avais essuyé mes larmes et m'était levée du piano. Ensuite, je m'étais dirigée vers la jeune femme.
" Je suis là, je vais vous aider..." disais je tout en la prenant par les épaules et je la dirigeais vers le piano ou des chaises éparpillées par mes soins s'y trouvait. Je sentais ses épaules si frêles, elle n'avait que la peau sur les os. Sa maigreur était effarante, j'en étais surprise car sur le Titanic mangeait à sa faim alors j'avoue que je ne comprenais pas. Elle tremblait de tout son corps, était ce de la nervosité, de l'anxiété. Avait-elle une crise d'angoisse? Je me posais tant de questions et je ne savais que faire  après tout, je ne m'étais jamais occupée de quelqu'un. Je serais sûrement gauche dans ma manière de faire, mais tant pis, ce soir, elle n'avait que moi. Je la fis asseoir sur une chaise au dos rembourrée afin qu'elle soit confortablement assise. Et puis je pris une autre chaise que je me mis en face d'elle. Je pris alors ma coupe de champagne et la remplit à nouveau de la boisson alcoolisée et la porta à la bouche de la jeune femme. Je lui disais d'un ton ferme comme si je parlais à mon enfant:

" Buvez, ça calme parfois... " disais je tout en inclinant le verre de telle sorte que la jeune femme ne pût protester ou autre, le liquide coulant dans sa bouche. Je fis attention qu'elle ne s'étrangla pas mais dieu merci, elle but le contenu de mon verre. Je ne sais si cela l'avait calmée ou non. Mais bon, je n'étais pas infirmière. Et certainement si ça avait été le cas, je lui aurais fait boire autre chose que du champagne. A part la rendre ivre, je ne ferais de miracle.

Puis, je regardais son visage ravagé par une profonde tristesse, par des larmes figées, et par ces yeux si beaux mais ne pouvant plus voir. Et puis....
Il y avait de ces bleus... Ils étaient peut être anciens et en voir de guérison mais ils étaient là. Et une chose était sûre, je savais reconnaître si cela était à l'origine d'un coup ou d'un choc. Et vraisemblablement, quelqu'un la malmenait. Comment était ce possible? Elle était aveugle bon sang! Je voyais ces traces de coup et cela me ramenait irrémédiablement à ceux que je m'étais pris. De partout, j'avais été malmené et là, ou cela n'avait été le cas, je m'étais retrouvée trahie ou détestée. C'est pourquoi, je ne pus m'empêcher de ma main et du bout de mon doigt, j'effleurais sa joue marquée d'un bleu ancien tout en lui disant:

" Votre visage est marqué de bleus... " disais je tout en retirant ma main. Cela devait sans doute être un autre passager du bateau, les coups étaient encore récents. J'étais bien curieuse de savoir qui avait pu faire cela, il fallait sûrement avoir l'esprit bien noir pour oser faire une telle chose à une aveugle. Je ne pus m'empêcher d'ajouter, la voix empreinte de compassion : " Il faut être un monstre pour vous frapper ainsi... Mais... Qui vous a fait ça? " disais la mine interrogative.
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptySam 28 Sep - 19:59

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Loin du Froid de Décembre.



Ambre était totalement tétanisée, écrasée par cette terreur qui lui broyait les entrailles. Cette voix avait résonné dans la salle comme un murmure inquiétant et pourtant c’était dans un souci de lui venir en aide. Mais elle ne la connaissait pas. Avait-elle bien fait de lui demander de l’aide ? N’était-ce pas une fois de plus un piège du Titanic comme lors de cette nuit où il semblait qu’elle avait retrouvé Dimitri. Et si les retrouvailles avaient pu être émouvantes et joyeuses, rien de tout cela n’était arrivé. Les choses ne s’étaient pas déroulées comme l’aveugle en avait tant de fois rêvé au cours de l’année où elle l’avait cherché. Lorsqu’elle croyait encore qu’elle avait une chance de se retrouver à nouveau dans ses bras, sentir la chaleur de son corps, son parfum, et écouter le timbre rassurant de sa voix. Bien au contraire, rien n’aurait pu être pire. Encore maintenant, elle n’aurait su dire si l’homme qu’elle avait eu devant elle et qui se présentait pourtant comme étant Dimitri était réellement celui qu’il prétendait être. Ce paquebot était maudit et le climat inquiétant qui s’y était instauré s’aggravait chaque jour un peu plus. Le Titanic était là pour les punir et il accomplissait sa tâche avec une cruelle ingéniosité.
Réalité… mensonge ? Vérité ou bien piège ? Elle ne savait plus démêler le vrai du faux et elle se méfiait désormais de tout. Et puis Amy l’aidait. Elle l’incitait à prendre garde à ce monde qui l’entourait. Elle avait été à ses côtés pour lui venir en aide lorsque la situation avec le prétendu Dimitri s’était envenimée, au moment où les choses n’auraient pu être pires.
Attention Ambre…
L’aveugle entendait la voix d’Amy lui murmurer tout bas. Elle l’entendait comme un écho lointain tandis que l’esprit d’Ambre était habité par les atroces images de la mort de Dimitri. Du sang ! Tellement de sang… comme lorsqu’il avait été assommé ce jour-là dans le cabaret où elle avait été enlevée. Du sang ! Elle devait en avoir partout ! Cette inconnue ne devait surtout pas le voir. La chanteuse se mit alors à essayer ses mains sur sa robe aussi vite qu’elle ne pouvait tandis qu’elle entendait les pas de la femme arriver.
Ambre ! Ce n’était qu’un cauchemar !
Ses pleures redoublèrent, toujours plus horrifiée à chaque fois qu’elle se rendait compte de la folie qui l’envahissait progressivement. Tout son corps se mit à troubler de frayeur et d’épuisement. Quand tout à coup, l’inconnue l’avait prise par les épaules en lui chuchotant des paroles qui se voulaient rassurantes, répondant à son appel de détresse pourtant on sentait un malaise dans sa manière de faire. Ambre n’eut pas la force de protester et elle fut conduite jusqu’à une chaise confortable sur laquelle elle se laissa tomber. Puis la femme la fit boire et porta une coupe à ses lèvres. Elle fut premièrement surprise lorsqu’elle sentit les bulles du champagne pétiller dans sa bouche. Vu son état, elle ne risquait pas de la calmer mais plutôt de la rendre ivre. Et pourtant, elle s’astreint à boire, sentant le liquide alcoolisé réchauffer sa gorge et sa poitrine, si bien qu’elle but la coupe entière.
Ce n’est qu’à ce moment-là que l’inconnue retira le verre de ses lèvres. Ambre toussota, reprenant ainsi sa respiration. Une respiration qui lui était particulièrement difficile tant sa gorge était serrée d’émotion. Ses lèvres se remirent à frémir immédiatement et le silence qui lui faisait écho n’était brisé que par ses sanglots.
Quand soudain, elle sentit les doigts de la jeune femme effleurer son visage. Elle eut instinctivement un mouvement de recul et une grimace de douleur s’échoua sur ses traits. Sa main n’avait fait qu’à peine les toucher et pourtant, ses blessures la mettaient au supplice d’un simple frôlement. Elle se maudit d’être sortie de sa cabine, se rappelant les ordres d’Edward. Tant qu’elle portait toujours sur elle les marques de ses sévices, elle ne devait pas se montrer. Mais ce soir, emportée dans sa terreur, elle n’avait plus prêté garde à ses recommandations. Pitié qu’il ne la surprenne pas encore !
Tu n’as pas été suffisamment prudente Ambre…

« Je suis désolée… j’ai été si stupide… » murmura-t-elle pour elle-même ne faisant tout d’abord pas attention à ce que l’inconnue lui dit.

Puis la voix de la femme se fit empreinte de compassion et accrocha l’attention de l’aveugle. L’angoisse monta en elle lorsqu’elle lui demanda qui lui avait fait ça. Mais elle ne pouvait le dire. Elle ne pouvait dénoncer Edward.

« Je… je ne peux pas le dire… » bredouilla-t-elle. « Je l’avais mérité… j’ai désobéi… C’était de ma faute ! Tout est de ma faute ! » se mit-elle à gémir avec des inflexions de démence.
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyDim 6 Oct - 10:33

Je regardais fixement la jeune femme perplexe et interrogative. J'aurais très bien pu la laisser toute seule, la tuer ou même m'enfuir mais je n'avais pas peur en sa présence. Il était fort peu probable qu'elle puisse me faire du mal, à moins d'être une fausse aveugle. Mais j'en doutais, ou alors, peut être était-elle une bonne actrice. Je ne saurais le dire. Son visage était marqué de secret, de souffrances. Compatissante, je me réjouissais de n'avoir le malheur de ne pouvoir voir. Elle devait rater tant de choses, la beauté de l'instant se trouvait dans le paysage que l'on pouvait observer. Que lui restait-il en dehors de la vue? A vrai dire, quelque chose m'avait également marqué. Lorsqu'elle s'était dit stupide. C'est étrange mais je n'avais pas l'impression qu'elle s'adressait à moi. Mais plutôt à quelqu'un d'autre. Mais qui? Je regardais à droite, à gauche: il n'y avait personne. Pourtant, j'en étais persuadée. Peut être moi même perdait la boule. Peut être fallait-il que j'arrête le champagne également?

Et puis, je m'étais permise de lui demander l'origine de ses coups. Ces bleus étaient vraiment atroces à voir. Cela me brisait le cœur de savoir que l'on peut s'attaquer à des personnes comme elles. Cette violence me rappelait mon propre père qui, quand il eut perdu son travail, s'était attaqué à moi. Pour masquer son échec, sa honte d'avoir été licencié, ce de dernier s'en était pris à la petit fille que j'étais. Au final, le bourreau de cette jeune femme était comme mon père: un lâche. Il avait pourtant réussi à inscrire la peur dans l'âme de cette aveugle car cette dernière ne voulut me dire le nom de la personne. Comme si elle se protégeait ainsi de cette manière. Toutefois, elle ne pouvait se laisser abattre ainsi: il fallait qu'elle se ressaisisse et qu'elle affronte son bourreau. Mais comment pouvait elle faire sachant que la cécité était son plus grand obstacle.

Remplissant une coupe de champagne, je me permis de lui répondre : " Peu importe les raisons de cette violence, elle ne devrait avoir lieu, c'est ignoble... " Et puis
, elle renchérissais en s'écriant qu'elle ne pourrait révéler le nom de son bourreau. Un petit rire sans joie sortit de ma bouche tandis que je lui répondais à nouveau : " Vous avez raison de ne rien dire. Car des l'instant ou je l'aurais su son nom, je me serais déterminée à le faire souffrir et à le tuer.." disais je, mes lèvres s'étirant pour former un rictus.

Je me tus lui laissant le temps de lui comprendre mes paroles. Je lui révélais que tuer n'était quelque chose de pas anodin chez moi. Bien entendu, elle ne savait que je souffrais de cette pulsion meurtrière, elle ne savait que j'avais déjà tué un nombre incalculable de fois et pourtant on pouvait le deviner. Peut être ne se sentait elle plus en sécurité, je n'aurais su le dire. Car à ce moment là, je bus une coupe de champagne tout en continuant à fredonner ma chanson:

" D'une ancienne ritournelle... "

Et je regardais la jeune femme de haut en bas tout en continuant à chantonner "loin du froid de décembre"

" Connaissez vous cette chanson ? Elle a été écrite avant 1912 et pourtant je l'ai connu qu'après le naufrage... Quand une autre chanteuse l'a reprise... Elle est si belle, elle me rappelle mon passé.." disais je tout en fermant les yeux entendant la chanson résonner dans ma tête.
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyMar 15 Oct - 16:52

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Loin du Froid de Décembre.



Ambre ne parvenait à faire taire les tremblements qui agitaient son corps tout entier. Son esprit lui-même ne parvenait à s’apaiser en songeant encore au cauchemar qu’elle venait de faire. Elle sentait encore le corps chaude de Dimitri tout contre lui, l’étincelle de vie quitter ses yeux, le sang couler entre ses doigts qui agrippaient fermement la chemise du violoniste comme si cela pouvait le ramener à la vie. Et les larmes, brûlantes et douloureuses, ressurgirent à nouveau de ses yeux et envahirent ses joues bleuies de coups. Les paroles de Dimitri lui martelaient le cœur «  Pourquoi tu ne m’as pas sauvé Ambre ? ». Pourquoi pensait-il une chose ? Elle avait toujours cherché à le sauver par tous les moyens. Elle n’avait jamais eu à cœur que sa survie et son bonheur. Et aujourd’hui, elle avait vendu son âme au diable pour qu’il vive en paix. Ce soir-là, dans cette salle mystérieuse où le diable était apparu, l’aveugle avait connu une chance inespérée de protéger Dimitri. Elle lui offrait une existence meilleure, une éternité de paix en se sacrifiant et c’est ce qu’elle avait fait. Finalement, la sécurité du violoniste tenait à peu de choses. Tout ce qu’il fallait, c’était que Dimitri soit loin d’elle et d’Edward. Et la perte de mémoire du garçon avait permis l’accomplissement de son plan. A présent, elle était soulagée que l’homme qu’elle aimait soit en sécurité. Mais dieu qu’elle avait mal ! Une éternité sans lui ne lui semblait pas vivable. Pour l’instant, elle se confortait avec l’idée que son sacrifice ne serait pas vain. C’était ce qui la portait encore aujourd’hui.
Mais alors pourquoi un tel rêve ? Pourquoi Dimitri l’accusait-il de l’avoir laissé mourir alors qu’au contraire, elle venait très certainement de lui sauver la vie ? Tout cela allait la rendre folle ! Elle se prit la tête entre ses mains, comme si elle parviendrait à mieux résonner son esprit de cette manière.
Ce furent les paroles de la jeune femme avec qui elle se trouvait qui la ramenèrent à l’instant présent. Encore perdue dans les méandres de son rêve, elle n’était plus très certaine d’où elle se trouvait, avec qui et surtout de ce qu’elle disait. Les mots de l’inconnue la firent frémir et elle releva son regard sans éclat vers elle. Ses lèvres tremblèrent, sa respiration s’accéléra alors que sa gorge se serrait de sanglots.

« Non… » bredouilla-t-elle. « Plus de morts… il ne faut plus qu’il y ait de morts… Je ne veux plus que personne meure à cause de moi ! » se mit-elle à gémir en se tenant le cœur comme pour étouffer la souffrance qui le pétrissait. « Tout ce sang ! Il y a trop de sang ! J’ai du sang de partout ! »

La démence commençait progressivement à envahir ses mots. Pourtant, elle croyait en ce qu’elle disait. Elle sentait le sang de Dimitri sur ses mains, il poissait ses doigts, les rendait collant alors qu’il n’y avait pas la moindre trace de carmin sa peau. Mais elle répétait ses mots sans s’arrêter comme un cri de détresse. Dimitri était mort entre ses bras, une fois de plus, une fois de trop.
Les seuls mots qui parvinrent à la faire taire furent soudain les paroles d’une douce mélodie. Une mélodie qu’elle ne connaissait que trop car c’était la sienne. Combien de fois l’avait-elle chantée par le passé tant le public l’aimait. Néanmoins, ce n’était pas la plus célèbre mais cette jeune femme la connaissait et la fredonnait. Cela eut pour don de faire taire ses sanglots et de tarir un instant ses larmes.

« Connaissez-vous cette chanson ? Elle a été écrite avant 1912 et pourtant je l'ai connu qu'après le naufrage... Quand une autre chanteuse l'a reprise... Elle est si belle, elle me rappelle mon passé… »

Son passé… oui. De toutes les chansons qu’avait dû interpréter Ambre, celle-ci était celle qui lui rappelait Dimitri. A chaque fois qu’elle l’avait chantée, elle se revoyait avec le violoniste quand ils étaient enfants et qu’ils inventaient des jeux ensembles, de l’amitié et de l’amour qui les unissait tous les deux. Ils étaient inséparables, jusqu’à ce que…
C’était en sa mémoire que la chanteuse avait mainte et mainte fois interprétée cette ritournelle. Et si aujourd’hui, elle voulait faire son deuil du jeune homme, c’était certainement celle-ci qu’elle devrait aussi chanter. Elle débuta voix légèrement enrouée par les sanglots avant de retrouver sa voix de velours.

« Des images me reviennent, comme des souvenirs tendres, d'une ancienne ritournelle, autrefois en décembre. Je me souviens il me semble des jeux qu'on inventait ensemble. Je retrouve dans un sourire, la flamme des souvenirs ! Et en moi, un écho, comme une braise sous la cendre. Un murmure à mi-mots que mon cœur veut comprendre… »
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyMar 22 Oct - 13:36

Cette jeune femme était décidément bien étrange. Elle semblait être envahi de milliards d'émotions la rendant instable. Peut-être délirait-elle? Je ne saurais le dire mais entre le fait qu'elle s'imaginait avoir du sang sur les mains et que trop de gens étaient morts pour elle. Oui, une chose était certaine: elle avait un passé bien plus lourd que je ne l'imaginais. Et puis, quand je la voyais croire qu'elle était pleine de sang sur ses mains, son visage alors qu'il en était rien, je ne pouvais m'empêcher de me revoir des années en arrière.
Quand les crises de folies m'envahissaient, que les médicaments ne faisaient plus effet, je sentais les souvenirs douloureux affluaient et me faisait pousser des hurlements atroces à m'en éclater les cordes vocales. J'étais devenue une véritable adepte des médicaments que me faisait avaler l'asile. Cela avait pour effet de me mettre dans un état léthargique avant que leurs effets ne cessent et que la normalité de mon être resurgissent avec sa force et sa faiblesse. Dans ces cas la, je me souvenais d'avoir été attachée dans une pièce nue de décoration, éclairée par une toute petite lumière que le soleil me reflétait à travers un hublot minuscule. Mes bras étaient attachés à des chaînes de fer mais cela ne m'empêchait pas d'hurler tout en frappant ma tête contre le mur jusqu'à temps que les infirmiers viennent et me faisaient respirer du chloroforme. Je sentais alors mon esprit divaguer vers des rêves sans forme tandis qu'ils m'emmenaient dans ma chambre ou un médecin se chargerait de soigner ma tête ensanglantée. Cette jeune femme avait-elle déjà connu l'asile? Je secouais la tête tandis que je la laissais partir dans son délire et ce sang, qu'elle, seule, pouvait voir. Seuls ses sanglots perturbaient un silence pesant.

C'est alors que je m'étais mis à chantonner ma chanson favorite. Sa réaction me surprit: elle sembla rester interdite comme si elle ne s'était pas attendu à entendre cette mélodie. C'est pourquoi, je crus bon de lui expliquer pourquoi je la sortais soudainement. Oui, elle me rappelait mon passé car c'était ce en quoi les paroles nous faisait allusion. Après ma brève explication, je me remis à chanter reprenant depuis le début.

" Des images me reviennent... " et la voix de la jeune femme se mélangea à la mienne. Tout d'abord, elle fut tremblante, hésitante et puis ce fut un timbre de velours, aux tonalités graves qui vint perturber la quiétude de ce lieu.
Je la regardais, ébahie, tandis que les rouages se mettaient en place. L'auteur était mort sur ce bateau et je n'avais pu connaître son visage une fois arrivée en Amérique. Tout ce que je savais c'est que cette chanson avait été reprise et qu'elle avait connu un succès moins important que d'autres musiques car ce n'était pas chanté par l'auteur original. La chanson me bouleversa encore une fois mais cette fois ci, j'en fus encore plus émue et je sentis mes larmes rouler sur mes jours. Je la laissais chanter jusqu'à la fin. Et sa voix s'éteignit dans un murmure. Je laissais planer un silence avant d'ajouter:

" Mais... Vous... Vous êtes... " balbutiais-je, j'étais bien trop choquée pour arriver à tenir des propos raisonnés. Je m'essuyais les yeux et inspira avant d'ajouter : " C'est vous qui l'avez créée non? " disais-je tout en la regardant fixement.

Sa réponse qui s'ensuivit me fit réagir d'une manière auquel je ne m'étais pas attendue. Peut être était ce cette part d'enfant encore enfouie en moi? Car je poussais un hurlement de joie et me jetais au cou de la jeune femme aveugle. Je ne tenais pas compte du fait de la brusquer, ou que je pouvais lui faire du mal. Tout ce qui comptait était que je rencontrais pour la première fois de ma vie, celle qui avait créé ce chef d'œuvre, celle qui m'avait aidé, au travers de sa création, à surmonter les épreuves subies après le Titanic. Celle pour qui j'avais gardé la part des souvenirs importantes dans ma vie. Mais aussi vite que je l'eus enlacée, je la relâchais aussitôt comme si son contact était soudainement devenu brûlant. Je m'en voulais presque d'avoir cédé à mes pulsions qui, cette fois, étaient plus celles d'une enfant en manque d'amour qu'une meurtrière enragée et vindicative.

" Désolée... " disais-je en rougissant, honteuse de m'être laisser emportée de la sorte. Puis, j'ajoutais, ressentant le besoin de me justifier : " Votre chanson m'a tellement apporté de réconfort dans ma misérable vie... Que j'ai été bien heureuse de pouvoir voir enfin la véritable interprète de cette chanson. "

Je posais alors ma main sur la sienne et ajoutais tout en la regardant avec adoration et ajoutais : " Votre mélodie a toujours été une lumière là ou les ténèbres m'avaient engloutie. " puis je me mis à sourire, gênée et me dévoilais un peu plus : " "Loin du froid de décembre" m'a sauvé la vie... "
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyMar 29 Oct - 1:34

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Loin du Froid de Décembre.



Ambre ne parvenait à étouffer la tempête de terreur qui sévissait au creux de sa poitrine, dans son esprit, dans son âme. Tout s’emmêlait en elle, la soumettant à toutes les émotions qui étreignaient son cœur : la peur, la terreur, la tristesse, le désespoir, la culpabilité, l’horreur… Ce allait la rendre folle ! Ce paquebot était maudit ! Pourtant, elle avait cru si fort que cette seconde vie allait lui permettre de retrouver le bonheur. Edward l’avait tuée ce soir-là sur le paquebot et pour la jeune femme, c’était certainement la meilleure chose qu’il pouvait lui faire. Elle se retrouvait sur le Titanic, libre des entraves d’Edward, libre de vivre à sa guise, et libre d’aimer Dimitri. Il était mort avec elle. Il aurait dû être avec elle sur le bateau. Tout laissait croire à cette hypothèse.
Alors l’aveugle n’avait pas désespéré. Elle l’avait cherché. Après tout, le violoniste ne savait pas qu’Ambre était morte lors du naufrage. Il devait certainement la croire en vie, encore sous le joug d’Edward. Mais les jours s’étaient écoulés, les semaines, les mois sans la moindre trace du jeune homme. Le désespoir et la douleur avait un peu plus creusé sa folie, se croyant priver à jamais de bonheur par le destin. Pourquoi une telle punition ? Qu’avait-elle fait de mal pour que le malheur s’abatte sur elle au point que la démence commençait à prendre possession d’elle ? Se retrouver dans les bras de l’être aimé était-il donc une chose qu’elle ne connaîtrait jamais ?
Elle ne pensait subir pire torture que se voir privée de manière aussi cruelle de Dimitri, mais elle était bien loin de la vérité. Avec une ironie machiavélique, le paquebot maudit avait fait un sorte qu’Edward lui soit rendu à la place du violoniste. Et ainsi, tout espoir s’était écroulé avec le retour du démon. La liberté était un mot qu’elle ne connaissait plus. Seule la soumission comptait et l’asservissement. Elle ne devait même plus être Ambre, elle devait être Amy et oublier qui elle était réellement. A quoi bon ?
Et puis, elle avait retrouvé Dimitri, mais ce fut un bien triste présent. Le jeune homme avait perdu la mémoire et il ne se souvenait plus de rien. L’aveugle avait alors été soumise à un choix qui lui lacérait encore le cœur : soit elle lui racontait tout et elle mettait son existence en danger, soit, pour la première de toute sa vie, la chanteuse tentait de le sauver des griffes d’Edward. C’était le pire sacrifice qu’elle n’avait jamais dû faire : renoncer à l’être aimé. Mais elle avait au moins le sentiment de l’avoir protégé de cette manière. Et puis, c’était Amy qui l’avait incitée à prendre cette décision.
Malheureusement, pas un jour ne s’écoulait sans que l’absence du violoniste et la présence tyrannique du manager ne la meurtrisse. Et voilà qu’elle se retrouvait délirante au beau milieu de la nuit dans la salle de musique, aux mains avec une jeune femme qui tentait de la calmer. Mais c’était bien peine perdue. L’aveugle gémissait, sanglotait, pleurait tant son esprit était déséquilibré par le cauchemar qu’elle avait fait. Tout ce sang ! Trop de sang dont elle voulait se laver ! Pourquoi avait-elle cette sensation insupportable d’avoir condamné Dimitri plutôt que de l’avoir sauvé ce soir-là dans la salle des désirs ? Si elle l’avait réellement conduit à sa perte, elle savait qu’elle pourrait en mourir.
Néanmoins, la jeune femme était parvenue à la faire émerger de sa folie un instant en se mettant à chanter une mélodie qu’Ambre ne connaissait que trop bien puisque c’était elle qui l’avait créée. Ces paroles, elle les avait écrites en l’honneur de Dimitri, en mémoire à tous ces moments passés avec lui qui avaient fait d’elle l’enfant la plus heureuse de l’univers. Il avait été son soleil dans la nuit de son existence.
Encouragée par l’effet que cette chanson avait eu sur l’aveugle, l’inconnue poursuivit en lui demandant si elle connaissait cette musique. Pour toute réponse, la chanteuse se mit à entonner la petite comptine. La femme la laissa poursuivre jusqu’à la fin avant de se mettre à parler d’une voix balbutiante, n’osant visiblement croire que la « Grande Amy » se trouvait devant elle.

« Oui… » murmura faiblement l’aveugle. « Je suis la chanteuse Amy. »

Ambre avait connu toutes sortes d’admirateurs au cours de sa carrière, mais elle dut bien avouer que la réaction de l’inconnue était bien la première qui lui fut donnée de voir. La femme poussa un cri de joie qui fit sursauter l’aveugle avant qu’elle ne sente deux bras encercler son cou et s’y pendre. Ce comportement eut pour effet de jeter la chanteuse encore plus dans le trouble. Ce contact soudain la mettait presque mal à l’aise et elle sentit bientôt devenir tremblante. Et tout à coup, elle la relâcha aussi brusquement qu’elle l’avait agrippée.
Elle s’excusa et commença à se justifier. Son discours toucha l’aveugle au plus profond de son être.
Elle, la personne la plus meurtrie était parvenue à faire retrouver un rayon d’espoir et de lumière dans le cœur des autres. Elle avait apporté du réconfort aux autres et elle dut avouer que cette sensation était tout à fait inédite pour elle. Certes, de nombreuses personnes avaient déjà eu ce discours, la félicitant pour ses performances qui savaient émouvoir les spectateurs jusqu’au plus profond de leurs êtres. Mais ce soir, la salle de musique, les louanges de l’inconnue brillaient de sincérité, d’une pureté presque enfantine. Les larmes roulèrent sur les joues d’Ambre. Sentant la main de la femme dans la sienne, elle la serra un peu plus fort.

« J’en suis heureuse… » pleura-t-elle, balbutiant. « A vrai dire, cette chanson était dédiée à quelqu’un… à une personne que j’aimais plus que tout... Je croyais qu’il était mort ! Et je l'ai encore perdu ! » gémit-elle, sa voix s’effondrant dans un sanglot douloureux. « Pardonnez-moi. Je ne voulais pas vous dire ça.. »
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyJeu 31 Oct - 23:24

Je crois bien que j'étais émue comme jamais. Cela ne m'était pas arrivée depuis si longtemps, d'ailleurs, quand était-ce arrivé? Mes souvenirs étaient mon bien le plus précieux, je gardais en mémoire tout ce que j'avais vécu, je n'oubliais pas, jamais et pourtant, je ne me souvenais d'un tel sentiment. Peut être avec Marie dans le couvent? Mais je ne m'en souvenais plus, je gardais seulement en mémoire sa honteuse trahison m'ayant valu un aller sans retour à l'asile. Toutefois, si Marie avait su m'émouvoir, ce n'était pas le même chose que ce que je ressentais en cet instant avec Amy. Oui c'était son nom, non? Je me souvenais avoir cherché sans trouver de grandes réponses. J'avais vu ce nom d'artiste mais je l'avais balayé d'un revers: une chanteuse aveugle, quelle blague! Sauf que je me trompais. Et que cette chanteuse non voyante était bien celle dont la chanson m'avait bercée, m'avait aidée à avancer dans ma vie désastreusement chaotique.
J'avais sans doute un peu trop manifesté ma joie de la rencontrer: enfin, ce n'était pas tous les jours que l'on rencontrait une personne que l'on avait adoré par le biais d'une chanson. C'était naturellement que je m'étais alors jetée dans ses bras la serrant à lui en broyer les os telle une enfant ne prenant pas conscience de sa force. Je l'avais relâchée aussitôt consciente de mon attitude déplacée: voilà un des points qui me faisait ressentir rejetée de la société : personne ne pouvait comprendre mes réactions: elles étaient toujours démesurées surtout quand ma passion ou ma colère prenait le dessus. Pourtant, en dehors de ces principales émotions, j'étais toujours froide, calculatrice, machiavélique bref une véritable actrice maître de mes émotions. Peu de gens arrivaient à casser cette barrière et pourtant cette jeune chanteuse venait d'y arriver: elle avait rompu cette carapace que je m'étais forgée. Seules quelques personnes avaient su la briser et je songeais notamment à Marie, à James et maintenant, Amy. Face à mon attitude quelque peu déroutante, j'avais émis le besoin de me justifier afin qu'elle comprenne ma réaction soudaine, ce besoin d'étreindre un songe devenu une réalité. Je m'étais renfermée comme une huître, rougissais comme une écolière ayant commis une faute: celle d'aduler une personne, de la mettre sur un piédestal. Et alors que je relevais la tête après lui avoir avouer que "Loin du froid de décembre" m'avait sauvé la vie et que je venais de poser ma main sur la sienne, je fus surprise de voir son visage baigné de larmes. " Mais pourquoi, pleurez vous...? " Disais-je perplexe et soucieuse d'avoir pu lui causer du chagrin. Mon dos se glaça quand je songeais que j'aurais très pu lui faire mal en la broyant comme je venais de le faire. " Vous ai-je fait mal? " Ajoutais-je sentant une panique soudaine m'envahir.

Mais il en fut rien de ce que je m'imaginais.

Bien au contraire, sa main se serra sur la mienne et de sa voix de velours, elle me répondit qu'elle était heureuse, sans doute de savoir l'effet qu'avait pu prodiguer sa chanson? Avait-elle souvent eu des personnes l'ayant remercié comme moi? Voilà une question que je mourrais bien d'envie de lui poser. Mais je n'en eus le loisir car elle me raconta d'ou provenait cette chanson. Elle avait été écrite pour une personne qu'elle aimait: elle l'avait cru mort mais il en était autrement, elle l'avait perdu. De cette manière et avec le peu de jugeotte que je possédais là dessus, j'en déduisais qu'il s'agissait d'un homme. Il n'y avait que ces vils créatures capables de nous créer les pires maux de la terre. Et j'en sentis immédiatement les prémices d'une colère nouvelle. Je ne mis pourtant pas longtemps à comprendre que je ressentais surtout de la pitié pour cette jeune femme. En plus d'être aveugle, voilà qu'elle semblait souffrir de l'amour d'un homme: j'en étais certaine. C'est pourquoi, je m'insurgeais soudainement:

" Allons, allons! Il ne faut pas se mettre dans un état pareil pour un homme! " Puis, je pris un ton rassurant en ajoutant: " Les hommes sur cette Terre ne sont voués qu'à nous faire souffrir, à nous rejeter et même pire... à nous éliminer ... ' disais-je d'une voix sombre.
" Et croyez moi, je suis bien placée pour savoir de quoi je parle... "
Je pris une serviette et entreprit de lui essuyer ses larmes en espérant qu'elle puisse cesser ses pleurs. Cela me faisait de la peine de la voir dans cet état pareil.

Ce fut à ce moment là que tout dérapa.
Oui, ce fut à ce moment qu'"Elle" se manifesta ayant été silencieuse durant toute notre entrevue:
" Qu'est ce que tu t'emmerdes à éponger sa morve. Laisse là se débrouiller! " avait-elle aboyé d'une voix furieuse dans ma tête, avant de prendre ce ton doucereux empreint d'envie: " Regarde bien Livia! Elle est si fragile, si frêle. Nous pourrions casser son cou si facilement, le lui tordre..."
Je retirais ma serviette de ce visage commençant à réaliser que mes mains tremblaient d'excitation, d'envie. Ce besoin qu'"Elle" ressentait s'insufflait dans mes veines. C'est là qu'elle explosa de rire en ajoutant d'une voix moqueuse:
"Nous pourrons la tuer sans se soucier de quoi que ce soit. Elle ne pourra jamais nous retrouver, elle est condamnée au noir éternel."
Ses propos abjects me firent monter les larmes aux yeux. Tuer Amy? Tuer celle qui m'avait chantée l'hymne de ma vie sans le savoir? Tuer une pauvre aveugle malade d'amour et dépressive?
Sans m'en rendre compte, je m'étais levée et avait reculé de quelques pas, me prenant la tête dans les mains, ne tenant pas compte de la chaise tombée par ma soudaine levée et de ce verre de champagne, tombé,  se brisant sur la moquette. Je ne pouvais que murmurer : " Non... Je ne peux pas... " Mais elle riait toujours et son rire me transperçait les tympans. Je me griffais les tempes comme si j'espérais qu'elle cela suffirait à la faire taire. Mais bien au contraire, la situation semblait l'amuser plus que jamais. Elle reprit la parole: " Tue-la, je sais bien que tu en meures d'envie! Entends son coeur de faible battre! Tue-la!!! "

" NON, JE NE PEUX PAS! " hurlais-je sentant les larmes rouler le long de mes joues. Je ne pus que reculer encore plus, me couvrant mon visage de main. Je reculais encore et encore, ne me souciant pas des instruments de musique renversés, jusqu'à ce que mon corps heurta le mur violemment et que je ne pus que m'effondrer par terre. Je mis à pleurer à chaudes larmes tandis que je murmurais: " S'il te plait... Pas elle..." avais je dit d'une voix bredouillante tandis que pour seule réponse, "Elle" me répondit: " Tue-la. "
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyMar 5 Nov - 18:48

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Loin du Froid de Décembre.



Ambre était totalement anéantie et inconsolable. Depuis plus d’un an, sa vie, déjà dénuée de sens, était devenue un vrai cauchemar. Tout avait basculé quand Swan était mort, assassiné par son propre frère. La folie d’Edward s’était affirmée et sa possessivité s’était accrue. A ses yeux, Amy lui appartenait et il ne laisserait personne ne lui enlever. Elle était son jouet qu’il n’était pas prêt de lâcher. La mort s’était posée une fois de plus dans l’existence de la jeune aveugle et elle devait même avouer que la perte de l’un de ses bourreaux l’avait énormément affectée. Etait-ce parce qu’il avait cherché à l’aider vers la fin ? Parce qu’il regrettait ce qu’il avait fait ? Pourtant, c’était ses mains qui étaient couvertes du sang de Dimitri, c’était lui qui avait fracassé le crâne du violoniste.
Puis le soleil avait semblé voir poindre à nouveau dans son existence. Elle se souviendrait toujours de la caresse des rayons sur sa peau, du vent iodé jouant avec ses boucles rousses, des vagues s’échouant sur les contreforts du Titanic, de l’odeur du sel et de l’océan… et soudain… un parfum, subtil… fruité… si familier… Et un prénom. Ambre. Au cours des années, la chanteuse avait bien failli l’oublier, revêtant l’identité d’Amy avec une telle perfection qu’elle en avait oublié qui elle était réellement. Ce prénom s’était imposé à elle, comme renaissant de ses cendres. Tout lui était alors revenu en mémoire : la France, la vie dans les rues, un violon et un garçon… Dimitri. Tous ces moments heureux qu’elle avait vécu avec lui. Ils étaient dans la misère, souvent ils ne mangeaient pas à leur faim, ils n’avaient de toi au-dessus de leur tête, mais rien ne pouvait entacher leur volonté et leur joie car ils étaient ensembles et c’était tout ce qui comptait. Il n’y avait que ça qui les maintenait et qui leur faisait croire en demain : cette promesse qu’ils s’étaient faite de ne jamais se quitter. A jamais, ils étaient destinés à ne faire qu’un être.
Oui, cette promesse lui était revenue sur ce pont quand son prénom d’autrefois avait été prononcé comme par un fantôme…. Car elle reconnaissait cette voix, cette manière de s’exprimer, cette respiration impétueuse, le parfum qui se dégageait de cette personne. Dimitri ressuscitait, et avec lui, la personnalité d’Ambre. Le jour s’était levé et désormais, elle voulait croire en eux. Elle s’était blottie dans ses bras, cherchant la chaleur de son corps, les battements de son cœur, son souffle sur sa peau, le timbre rassurant de sa voix.
Tant d’espoir balayé par le naufrage. Le piège d’Edward, la mort de Dimitri, l’enfermement et finalement, son réveil, dans un monde entre la vie et la mort. Sa quête sans fin, le retour de son manager, pétris de vengeance, la solitude, la douleur, la désillusion et la maltraitance. Et soudain, le paquebot maudit le lui avait rendu. Mais la cruauté avait voulu qu’elle doive le repousser pour mieux le sauver. Son cœur s’était déchiré et sa raison n’avait pu le supporter, soumise à la volonté d’Amy avec qui elle était constamment en conflit. Toute cette situation l’épuisait et cette vulnérabilité la forçait à montrer ses faiblesses en public. Et puis tout ce sang… tout ce sang qui recouvrait ses mains… le sang de Dimitri.
Les joues de l’aveugle étaient striées de larmes, incapable de s’arrêter. Les sanglots lui étranglaient tant la gorge qu’elle ne parvint même pas à répliquer lorsque la femme qui se trouvait avec elle lui dit résolument qu’elle ne devait pas se mettre dans un état pareil pour un homme. Elle condamna les hommes à des monstres sans pitié, destinés à faire souffrir les femmes, et même les tuer. Certes, la jeune femme semblait savoir de quoi elle parlait, mais elle était bien loin de la vérité concernant Dimitri.

« Non. Vous vous trompez… » hoqueta-t-elle. « Lui était différent ! Il n’est pas comme les autres hommes. Depuis le jour où je l’ai rencontré, il n’a jamais cherché qu’à me sauver. Il m’a toujours protégée contre tous ceux qui voulaient me faire du mal… et c’est à cause de moi qu’il est mort… parce que c’est un homme bon ! »

Ambre ne pouvait se résoudre à ce que l’image de l’homme aimé ne soit ainsi dégradée. Jamais Dimitri ne l’avait faite souffrir, jamais il n’avait eu un seul doigt doté de mauvaises intentions sur elle. Chacun de ces gestes étaient seulement motivés par la tendresse, la protection et la volonté de la rendre heureuse. Au cours des années, elle avait fini par comprendre que son seul but était d’obtenir un avenir meilleur pour Ambre et pour cela, elle lui en serait à jamais redevable.
L’aveugle eut un mouvement de recul, prise par surprise quand une serviette rentra en contact avec sa peau pour essuyer les larmes de son visage. Elle grimaça, les ecchymoses sur ses joues la faisant souffrir, pourtant, elle n’essaya pas de retirer la main de la femme tant elle était touchée par cette empathie soudaine.
Puis la tendresse se transforma tout à coup en une tension qui fit froncer les sourcils de la chanteuse. La douceur s’échappait des gestes de l’inconnue pour être remplacer par quelque chose qui semblait même effrayer la femme. Elle retira promptement sa main du visage de l’aveugle.
Elle l’entendit soudainement se lever, renversant brusquement sa chaise. Le son fracassant de la coupe de champagne se brisant en mille morceaux au sol la fit sursauter. Les pas s’éloignèrent, comme si la présence d’Ambre la rendait malade, provoquait son malaise. Elle entendait des murmures dont elle ne comprenait pas le sens.
Puis la brusque démence de l’inconnue effraya l’aveugle qui se releva de sa chaise, elle voulut reculer mais elle s’embroncha dans ses jupons et tomba à terre, évitant de peu les débris de verre tranchants. Les hurlements de la femme lui tordaient les entrailles, suscitaient une vive terreur chez elle. Les instruments de musique se renversaient, provoquant un vacarme sans précédent, puis elle entendit un impact, suivi d’une chute. Elle comprit qu’elle venait de finir sa course contre le mur et qu’elle s’était laissée choir.
Ambre, enfuis-toi ! Elle est folle. Tu cours à ta perte ! l’alerta Amy, mais ses paroles ne heurtèrent nullement la chanteuse.
Le silence s’installa tout à coup, seulement entrecoupé par les sanglots de l’inconnue. Sa respiration s’était accélérée, sa gorge était sèche. Elle était totalement interdite. L’attitude de la jeune femme avait changé d’un seul coup, sans qu’elle ne comprenne véritablement pourquoi, comme si elle était habitée par une autre personne. Elle avait d’ailleurs cette étrange sensation de se revoir lorsqu’elle luttait contre la personnalité envahissante d’Amy.
Ambre se mit soudain à quatre pattes, se trainant à l’aveugle jusqu’à l’inconnue, se repérant aux pleures qui s’échappaient de sa gorge. Finalement, elle arriva près d’elle et se rassit à même le parquet de la salle de musique. Elle déglutit difficilement avant qu’elle ne tende une main tremblante et hésitante vers la jeune femme. Elle commença par lui caresser doucement les cheveux, avant d’essuyer doucement ses larmes. Elle se mit à fredonner faiblement jusqu’à ce que la mélodie se fasse entendre et qu’elle se mette à chanter d’une voix tendre, l’enrobant comme dans du velours.

« Ne pleure pas mon bébé… Sois sage, ne pleure pas…
Dors, bercé par le fleuve sacré...
Dors mais n'oublie pas, mon dernier chant d'amour...
Je serai dans ton coeur pour toujours...
Fleuve... Oh fleuve... emporte pour moi ce chargement si précieux...
Là où il ira, il vivra heureux...
Fleuve, conduis-le là-bas...
»


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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyMar 19 Nov - 16:45

J'avais reculé autant que je le pouvais, balayant sur mon passage les instruments de musique se trouvant dans la salle. Cela produisait un vacarme assourdissant que seule la pièce entendait, le lieu étant insonorisé probablement. Sinon, il y avait fort à parier que tout habitant du bateau allait être réveillé par le chant d'Ambre ou par ma bousculade contre les divers violons, contrebasse, harpe etc... Mais qu'importe, je m'en moquais songeant qu'il valait mieux que personne ne vienne alors que je luttais contre mes démons intérieurs. Contre cette envie qui me tenaillait, tel un fer chauffé à blanc emprisonnant ma cervelle dans une spirale de noirceur. J'avais tellement envie de laisser libre court à mon besoin mais je ne voulais que cette victime soit cette aveugle. Non, pas elle... Elle venait de me chanter ma chanson, j'avais eu droit à un des plus beaux moments de ma vie: j'avais tant rêvé qu'un jour quelqu'un puisse la chanter rien que pour moi, Livia, la folie incarnée dans la mort d'autrui et un brin psychopathe. Et voilà qu'"Elle" me sommait de la tuer, elle en avait envie et tôt ou tard, le besoin l'emporterait face à l'empathie.
Je m'étais effondrée par terre, à genoux le bas du dos contre le mur, je me tenais la tête dans mes mains comme si je cherchais à faire taire "Sa" voix. Mais je ne pouvais rien contre "Elle", trop forte, on ne pouvait ne pas l'entendre même en se bouchant les oreilles. "Elle" était dans ma tête, "Elle" était en moi. J'étais "Elle". Froide vérité que d'admettre que je n'allais pas bien. Que pouvais je faire pour m'en sortir à part sombrer dans de nouveaux délires morbides? N'y avait-il aucun échappatoire? Serrant mes mains autour de mon crâne, je remarquais à peine que mes ongles s'enfonçaient, me blessant. Déjà meurtrie moralement, voilà que ma chair souffrait maintenant. Je ne pouvais que sangloter, laissant libre cours à mon désarroi. Me laissant aller à cette peine immense, je m'asseyais presque résignée tandis que je murmurais : " Pourquoi Elle? "
Je ne l'entendais plus, elle avait certainement du prendre la fuite face à ce brusque accès de folie, à vrai dire, je n'avais plus fait attention à sa présence tellement je ne voulais pas qu'Ambre puisse être ma prochaine victime. Je sentis l'odeur du sang coulant le long de mon crâne, je serrais si fort que mes ongles s'enfonçaient dans ma peau. La douleur me permettait de ne pas sombrer dans mon envie de meurtre, avoir mal me maintenait à la raison. Et je pleurais encore sans pouvoir m'arrêter, je crois bien que cette chanson me bouleversait trop, me rendait vulnérable. En plus, chantée par sa créatrice, il en avait fallu peu pour que mes émotions prennent le dessus, il fallait que je cesse de pleurer et que je puisse m'enfuir d'ici.

C'est là que je sentis cette main me caresser la tête. J'eus un imperceptible mouvement de recul atténué par un sursaut de peur. J'ouvris les yeux et constatait qu'il s'agissait de la jeune femme. Dans ma bataille spirituelle, je n'avais pas entendu la chanteuse à la voix de velours venir à moi en rampant. Elle se mît à me réconforter, à m'essuyer les larmes exactement comme j'avais pu la rassurer il y a encore peu. La situation semblait s'inverser. Et puis, chose inconnue, elle se mît à chanter une berceuse comme pour endormir un enfant. Ses paroles étaient tout simplement magnifiques et bouleversantes de sincérité. Elle me rappelait ma chère maman disparue et ses nombreuses comptines entendues quand j'étais enfant. Je ne les avais jamais oublié, comment le pourrais je? Cela voudrait dire oublier ma mère, celle qui m'avait donné la vie? Non c'était impossible. Je l'aimerais à jamais. C'est fou comme sa berceuse pouvait me faire plonger dans les souvenirs, un peu comme avec "loin du froid de décembre". Mes mains se décrispèrent de ma tête et je me sentis soudain plus sereine, apaisée. Mes larmes coulaient encore mais je sentais que l'envie de tuer était partie. Je laissais tomber mes mains devant moi remarquant mes ongles rougis de mon propre sang. Je ne m'étais pas loupée..

Voilà bien quelque chose que l'asile aurait dû apprendre: les fous, on les soignait avec de la douceur, de l'empathie et non de la violence et des cachetons. Voilà ce que n'avait jamais compris la fondation à mon sujet et Ambre, en une chanson avait su faire balayer mon envie morbide. Elle avait effacer les sentiments mauvais pour ne garder que le meilleur.  Maintenant, elle m'avait vu perdre la tête: que pouvais je y répondre? Il était hors de question de me confier: je l'avais fait une fois et ça m'avait valu dix ans d'asile psychiatrique. Je regardais la jeune femme et me mît à murmurer cherchant mes mots:

" Pardonnez moi ce... Débordement ... " Je baissais les yeux, confuse telle une enfant ayant peur d'avoir fait une bêtise. " Le manque de sommeil m'a fait perdre la tête. "
Je relevais la tête et la regardait lui faisant un sourire qu'elle ne pouvait voir: certes il manquait de joie mais il était sincère et je savais que le sourire résonnait dans nos voix : " En tout cas... merci.... "
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyLun 2 Déc - 0:42

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Loin du Froid de Décembre.



Si Ambre s’était trouvée être dans son état normal, sans doute aurait-elle fui sans demander son reste devant la démence de l’inconnue. Mais ce soir, ce n’était pas le cas. Elle avait tout de même été saisie de peur face à ce renversement d’attitude inattendue. Les paroles étaient confuses et effrayantes. Parlait-elle réellement de la tuer ? Qu’avait-elle fait pour mériter la mort ? Etait-ce encore l’âme noire du Titanic qui prenait possession d’un pauvre passager pour accomplir son terrible office ?
Mais une impression étrange habita l’aveugle en entendant les paroles incongrues de la femme. C’était comme si elle s’adressait quelqu’un en particulier, comme s’il y avait une personne qui lui dictait des ordres. Ambre avait beau tirer l’oreille, tout ce qu’elle entendait, c’était le fracas des instruments et les gémissements terrifiés de l’inconnue. Sa détresse lui fit de la peine et la toucha profondément. Elle avait presque la sensation de se revoir quand elle était aux prises de ses cauchemars et de la voix diabolique d’Amy.
Elle s’était alors approchée, bien malgré les protestations d’Amy, qui au-delà de la protecteur d’Ambre, voyait son propre intérêt. Elle n’avait aucune envie d’être mêlée à cette histoire et certainement pas proche d’une femme qui menaçait de la tuer. Mais pour la première fois, l’aveugle avait fait fi de la petite voix qui susurrait au creux de son oreille pour suivre son instinct.
Ambre n’avait jamais eu le panache des grandes héroïnes de roman et n’avait fait preuve d’un grand courage, cette nuit, elle se sentait le devoir de lui venir en aide. Elle ne pourrait retourner se cloîtrer dans sa cabine et se cacher sous ses draps sans ressentir une pointe de culpabilité si elle la laissait dans cette transe démente. Elle ne savait pas très bien comment appréhender le problème et calmer l’inconnue en pleine crise. Fort heureusement pour elle, elle avait le pouvoir de sa voix de son côté.
L’aveugle n’avait jamais pu définir si sa voix exceptionnelle était un don ou fléau. Si elle n’avait pas eu ce don, son père n’aurait jamais vu aucun intérêt à la garder auprès de lui et il l’aurait laissée mourir de froid ou de faim pendant l’hiver. Sans sa voix, elle n’aurait jamais pu rencontrer Dimitri, il ne l’aurait jamais aimée comme il l’aimait aujourd’hui malgré sa perte de mémoire, elle n’aurait jamais pu vivre les moments les plus heureux de sa vie. Mais sans sa voix, Edward et Swan Darcy n’y auraient jamais vu un quelconque profit, ils auraient passé leur chemin, elle n’aurait jamais été aveugle, loin de Dimitri et condamnée à être l’esclave de deux hommes trop ambitieux. Ainsi, sa voix lui avait permis de survivre mais elle avait aussi causé sa perte.
Alors de pouvoir utiliser sa voix pour apaiser une âme, cela avait quelque chose de réconfortant, comme si elle se réconcilier avec son don. Sacha lui avait déjà demandé de chanter pour elle afin de l’aider à aller mieux, mais elle chantait pour l’inconnue, elle savait que l’effet ne serait pas le même. Du moins, elle l’espérait. Elle voulait vraiment l’aider à surmonter cette épreuve. Les paroles s’étaient alors échappées de ses lèvres. Douces, voluptueuses, elles étaient pareilles à une berceuse que l’on chantait pour les enfants. Et justement, c’était ce qu’elle lui chantait. Une berceuse. Ambre n’avait jamais été amenée à l’interpréter sur scène et elle doutait que l’inconnue puisse connaître cette chanson de son répertoire. L’aveugle se souvenait simplement que c’était une comptine que les femmes de joie de Paris lui avaient apprise quand elle était enfant. Elle n’avait pourtant que quatre ans, mais elle s’en souviendrait toute sa vie. Elle l’avait chantée trop de fois pour l’oublier. C’était d’ailleurs cette berceuse qu’elle s’était chantée à elle-même lorsque ce fou furieux l’avait enlevée. A ce moment-là, elle ne savait pas qu’il s’agissait ni plus, ni moins de son père.
A mesure que les notes filaient, la chanteuse sentait la femme se détendre et s’apaiser. Elle continua néanmoins de chanter, ne souhaitant pas interrompre trop tôt la magie que le chant avait sur son esprit.
Lorsqu’elle acheva la comptine, le silence s’installa et s’étira, long… Ambre ne savait plus comment réagir, ni que dire. Il lui sembla que c’était à l’inconnue de se manifester en premier bien qu’elle ne soit pas très au fait de l’attitude à adopter dorénavant. La femme finit par balayer ses interrogations muettes en prenant la parole. Pétrie de gêne, elle s’excusa et accusa le manque de sommeil. Puis ce fut en des mots frémissants de reconnaissance qu’elle la remercia.
L’aveugle eut un petit sourire tendre et discret qui répondit à sa place. Elle ne savait pas vraiment pas répondre. Une question lui brûlait les lèvres, mais elle avait bien trop peur d’être prise pour une folle. Puis elle se décida en jugeant que si elle devait passer pour une folle, eh bien elles seraient deux à l’être dans cette salle. Sa voix s’éleva tel un murmure, pas plus haut que le frémissement du vent un mois d’été.

« Vous entendez une voix n’est-ce pas ? Dans votre tête… elle vous parle et elle vous oblige à faire des choses que vous ne voulez pas… mais jamais vous ne pouvez pas lui désobéir parce qu’elle vous fait peur… elle vous contrôle… » chuchota-t-elle, frémissant de ses propres paroles. « C’est elle qui vous demandiez de me tuer. Ai-je raison ? »
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyDim 15 Déc - 20:37

Mes yeux me brûlaient par le flot de larmes discontinu coulant le long de mes joues. J’étais épuisée ce soir là, sans doute le manque de sommeil. Sans doute parce que je préférais ouvrir les yeux la nuit et dormir le jour afin d’éviter tout contact avec les passagers. Je me savais dangereuse, je savais que tôt ou tard ce besoin de tuer allait encore se faire ressentir. Je ne pouvais indéfiniment laisser libre cours à mes démons : je finirais pas me faire attraper et « Elle » serait alors révélée au grand jour. Non, je devais la protéger parce qu’ « Elle » avait toujours été là pour moi, parce qu’ « Elle » était la seule à réellement compter et veiller sur moi. Toutefois, ce soir là, je m’étais opposée contre « Elle ». Ce soir là, je m’étais battue contre ce « Moi » qui m’annihilait complètement l’esprit. Je ne voulais tuer Amy, cette chanteuse à la voix de velours : elle était si gentille, malgré mon soudain accès de folie, elle était venue près de moi, m’avait chanté une berceuse cherchant à me réconforter. Sa douce voix avait suffi à faire sécher mes pleurs, à m’apaiser. Malheureusement, je m’étais dévoilée bien plus que je ne l’imaginais : me justifier. Oui, voilà l’option qu’il me restait, aussi, lui avais je invoqué le manque de sommeil pour expliquer ma perte de calme. Personne ne pouvait comprendre ce qu’il se passait dans ma tête. Et quiconque était au courant allait forcément choisir de m’envoyer dans un asile : or, je ne voulais plus jamais revivre cela. Je ne voulais plus que quiconque ait pitié de moi. La réponse de Ambre me dérouta, à vrai dire, je ne m'y attendais pas du tout. Mes entrailles se tordirent, je frissonnais tandis qu'elle me posait cette question, qu'elle laissait supposer savoir ma vie et le fait que je l'entende me parler dans ma tête. Je sentis un frisson glacé parcourir mon échine également. Non, comment avait-elle deviné? Je ne pensais pas m'être autant dévoilée. Toutefois, elle devait rester ignorante, elle devait rester loin de moi. Je ne voulais pas qu'elle puisse savoir quelque chose de moi. Mes lèvres s'ouvrirent, silencieuses, jusqu'à ce que ma voix se fit entendre, répondant ainsi à Ambre:

" Non... Non.. Vous vous trompez.. " J'eus un mouvement de recul, m'éloignant d'elle en rampant tandis que je secouais la tête en signe de dénégation. Je fixais le regard vide de l'aveugle: elle se trompait. Elle faisait erreur. " Vous vous trompez !!! " M'exclamais-je tout en me redressant et me relevant. Je sentais la colère m'envahir soudain. Je crois bien que la peur me dominait: après tout, si sa langue se déliait, je courais le risque d'être mise à découverte. Indiscutablement, cela me ramenait à Mary et à son odieuse trahison. Des années dans ce pensionnat, et j'avais cru que je pouvais lui faire confiance. Quand j'avais voulu l'aider, elle avait alors révélé mes problèmes psychiques. J'avais alors été interné.
Dix ans de ma vie avait été foutue en l'air. Dix ans ou j'avais été droguée aux traitements me rendant dans un état second, jusqu'à temps que j'eus un jour le cran de changer le cours des choses, que j'eus la possibilité de m'enfuir. Alors il était hors de question que le scénario se renouvelle.
Je commençais à faire les cents pas de long en large, toisant Ambre cherchant une possibilité de réponse. On aurait dit une lionne tournant autour de sa proie. La colère m'envahissait de plus en plus jusqu'à ce que je m'approcha de l'aveugle et m'accroupissant, je lui répondis froidement:

" Que les choses soient bien clairs. " Mes yeux froids sondèrent le visage vide d'Amy. " Je n'entends PAS de voix dans ma tête. Ne prenez pas votre cas pour une généralité. " La rage faisait vibrer ma voix, peut être, que j'avais tellement peur de me retrouver emprisonnée dans une camisole, obligée de prendre des médicaments m'aliénant le cerveau. J'ajoutais ensuite, prenant le risque de révéler ce que je tentais de nier depuis tout à l'heure, la colère me poussant à avoir un comportement contradictoire : " Et si jamais, j'apprends que vous dites à tout le monde que j'entends des voix... Vous le paierez très cher... "
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyVen 27 Déc - 4:42

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Loin du Froid de Décembre.



Ambre n’était pas une jeune femme audacieuse. Elle n’était ni plus aventurière, ni plus courageuse. Elle n’était qu’un corps sans caractère et sans vie, dirigée par une entité qui murmurait doucement dans les ténèbres de son âme. Son esprit était malléable, vulnérable et à la merci de la moindre âme malintentionnée.
Il n’en avait pas toujours été ainsi. Il fut un temps où Ambre avait bien plus de caractère. Lorsqu’elle n’était qu’une toute jeune enfant, elle surprenait les femmes de joie par son aspect aventurier. Elle aimait à courir dans toute la maison, se cacher dans les moindres recoins et s’imaginer des aventures où sa vie était en péril. Son imagination était bien plus que prolifique à ces moment-là. Elle faisait rire l’assistance par ces jeux et les femmes qui l’élevaient devaient continuellement lui courir après.
C’était l’enlèvement par son père qui avait tari son élan d’aventure. Elle le craignait plus que toute autre chose et la peur bloquait son imagination. Il n’y avait que de rares fois où elle se laissait aller. Lorsqu’elle était seule dans les rues de Paris, elle aimait à courir sur les grands boulevards, monter en haut des murs ou prendre un bâton en guise d’arme pour combattre des ennemis invisibles. Mais ces jeux improvisés la retardaient souvent ou bien, ils étaient au détriment des heures de travail. Les coups de son père avaient eu tôt fait de lui apprendre qu’elle n’avait pas de temps à perdre avec tous ces enfantillages. Elle venait d’être propulsée dans la rude vie des adultes avant même de s’en rendre compte.
Les semaines, les mois, les années avaient passé et son père, sans s’en rendre compte, avait détruit le courage et l’audace de son enfant. Il en avait fait un être servile et constamment apeuré de la moindre sentence. Il l’avait diminué et abaissé plus bas que terre à chaque nouveau coup qu’il lui donnait. Durant des années, elle avait vécu dans l’ombre de la peur.
Et puis il y avait eu Dimitri. Un garçon effronté, sans peur et rebelle. Tout le contraire d’Ambre. Il faisait tout ce qu’elle s’interdisait de faire et elle craignait souvent que son côté aventurier ne lui joue de mauvais tours. Elle l’avait admiré autant qu’elle l’avait aimé, car derrière sa fougue et son impulsivité, se cachait un cœur d’or qui n’avait jamais cessé de la défendre et de la protéger. Durant les deux années où ils avaient vécu côte à côte, elle n’avait jamais manqué de rien grâce à lui et il était bien le seul à s’être interposé entre le père et la fillette. Il n’en était pas sorti indemne, mais au moins, quelques heures plus tard, ils étaient libres. Il était parvenu à faire renaître en elle un instinct d’aventurière enfoui. Néanmoins, elle ne s’était jamais montrée aussi audacieuse qu’auparavant. Mais elle se sentait si en sécurité à ses côtés, qu’elle se laissait parfois aller.
Ambre aurait pu redevenir cette enfant courageuse et intrépide si… s’il n’y avait pas eu les frères Darcy. Un enlèvement, un meurtre, une atteinte à son intégrité physique et tout était fini. Ambre n’avait plus Dimitri, elle avait perdu son pays, sa vue et tout espoir. Elle n’avait même plus le droit d’être ce qu’elle était, forcée de devenir un personnage construit de toute pièce : Amy.
Et soudain, sur ce paquebot, après avoir traversé les pires malheurs, les pires douleurs et les pires souffrances, elle se prenait à être audacieuse. Dans cette salle de musique, au beau milieu de la nuit, elle osait demander à une femme si elle entendait des voix comme elle. Elle osait avouer qu’elle avait aussi une voix qui murmurait dans sa tête.
Ambre, qu’est-ce que tu fais ? Es-tu devenue complètement inconsciente ?
Mais elle ne l’écoutait pas. La voix d’Amy fut bientôt balayée par les protestations de l’étrange femme. Immédiatement, le cœur de la chanteuse se serra de remords et elle regretta de lui avoir parlé de tout cela. Elle se braquait et elle la sentit lui échapper quand elle l’entendit s’éloigner d’elle. Son audace allait la perdre. L’aveugle, elle-même, eut un mouvement de recul. Ses prunelles luirent de frayeur dans l’obscurité de la salle de musique, seulement baignée de lumière par l’éclat lunaire.
Les paroles de l’inconnue devinrent soudain plus fortes, refusant avec violence et colère les suppositions d’Ambre.
C’est dangereux ! Enfuie-toi ! Elle te veut du mal ! lui enjoignait Amy.
Mais la terreur lui clouait sur place. Elle était incapable de bouger le moindre muscle. Le froissement d’un tissu lui indiqua que la femme s’était relevée mais elle restait irrémédiablement par terre. Elle n’était plus à genoux, elle s’était complètement laissée tomber au sol, comme accablée par le poids de son erreur. Elle aurait tant souhaité ne jamais avoir rien dit.

« Ce… ce n’est pas ce que j’ai voulu dire… » bredouilla-t-elle. « Je vous en prie… ! »

Le son des pas de l’inconnue lui revinrent. Son pas était appuyé, effréné, soumis à une colère plus que palpable. Elle avait l’impression qu’elle était un fauve tournant autour de sa proie. Et sa proie, c’était elle.
Enfuie-toi !! Maintenant !
Puis les pas arrivèrent dans sa direction. C’était trop tard. Elle s’accroupit et bientôt, elle sentit son souffle impérieux qu’à quelques centimètres de son visage. L’aveugle n’osa détourner la tête, de peur d’attiser encore plus sa colère. Sa voix se fit glaciale, menaçante. Son ton était comme une lame posée sur sa gorge.
Ambre opina vivement lorsque la femme voulut mettre les choses au clair. A chacun de ses mots emplis de rage, elle hochait la tête. Elle avait soudain la sensation de se retrouver auprès d’Edward. Cette manière de parler, de se comporter, ou encore de la menacer. C’était exactement sa manière de faire. Cette ressemblance lui glaçait le sang, plus encore que n’importe quoi d’autre. Des larmes muettes se mirent à couler de ses yeux sans vie.

« Je vous le promets. Je suis sincèrement désolée ! Je ne voulais pas dire ça ! » gémit la chanteuse, s’aplatissant en excuses tremblantes. « J’ai seulement cru que… que je n’étais plus seule au moins une fois dans ma vie… » laissa-t-elle échapper dans un sanglot désespéré, défiant toute prudence.
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyJeu 9 Jan - 23:17

Tétanisée par la peur, je ne pouvais m'empêcher d'être déçu par cette jeune femme: Amy. Cette chanteuse que j'avais tant de fois rêvé de voir, de par ses chansons juste magnifique. Elle m'avait bercée tant de fois, la sérénité je l'avais trouvé dans les paroles si justement dites. Et voilà, qu'aujourd'hui, la déception envahissait mon cœur. Je ressentais également de la colère envers elle, envers moi: peut être, m'étais-je trop dévoilée ? Pourtant, en y pensant, je ne pensais pas avoir commis de faux pas. Bon, mis à part le fait, que soudain, je m'étais mis à parler à quelqu'un qui n'était pas là, le reste... J'avais été sage comme une image. Malgré cela, Amy m'avait discerné mieux que quiconque au premier coup d'oeil sans que j'eus besoin de prononcer le mot "schizophrène". Quel démon se cachait derrière cette femme aveugle? Le bonheur de la rencontrer s'était évaporé et je m'étais refermée comme une huître par crainte des répercussions. Maintenant, je devais tout faire pour la dissuader de dévoiler mon secret. Elle ne devait révéler mon secret à personne: ne voulant passer pour la folle du Titanic, la pression restait pour moi le seul moyen connu pour faire taire les bouches trop bavardes. Et alors qu'il y a encore quelques instants, il vibrait dans ma voix une pointe d'admiration, voilà que désormais, le dégoût et la colère la faisait vibrer. Elle devait se taire sinon elle allait souffrir. Mais Amy n'avait rien d'une force de la nature, c'était une victime. J'eus le cœur serré face à sa détresse. Elle semblait sincère quand elle disait qu'elle était désolée. Le regret faillit me pousser à lui parler gentiment mais je préférais rester sur mes gardes. Après tout, l'amitié avait été la cause principale de mon internement.
Je revois encore les images dans ma tête, comme si c'était hier. Mary, ma première amie qui revenait de chez le prêtre, en pleurs, les vêtements déchirés. Mes larmes s'étaient jointes aux siennes tant je trouvais ce viol ignoble et douloureux. La vengeance m'avait semblé être la meilleure des solutions pour mon amie si chère à mes yeux. Et j'avais tenu parole, le prêtre avait été tué de plusieurs coups de couteaux. Toutefois, je ne m'étais attendue à ce que Mary me trahisse ainsi, me dénonce si lâchement. La camisole avait fini par devenir ma seule de réconfort. Je ne pouvais compter sur personne. Désormais, la confiance était quelque chose que je jugeais peu opportun de transmettre. Toutefois, la dernière phrase émise par l'aveugle me fit froid dans le dos. Immédiatement, ma colère redescendit jetant un silence glacial dans la salle de musique. La bouche entrouverte, plus aucun mot ne sortait de ma bouche. J'étais tétanisée. Se pouvait - il que... Non... Elle mentait! Une artiste douée ne pouvait pas avoir le même problème que moi! Elle était une lumière dans ma vie. Elle avait eu un succès fou, elle ne pouvait pas être schizophrène. Non, pas après tout ces belles chansons. J'étais tellement misérable à côté d'elle. Et puis vraiment , savoir qu'Amy pouvait souffrir de mêmes problèmes que moi me retournait le cœur. Elle méritait tellement mieux, elle était si gentille de par ses gestes réconfortants.

" Ce n'est pas possible... " murmurais-je d'un ton désespéré. Je me trouvais à côté d'elle. Je n'avais pas bougé. Inerte, je cherchais à sonder la vérité dans ses propos. Devais je la croire ou me mentait-elle pour avoir un quelconque aveu de ma part? Je n'en savais rien, je ne voulais plus faire confiance à personne. Je l'avais fait une fois et cela m'avait suffi. Dix ans de ma vie était parti en fumée. Pourtant, il se dégageait d'Amy une innocence que je ne pouvais nier, elle semblait sincère dans ses propos, dans sa manière d'être, de parler. Sa berceuse avait été incroyablement réconfortante, elle avait chanté ma chanson préférée. Elle ne me connaissait pas et pourtant, elle avait eu envie de partager un moment de bonheur en ma présence. Peut être qu'il était temps de croire en quelqu'un , peut être qu'il était temps que je découvre l'envie de me rapprocher des autres. J'étais toujours à genoux à côté d'elle et je me mis à bredouiller d'une voix tremblante : " Je suis ...." j'avais si peur, j'aurais tant voulu mourir en ce moment même. J'avais l'impression de faire la plus grosse erreur de ma vie : " Je suis .. Vraiment désolée... "

Je me mis à ramper vers elle, doucement et je lui pris sa main. Que je serrais avec une tendresse qui m'était étrangère : " Je ne pouvais savoir que vous étiez comme moi, Amy. " les larmes me montèrent aux yeux tant j'étais émue cet instant: " Je ne pensais pas qu'un jour... Je rencontrerais quelqu'un comme moi. "
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptyDim 2 Fév - 0:58

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Loin du Froid de Décembre.



Ambre n’en pouvait tout simplement plus de cette solitude dans laquelle elle était jetée depuis des années. Elle avait pourtant débuté son existence seule, livrée à elle-même dans un monde qui ne semblait pas la désirer. Sa mère était morte en couche, mais par chance, elle s’était trouvée lovée dans l’amour chaleureux et bienfaisant de ces femmes de joie qui étaient autrefois les camarades de sa défunte mère. Toutefois, son bonheur avait été bien éphémère et elle fut brutalement projetée dans ce que la vie avait de plus dur à offrir. Elle était avec son père, homme bourru et brutal, qui n’avait eu l’usage de sa fille que pour lui faire gagner plus d’argent. Pour cette fois, sa voix avait été une réelle bénédiction. Si elle n’avait pas eu ce don, Ambre savait pertinemment qu’il l’aurait rejetée, car sinon sa voix, quel autre talent possédait-elle ? Elle avait donc fait face seule à la tyrannie de son père, ses sautes d’humeur, ses beuveries incessantes. Elle ne se souvenait pas l’avoir vu sobre un jour. Sans doute ne l’avait-il jamais été. Elle était aussi solitaire dans les rues lorsqu’elle chantait de sa douce voix. Elle était seule à arpenter les boulevards, à rentrer tard le soir, attendant jusqu’à la dernière minute pour retourner auprès de son père qu’elle retrouvait sans cesse noyé dans des vapeurs d’alcool. Puis il y avait eu lui. Dimitri, ou son chevalier des temps modernes comme elle se plaisait à l’appeler. Elle se rappelait clairement les termes qu’avait utilisés cet homme étrange que les deux enfants avaient rencontré un après-midi de printemps. Dimitri avait pris la défense d’Ambre, craignant qu’il ne leur fasse mauvais partie, mais il s’était contenté de rire et de dire à la fillette qu’elle avait de la chance de l’avoir comme ami, car il était un réel petit chevalier. Depuis ce jour, Ambre aimait à considérer Dimitri comme un preux guerrier prêt à sauver les demoiselles en détresse. Et en effet, c’était bien le cas, lui qui n’avait pas hésité une seule seconde à se battre contre les frères Darcy. Mais ses efforts n’avaient rien fait et il lui avait été arraché, la projetant une fois encore dans les terribles affres de la solitude. Cette solitude n’en était que plus douloureuse parce qu’elle vivait constamment aux côtés du fantôme de l’être aimé, de cet être cher avec qui elle aurait souhaité écouler toute son existence. Année après année, elle avait appris à s’accommoder de son existence solitaire. Puis le sort semblait vouloir tourner quand Ambre retrouva Dimitri, son doux chevalier. Il était à nouveau là et il allait la protéger de toute la violence qui l’entourait. Mais une fois de plus, la cruauté de l’existence avait happé le violoniste et durant un an, elle avait été solitaire dans cette vie qui n’en était pas une. Elle n’avait pu supporter de se retrouver seule une fois encore, alors « Amy » était arrivée. La dualité des deux personnalités que les frères Darcy lui avaient créées l’avait jetée dans la folie, la confusion de son identité. Aujourd’hui, elle n’aurait plus su dire qui elle était réellement. Elle n’en avait pas la moindre idée. Il n’y avait qu’en présence de Dimitri qu’il lui paraissait discerner l’ombre de l’enfant qu’elle était autrefois, cette enfant qui était morte avec Dimitri. Dire qu’elle l’avait retrouvé mais qu’elle ne pouvait être à ses côtés. Elle avait passé un an à le chercher, et maintenant qu’elle le savait vivant, elle était contrainte de le rejeter. Certes, elle le sauvait pas se sacrifice mais sa sentence était bien cruelle pour un crime qu’elle ne se souvenait pas avoir commis. Alors ce soir-là, de savoir qu’elle n’était pas complètement seule, que la voix dans sa tête ne résonnait pas que dans son esprit, Ambre avait cru qu’elle pourrait s’extraire de sa solitude, en apprendre plus sur cet écho dans son âme. L’étrange femme qu’elle avait rencontrée cette nuit dans la salle de musique paraissait souffrir du même mal qu’elle. Alors pourquoi ne pourrait-elle pas devenir…une alliée dans les ténèbres de son existence ? Mais aussitôt qu’Ambre, dans une hardiesse qu’elle ne se connaissait pas, s’était empressée de lui demander si elle entendait une voix dans sa tête, la femme s’était braquée, devenant d’une cruauté effrayante. L’aveugle s’était aussitôt rétractée, refusant de lui causer plus de tort. Amy lui reprochait déjà cette imprudence et son inconséquence. Pourquoi avait-elle dit cela ?
« Je suis… je suis…vraiment désolée… ». Ambre releva un visage baigné de larmes vers la source de la voix. Son murmure contrastait fortement avec sa réaction agressive d’il y a quelques minutes. Etait-ce là une manière plus cruelle de se venger ? Pourquoi de telles excuses… « Je ne pouvais pas savoir que vous étiez comme moi, Amy. » Le cœur de l’aveugle rata un battement. Durant l’espace d’un instant, elle crut avoir rêvé. Cette inconnue venait-elle réellement de lui révéler son secret ? De lui dire qu’elle aussi entendait une voix dans sa tête ? Ses pleures se tarirent, n’esquissant plus un geste comme pétrifiée. Puis soudain, sa voix s’éleva dans un souffle : « Alors… c’est elle qui voulait me tuer ? Pourquoi ? Pourquoi voudrait-elle me voir disparaître ?... » Les battements de son cœur redoublèrent. Quel genre d’entité diabolique pourrait souhaiter une telle chose ? Qui en ce monde cruel pourrait pousser au crime ?
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MessageSujet: Re: Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA]   Loin du froid de Décembre [AMBRE & LIVIA] EmptySam 15 Fév - 17:40

Je me sentais perdue, mes émotions se mélangeaient et prendre une décision finissait par relever d'une dangerosité sans égale. La Peur, j'avais ce sentiment au fond de moi, elle me tétanisait, me faisait perdre mes moyens. Et puis il y avait Amy, cette chanteuses dont les écrits m'avaient beaucoup plu et aidé dans ma vie après le naufrage. Comment aurais je pu penser qu'en réalité, celle dont la vie glorieuse et couronnée de succès m'avait bien fait envie, son existence n'avait rien d'enviable. Il suffisait de la voir en ce moment même, si frêle, couverte de bleus, le visage inondé de larmes, je crois bien que j'avais bien plus de peine pour elle qu'elle n'en avait pour moi. Et presque inconsciemment quelque chose en moi se brisa quand elle m'avoua qu'elle souffrait de schizophrénie comme moi. C'était la première fois que je rencontrais quelqu'un de semblable à mon cas, moi qui pensais être seule au monde. Mis à part les fous que j'avais pu voir dans l'asile, je n'avais jamais vu de personnes comme Amy. Et elle était là, effrayée et tremblante parce que je venais de m'énerver, de la menacer de représailles si jamais elle me révélait aux autres. Je voulais La préserver envers et contre tous. Pourtant qu'avais je à y perdre contre cette femme aveugle? Alors je ne pus m'empêcher à mon tour de m'excuser et en expliquait les raisons après ma demande de pardon. À travers mes dernières paroles, je me dévoilais bien plus que je ne le pensais, confirmant que ses doutes étaient bien fondées. Les yeux de l'aveugle, réduit à ne voir que le néant, s'écarquillèrent réalisant ce que je venais de dire. C'est alors qu'Elle se matérialisa à nouveau :

" Amy... Tu en as trop dit... Ne te dévoile pas plus au risque de nous perdre encore plus... " Sa voix se mêla à l'unisson avec celle de la chanteuse.
"  Alors… c’est elle qui voulait me tuer ? " Je ne savais plus ou donner de la tête ou qui écouter: " Ne nous révèle pas plus. Tais toi! Et va t-en loin de là! "
" Pourquoi ? " ajouta Ambre d'une voix qui me laissait présager le pire. Je commençais à ouvrir la bouche pour lui répondre mais me tus parce qu'Elle s'était matérialisée à nouveau: " Tais toi!! TAIS TOI! Tu vas nous faire repérer! " Et comme si mon trouble n'était pas assez important, Ambre me questionna encore : "Pourquoi voudrait-elle me voir disparaître ?... "

" Je... " Disais je en me mettant à balbutier face à l'aveugle. Je ne savais que lui répondre, c'était quelque chose de très difficile que de me dévoiler à quelqu'un. La confiance en autrui avait disparu de mon vocabulaire, je ne savais plus ce que c'était. Mais Amy, elle était cette lumière dans les ténèbres, je ne savais que dire ou répondre. " Je... " Mais ma phrase se perdit dans un silence qui me dévasta. Les larmes perlèrent à nouveau de mes yeux alors que je réalisais que j'étais prisonnière de moi même. Il fallait pour cela que je me défasse de son emprise, que je trouve un moyen de me libérer de ces chaînes qui me retenaient de me dévoiler. Mais il y avait toujours cette peur profonde et sincère, prête à tout pour m'empêcher de dire la vérité à Amy. Pourtant je sentais que je lui devais ces explications, j'avais menacé de la tuer et c'était normal qu'elle veuille savoir. Et puis, je songeais également que si elle me révélait aux yeux de tous, je pourrais être capable d'en faire de même. J'aurais pu penser qu'elle tuait aussi mais étant aveugle, je ne pensais pas. De même que sa dernière question me laissait prouver le contraire. Pourtant, son innocence me poussa à lui répondre : " Je... non... Ce n'est pas ce que vous croyez Amy... Je n'ai jamais voulu vous faire du mal ... " Je me tordais les mains et commençais à me sentir stressée. " Parfois... Je ne contrôle pas mes... " Mais je me sentis incapable d'en dire plus. Je perdis le peu de dignité qu'il me restait et je fondis à nouveau en larmes. Couvrant mon visage de mes mains tremblantes: " Désolée.. Je ne puis en dire davantage... " Mes mains se refermèrent davantage sur mon visage, mes ongles s'enfonçant cruellement dans ma peau. " Dès l'instant ou vous connaîtrez la vérité... Vous allez faire comme tout le monde et me rejeter... "

Je crois qu'Ambre me faisait pitié. Mais cette compassion n'était rien comparée à celle que j'éprouvais envers moi même.
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