♦ Que pensez-vous du Titanic?
Le Titanic est ce qu’Alice a vu de plus beau de toute sa vie. Ayant vécu dans un orphelinat plutôt austère, quand elle aperçut pour la première fois le paquebot, elle ne pouvait qu’être époustouflée. Elle l’a été davantage une fois qu’elle y était entrée. Le Titanic est un paquebot de rêve. Quand Alice a vu ses chances de retrouver sa mère couler avec le Titanic, elle l’a beaucoup moins apprécié. Il n’était plus que ce qui avait emporté sa mère. Aujourd’hui, de nouveau à bord, elle ne cesse d’être éblouie par tant de splendeur.


♦ Comment avez-vous réagis en voyant que vous étiez de retour sur le Titanic, alors que celui-ci est au fond de l'océan?
Une bénédiction. La jeune fille a tellement regretté survivre au naufrage et de perdre sa mère que d’obtenir une nouvelle opportunité de la trouver était une bénédiction. Elle avait beaucoup souffert d’avoir perdu sa mère qu’elle avait fini par en mourir. Elle espérait tellement revenir à bord. Bien entendu, elle a été surprise en se réveillant dans ce lit qu’elle avait quitté des mois plus tôt, mais une fois la surprise passée, elle ne pouvait qu’apprécier ce cadeau qu’on lui offrait.


♦ Aimez-vous fréquenter les autres classes du bateau ou préférez-vous rester avec votre groupe? Pourquoi?
Etant entrée clandestinement sur le paquebot, Alice s’est plutôt faite discrète lors de son premier voyage. Maintenant qu’elle est de nouveau sur le Titanic, ce sera pour elle l’occasion de découvrir toute sa splendeur. Elle ne connaît pas grand-chose de la vie des premières classes, mais Alice ne serait pas contre y faire un tour. La jeune fille a toujours eu une facilité à parler avec n’importe quel individu, quel qu'il soit. Et si elle veut retrouver sa mère, qui semble être parmi les plus riches du paquebot, elle n’hésitera pas à pousser les portes des plus riches passagers.  


♦ Si tu avez la possibilité de quitter cet endroit pour réellement mourir, le feriez-vous? Pourquoi?
Pourquoi quitter cet endroit ? Alice a la chance d’être réapparue sur le Titanic alors que c’était son plus grand souhait quand elle était encore en vie. Elle voulait tellement retrouver sa mère. Quand le paquebot a percuté l’iceberg et qu’elle a dû le regarder sombrer sans pouvoir rien faire, elle a vu couler ses chances de retrouver cette mère qui lui avait tant manqué tout au long de sa vie. On lui offre une seconde vie sur le Titanic. Cette fois-ci, elle ne va pas la gâcher. Elle ne quittera pas ce bateau sans sa mère.  

 

C’est le premier jour du mois de décembre de l’année 1898 que naissait une petite fille possédant le doux prénom d’Alice. C’était un magnifique bébé. Elle aurait pu avoir une délicieuse enfance avec des parents amants et protecteurs mais malheureusement pour la petite Alice, le destin lui avait réservé une vie bien différente. Elle fut abandonnée dès les premières heures de sa vie par une mère qui l’aimait mais qui ne pouvait la garder. Alice était le fruit d’un pêché et n’avait donc pas le droit de vivre une vie paisible auprès de ses parents. C’est à contre cœur mais en sachant qu’elle faisait la meilleure chose pour sa fille que la mère de la fillette la déposa à l’orphelinat en cette journée plutôt douce pour la saison.

Registre de l’orphelinat :
« Décembre 1898. Une enfant a été abandonnée par une jeune femme au début du mois. La petite fille était en bonne santé. Elle a été laissée dans son couffin avec une couverture, une peluche et une montre à gousset. La jeune femme nous a demandé de prendre soin de sa petite Alice, avant de quitter les lieux. La fillette portera désormais le nom d’Alice Flynn. »

Alice Flynn passa pratiquement toute sa vie dans cet orphelinat. C’était une grande bâtisse à l’écart de la ville. L’intérieur était simple et disposé de grands dortoirs pouvant accueillir huit à dix enfants. L’orphelinat était dirigé par Mrs Hamilton, une dame autoritaire. L’enfance de la fillette ne fut pas désagréable. Les enfants vivaient dans la pauvreté mais étaient bien traités.

Toute sa vie, la petite Alice se sentit incomplète. Elle souffrait de ne rien savoir de ses parents. Elle ne connaissait que ce que les nourrices de l’orphelinat avaient pu lui dire, c'est-à-dire pas grand-chose. Sa mère ne lui avait laissé que peu de choses. Elle avait déposé, dans le couffin, une montre à gousset possédant, en son sein, une photographie d’une jolie jeune femme. La fillette la regardait souvent pour avoir l’impression d’avoir sa mère auprès d’elle. Avec le temps, la photographie avait jaunie et s’était abimée, mais l’image de sa mère était gravée dans sa mémoire. Au dos de la montre, les lettres « E.P. » étaient gravées. Alice se demandait toujours quel prénom pouvait bien porter sa mère. Elizabeth ? Edwige ? A moins que ce soient les initiales de son père. Edmond ? Edward ? Elle ne le saura peut-être jamais.

Un jour, à l’aube de ses treize ans, Alice fut convoquée dans le bureau de Mrs Hamilton. Elle venait de recevoir une lettre, l’unique lettre qu’on lui avait envoyée de toute sa vie. Son contenu fut une énorme surprise. Une mystérieuse personne lui annonçait que sa mère était encore en vie. La fillette avait enfin une occasion de retrouver sa mère. Après tant d’années à souffrir de son absence, Alice avait peut-être une chance de pouvoir serrer sa mère dans ses bras dans un avenir proche. Mais, partir à l’aventure seule pouvait être effrayant pour une demoiselle de son âge. La fillette y pensa quelques jours puis prit la décision de quitter l’orphelinat pour aller à la rencontre de sa mère. Elle ne pouvait rester plus longtemps dans la grande bâtisse qui l’avait vu grandir. Le chemin allait être périlleux mais elle était déterminée à retrouver ses parents. Un matin de décembre 1911, Alice profita d’une sortie en ville pour s’éclipser du groupe. Quelques heures plus tôt, elle avait mis le peu d’affaires qu’elle possédait dans un sac, alors que les autres fillettes faisaient leur toilette. Hors de la vue des nourrices de l’orphelinat, Alice pouvait commencer son enquête à la recherche de son passé.

Extraits du journal d’Alice :
« 08 décembre 1911 – Je commence ce journal pour y consigner toutes les informations que je trouverais lors de mon voyage vers le passé. »
« 11 décembre 1911 – Pour le moment, je n’ai trouvé personne pour m’aider. Personne dans les environs de l’orphelinat ne semble connaître la jeune femme de la photographie. »
« 13 décembre 1911 – Je viens de rejoindre une compagnie itinérante. Me voilà danseuse. Je gagne peu mais cela me permet de manger à ma faim et surtout de voyager. »
« 02 février 1912 - La compagnie est comme une famille. Ils me câlinent comme si j’étais un membre de leur famille. Je n’ai jamais connu ça auparavant. Si c’est cela avoir une famille, je souhaite retrouver ma maman au plus vite. Je rêve de pouvoir me tenir dans ses bras et l’écouter me raconter une histoire pour m’endormir. »
« 18 février 1912 - Où es-tu maman ? »
« 30 mars 1912 – Cela fait maintenant plusieurs mois que je suis à la recherche de ma mère. Les pistes se sont succédées et me conduisent vers le sud du pays. »

Un matin d’avril 1912, l’attraction de Southampton se trouvait sur les quais. Comme beaucoup de monde, Alice accompagnée de quelques membres de la compagnie itinérante, alla admirer le Titanic. Elle en eut le souffle coupé. Elle n’avait jamais vu un paquebot aussi grand. En réalité, le Titanic était le premier navire qu’elle voyait. Et quelle première ! Il était somptueux et la fillette ne pouvait qu’imaginer ce qu’il pouvait y avoir à l’intérieur. Malgré la foule qui s’était pressée aux abords du paquebot, Alice vit quelques chapeaux de grandes dames passaient au loin. En observant ses dames, Alice repensa à sa mère. Elle avait appris au cours de ses recherches que sa mère avait été vu, il y a bien longtemps, dans des bals auxquelles ce genre de dames aux chapeaux volumineux participaient. Elle sortit la montre à gousset de sa poche et regarda la photographie qu’elle avait maintes fois regardée. Un homme exprima son étonnement de voir la photo d’une femme dont il avait croisé le chemin une heure plus tôt. Bien que plus vieille que sur la photo, il était sûr qu’il s’agissait de la même personne. Il l’avait entendu dire qu’elle prenait le Titanic. La fillette n’avait jamais été aussi près de trouver sa mère. Elle devait absolument monter à bord. N’ayant pas les moyens de se payer un billet, elle entra clandestinement dans le paquebot.

Les débuts d’Alice sur le Titanic furent dans la soute à bagages. Puis, elle fut recueillie par une charmante famille de 2e classe, les Wells, sensibles à l’histoire de l’orpheline. De même que les artistes de la compagnie, les Wells la prirent sous leur aile durant la traversée. Bien qu’attentionnés à l’égard d’Alice, ils n’étaient pas sa véritable famille. Ce manque qui l’accompagnait depuis de nombreuses années allait bientôt disparaître. Elle était à deux doigts de toucher son rêve de retrouver ses racines. Malheureusement, le destin en avait décidé autrement. Le Titanic percuta un iceberg et plongea au fond de l’océan, pour toujours. Alice eut beaucoup de chances et trouva place dans l’un des canots de sauvetage. Elle eut le déplaisir de regarder le paquebot s’enfonçait dans les profondeurs de l’océan, emmenant avec lui, la possibilité de trouver sa mère. Avait-elle perdu toutes ses chances de la trouver ? Quand le Carpathia accosta à New York, quelques jours plus tard, Alice regarda la liste des disparus du Titanic. Son cœur s’arrêta un instant quand son regard se posa sur un nom : Edith Maybelle Parr. Les lettres E.P. de la montre à gousset… Sa mère avait disparu avec le paquebot. L’occasion de sentir la chaleur de son souffle dans son cou, ou de la serrer si fort qu’elle entendrait les battements de son cœur, s’envolait. Ce plaisir lui était arraché avant même qu’elle puisse le toucher du bout des doigts. La jeune fille ne pouvait retenir ses larmes.  

Après cette funeste découverte, Alice n’était plus que l’ombre d’elle-même. Elle avait perdu sa joie de vivre. Elle retourna en Angleterre où elle retrouva la compagnie itinérante. Elle continua à danser mais elle n’était plus qu’un corps sans âme. Ceux qui l’avaient connu avant le drame ne la reconnaissaient plus. La Alice d’autrefois avait disparu avec le Titanic. Elle avait survécu au drame et pourtant elle aurait voulu mourir lors du naufrage. Alice avait perdu sa mère et sa raison de vivre. La jeune fille était comme une feuille, une feuille qui finit par dépérir loin de sa branche pour la nourrir. Elle se laissa mourir, ne mangea pratiquement plus rien et finit par tomber malade. La tuberculose l’emporta en quelques mois. Cela aurait pu être la fin de l’histoire d’Alice Flynn, mais contre toute attente, elle avait droit à une seconde chance. Alors qu’elle était morte, elle se réveilla à bord du Titanic. Tout semblait comme avant le naufrage. Le paquebot était rempli de centaines personnes, les assiettes et les verres étaient toujours en place dans leur placard et l’orchestre jouait toujours lors du diner. Elle retrouva avec plaisir l’une des Wells qui n’avait pas réussi à trouver un canot de sauvetage. Elle lui expliqua que toutes les personnes qui avaient péri étaient réapparues sur le Titanic. Cela faisait des mois qu’ils vivaient tous une traversée de l’Atlantique sans fin. Alice prit cela pour une bénédiction. On lui offrait une seconde opportunité de trouver sa mère, car oui, elle en était sûre, sa mère était à bord du Titanic…