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  « On croit ce que l'on veut croire. »[Pernelle&Roderick]

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MessageSujet: « On croit ce que l'on veut croire. »[Pernelle&Roderick]    « On croit ce que l'on veut croire.  »[Pernelle&Roderick] EmptyVen 21 Juin - 0:32

Roderick avait de plus en plus de mal à conserver son calme à bord du paquebot. Son calme, mais surtout sa raison. Le paquebot était certes luxueux, mais malgré la multitude de ponts, cabines et coursives, on en avait vite fait le tour. Vite étant peut-être quelque peu exagéré : mais un an à y être enfermé suffisait largement, merci et bon vent. Malgré les salles nouvelles et les mystères qui entouraient certains recoins du navire, Roderick pouvait dire qu'il connaissait bien le Titanic et ses habitants. Trop bien même.

Etre toujours enfermé entre les mêmes 3510 ( estimation hasardeuse, il ne s'ennuyait tout de même pas au point de les compter ) murs, croiser toujours les mêmes passagers et les mêmes visages...Roderick n'était pas loin de devenir fou. En lui remontaient de très mauvais souvenirs qu'il avait rejeté il y a plusieurs années maintenant, mais qu'il le rendait toujours aussi mal à l'aise. Pour éviter cela, il fuyait la compagnie, il s'isolait.

C'était ce qui l'avait amené dans la bibliothèque des secondes classes. Le niveau social de cette bibliothèque importait peu au jeune homme, ce qui comptait à ses yeux, c'étaient ces livres, ce calme, cette solitude. Les bons côtés du monastère et de la vie cléricale, en somme. La perspective de la mort et de la damnation avait visiblement ôté tout désir de s'instruire et se distraire par la lecture. Qu'importe d'être lettré une fois que l'on est mort, n'est-ce pas ? Aussi, le jeune homme était  presque seul dans la pièce; il entendait de temps autre un bruit de page qui se tournaient, ou des pas qui se promenaient, mais cela ne le faisait pour autant pas lever la tête. Installé profondément dans un fauteuil de cuir, il parcourait distraitement un livre. Ecrit par le marquis de Sade, si vous voulez tout savoir.

Roderick était captivé parce qu'il lisait ( des prêtres dévoyant de jeunes pucelles, pensez vous qu'il était intéressé !) et indifférent au monde jusqu'à ce qu'un pas s'approche plus près de lui. Il releva le nez de son livre pour y jeter un coup d'oeil, jusqu'à ce que son visage s'éclaire soudainement. Il connaissait la jeune femme. Pernelle. Une employée du Titanic...qui le prenait pour son ancien amant ! Roderick ne la connaissait originellement ni d'Eve, ni d'Adam, mais était très intéressé à l'idée de la connaître...bibliquement, si vous voyez ce que je veux dire. Alors il était rentré dans son jeu. La mascarade éprouvait parfois ses talents de comédiens, mais dans l'ensemble, il s'amusait beaucoup à la mener en bateau.

« -Pernelle ! »

Son appel et le claquement sec du livre qu'il refermait rompirent le profond silence de la bibliothèque. Sacrilège pour certains, mais lui s'en moquait ( ou bien était-ce son but, au contraire ?). Il se leva d'un bond, laissant tomber le livre au sol et s'approcha de la jeune femme pour poser doucement sa main sur son bras. Il souriait, presque tendrement, comme ravi de la revoir . Et c'était le cas; il était l'heure de rompre son ennui.

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MessageSujet: Re: « On croit ce que l'on veut croire. »[Pernelle&Roderick]    « On croit ce que l'on veut croire.  »[Pernelle&Roderick] EmptyJeu 11 Juil - 4:09



J’étais plus amoureuse que jamais de ce si séduisant Marcus Cream et la vie sur le Titanic parmi toutes ces âmes en peine m’était très agréable. Je n’avais pas revu mon frère Alexandre, mais dans ce paradis, peut-être n’était-il pas présent et qu’il se trouvait dans son propre paradis. Henry, l’homme que j’avais aimé l’instant d’une nuit et pour toute la vie, amant de ma véritable jeunesse, était depuis mon retour très loin dans mes pensées. Marcus était tout à mes yeux et mon cœur ne battait que pour lui. Le souvenir d’Henry disparaissait chaque fois un peu plus lorsque cet amour de Marcus me souriait et je l’avais presque à jamais oublié jusqu'au soir où je le vis.

Tout c’était passé si rapidement! J’étais dans l’un des nombreux ascenseurs du navire lorsqu’un homme était entré sur l’un des étages. Il ne semblait pas m’avoir remarqué et lorsque mes yeux se portèrent vers lui, j’eus l’impression de mourir à nouveau. Mon cœur cessa de battre de la même manière que lors de ma mort dans la petite chapelle de la résidence pour personnes âgées dans laquelle je vivais depuis quelques années. Bien que légèrement différent que dans mes souvenirs, Henry se trouvait à mes côtés dans l’ascenseur. Les quelques mèches rebelles de ses cheveux lui tombaient dans le visage et sa barbe n’était pas rasée comme dans mes souvenirs. En un instant, alors que mon esprit avait tout oublié de mon amant pour laisser place à Marcus, c’est ce dernier que j’oubliais, me remémorant ces moments magiques que j’avais passés en compagnie d’Henry. Cette nuit où pour la toute première fois, je devenais une femme dans les bras d’un homme…J’avais murmuré son prénom et il s’était tourné vers moi. Je ne me souvenais pas que ses yeux étaient de cette couleur, mais ils avaient la même forme. Sa bouche n’avait pas changée, mais son nez était quelque peu différent. Peut-être avais-je oublié ses traits plus que je ne l’avais cru ou que je les avaient idéalisé dans un rêve, mais c’était bien mon Henry, j’aurais parié sur cela. Henry sembla surpris que je le nomme ainsi, mais, ne lui laissant pas la chance de me parler, je m’étais jeté à son cou, l’embrassant avec fougue. Il ne devait visiblement pas s’attendre à cela puisqu’il me repoussa doucement, scrutant mon visage avec incompréhension. Rapidement, je lui avais dit : « Henry, pardonne-moi, mais je n’espérais plus te retrouver! J’ai pleuré ta mort toute ma vie…jamais je n’ai oublié cette nuit…ce qui s’est passé entre toi et moi avant le naufrage…jamais! » Puis soudainement, Marcus me revint en tête et je me rendis compte de ce qui était en train de m’arriver. L’ascenseur s’ouvrit puis, m’éloignant d’Henry, reculant jusqu’à la sortie, je lui avais dit : « Je…nous nous reverrons…pardonne-moi encore pour…Henry… » et avais tourné les pas pour m’enfuir en courant. Le pauvre n’avait pas eu le temps de me parler, mais je ne pouvais me laisser aller aux retrouvailles avec cet homme que j’avais aimé toute ma vie. Mon cœur battait maintenant pour un autre homme et je ne pouvais pas l’oublier si rapidement! Me dirigeant dans ma cabine, j’avais pleuré et depuis quelques jours, j'avais soigneusement évité Henry tout comme Marcus.

Me prenant soudain d’affection pour les histoires d’amour compliquées, la bibliothèque des 2èmes classes était devenue mon lieu de détente préféré. Henry m’avait déjà dit qu’il n’aimait pas beaucoup la lecture alors je savais que je ne risquais pas de le retrouver ici. Je n’étais pas prête à choisir entre l’un ou l’autre, je ne voulais pas devoir faire ce choix. C’était si horrible. Le livre que je tenais dans mes mains était « Orgueil et préjugés » de Jane Austen et j’étais déjà amoureuse de Mr Darcy lorsque, décidant de changer de fauteuil pour être seule, le coin de la bibliothèque où je me trouvais se remplissant de jeunes femmes, un homme prononça mon prénom. Refermant son livre brusquement, Henry me fit sursauté presque autant qu’il me fit rougir par sa présence. Je ne pouvais pas fuir et je me sentais faiblir au moment où il bondit vers moi et posa sa main sur mon bras. Me regardant en souriant tendrement, Henry semblait heureux de me revoir. J’avais tellement envie de me blottir contre lui, de vivre à nouveau ce que nous partagions bien des années plus tôt et d’oublier tout le reste, mais je ne le pouvais pas. Les traits de mon très cher Henry semblaient me perturbés autant que lors de notre brève rencontre précédente, mais j’étais morte vieille, j’avais oublié son visage avec le temps, je m’en rendais compte à présent. Lui souriant à mon tour, j’avais porté l’une de mes mains vers sa chevelure afin de replacer quelques-une de ses mèches.

« C’est à croire qu’elles ne tiendront jamais en place… » Avais-je lancé sur une pointe d’humour. Voilà ce qui allait détendre l’atmosphère et nous aider à réapprendre à se connaitre lui et moi. « J’avais oublié à quel point tu étais beau… » Rougissant à la suite de mes paroles, j’avais tourné les yeux vers les étagères de livres comme si j’avais peur d’être épié par quelqu’un. Qui sait, peut-être que Marcus allait apparaitre derrière nous et que je devrais m’expliquer aux deux hommes de ma vie…Dieu, si tu existes, par pitié, ne me fais pas subir cela…
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MessageSujet: Re: « On croit ce que l'on veut croire. »[Pernelle&Roderick]    « On croit ce que l'on veut croire.  »[Pernelle&Roderick] EmptyMer 17 Juil - 1:58


 « On croit ce que l'on veut croire.  »[Pernelle&Roderick] Tumblr-mo3dd6vvh51ru34cuo2-250_imagesia-com_9wk1Sourire joyeusement, familièrement, se montrer ravi de leurs retrouvailles. Il ne pensait pas la voir à la bibliothèque, mais pourquoi pas après tout ? Il fallait bien s'occuper. Et il s'occupait, grâce à son nouveau jeu : Prétendre qu'il connaissait bien cette femme, puisqu'après tout ils avaient apparemment (déjà) partagé une nuit d'amour, avant le naufrage...Depuis la surprise de leur rencontre – il était rare qu'une femme lui saute au cou et l'embrasse sans qu'il la connaisse : il approuvait ce genre de comportement, qui changeait bien des mièvreries convenables et hypocrites dont les femmes étaient habituées, mais tout de même : il était resté interdit, sur l'instant – Roderick s'était repris et avait décidé de profiter de la situation.

Jouer à être quelqu'un d'autre, à être quelqu'un dont on ignore tout, amant d'une femme inconnue. Jeu risqué, Roderick avançait à l'aveuglette, mais s'il commettait une gaffe, que perdait-il ? L'amour d'une femme dont il se moquait éperdument. Il jouait sans craindre de perdre, quoiqu'il arrive maintenant elle serait catastrophée, honteuse de son erreur. Qu'on lui donne juste l'opportunité de briser le coeur de la jeune fille et de la séparer de son amant actuel. Dieu et Diable existaient, cela Roderick en avait la certitude; et c'était le Diable qui avait fait se croiser leurs chemins ce jour-là, qui avait brouillé les traits de son amant dans la mémoire de la jeune femme, et avait permis qu'elle soit flouée, manipulée entre les mains du prêtre.

Il ne la connaissait pas, elle lui avait dit l'aimer. Suite à leur première rencontre – si abrupte, brève, et passionnée à la fois – Roderick avait mené l'enquête et interrogé quelques passagers: être enfermé un an sur un bateau sans espoir d'escale faisait des miracles de socialisation, tout le monde connaissait tout le monde et les rumeurs – fondées ou non mais même les plus horribles rumeurs ont toujours un fond de vérité, c'était ce qui en faisait le sel – allaient bon train entre les ponts.

Elle s'appelait donc Pernelle, et en plus d'un charmant minois semblait une jeune fille charmante en tous points de vue. Quelqu'un de bien. Et si liaison, relation amoureuse il y avait, c'était, d'après les ragots, avec un dénommé Marcus. ...Sauf que lorsqu'elle l'avait pris pour son amant, elle l'avait appelé Henry, premier détail problématique. Peut-être avait-il deux noms, un pseudonyme ? Mais quand Roderick s'était lancé à la recherche de cet homme, il avait découvert que l'on ne pouvait pas les confondre. Certes, ils étaient tous les deux caucasiens, leurs cheveux de la même teinte et avec la même capacité à avoir des mèches en bataille. Point à la ligne : Roderick avait bien dix ans de plus que lui, et leurs traits étaient très différents.

Roderick laissa Pernelle remettre ses cheveux en place, se contentant de sourire et de la regarder avec attention, comme s'il était amoureux d'elle ou qu'il essayait de lui dans ses pensées – ce qui était le cas. « C’est à croire qu’elles ne tiendront jamais en place… » Que dire ? Elle ne lui avait pas laissé le temps de parler l'autre fois, et depuis il ne l'avait pas recroisée – la paquebot était immense, donc pourquoi pas ? - mais à présent il péchait en aveugle, si l'on peut dire. Avec un petit rire, il secoua la tête, et tant pis si cela mettait ses cheveux en bataille à nouveau. « J’avais oublié à quel point tu étais beau… » Au moins, il avait ça pour lui ! Il restait à espérer que cette beauté l'occupe assez pour qu'elle ferme les yeux sur...le reste, et qu'elle lui fasse le même effet que la beauté de cet...Henry.

« -Tant que tu ne m'as pas oublié... »

… Tant qu'elle l'avait un peu oublié, ou du moins oublié qui était Henry. Roderick suivit son regard, alors qu'elle se détournait de lui, rougissante. Il leva un sourcil; d'après ce qu'il avait compris de sa relation passée avec la jeune femme, ils étaient trop intimes pour qu'elle ait besoin de rougir. Il la saisit doucement par les épaules pour la faire le regarder :

« - Hey, après... notre nuit, tu n'as de raisons de rougir. Je ne l'ai pas oublié, même si ça remonte à avant le naufrage, et que.. tout est bizarre depuis. Je ne t'avais pas revu depuis, je pensais que tu... n'étais plus à bord. »

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MessageSujet: Re: « On croit ce que l'on veut croire. »[Pernelle&Roderick]    « On croit ce que l'on veut croire.  »[Pernelle&Roderick] EmptyLun 29 Juil - 21:38



« Tant que tu ne m'as pas oublié... » La voix d’Henry me semblait légèrement différentes que dans mes souvenirs, mais la vieille Pernelle que j’avais été avait oublié tant de choses qu’encore une fois, je ne fis pas attention aux doutes qui se prenaient de mon esprit. Bien que le visage de cet homme ne fût pas non plus exactement celui dont je croyais me souvenir, je ne l’avais jamais oublié effectivement. Comment aurais-je pu oublier cet être qui avait été le premier à faire de moi une femme et que mon cœur avait gardé jalousement jusqu’à ma mort? Bien entendu, depuis mon retour sur le Titanic, j’avais oublié Henry, mais comment ne pas en faire ainsi avec Marcus? Ce que je pense est terrible, mais je crois que ce que j’éprouvais pour ma nouvelle flemme était plus sincère que ce que j’avais cru ressentir pour Henry toute ma vie. En effet, je n’avais jamais été qu’une amourette de voyage pour Henry puisqu’il avait une femme et des enfants qu’il aimait et cette raison m’avait poussé à refuser ses avances dans un premier temps, mais devenant égoïste, je n’avais pensé qu’à mes désirs et avait succombé au charme de cet homme. Sa mort lors du naufrage du Titanic avait rendu notre histoire plus dramatique qu’elle ne l’avait été et je crois que c’est un mélange de tout cela qui m’avait fait croire à un amour digne des plus belles histoires. Néanmoins, maintenant qu’il se trouvait devant moi, je ne savais plus quoi penser. S’approchant de moi, Henry m saisi doucement par les épaules et poursuivit : « Hey, après... notre nuit, tu n'as de raisons de rougir. Je ne l'ai pas oublié, même si ça remonte à avant le naufrage, et que.. tout est bizarre depuis. Je ne t'avais pas revu depuis, je pensais que tu... n'étais plus à bord. » Levant les yeux vers ceux d’Henry, je l’avais fixé un moment, aussi silencieuse qu’une muette. J’avais rêvé de ce moment depuis toujours et maintenant qu’il était devant moi, je ne savais plus quoi penser. Les petits détails que je semblais avoir oublié sur Henry imposaient un doute dans mon esprit et bien que je tentais de les chasser, je n’arrivais pas à être tout à fait à l’aise devant mon ancien amant. De plus, je sentais une vive douleur chaque fois où je voyais les traits de Marcus se dessiner dans mon esprit et à l’expression de son visage s’il devait me découvrir en présente d’un autre homme. C’est donc avec un léger pincement au cœur que je m’étais éloignée de l’emprise d’Henry.

« En ta présence, j’ai toujours rougi et je crois que justement, parce qu’il y a eu cette nuit, je me dois de rougir encore plus! Je n’avais pas le droit de faire cela…Tu as…enfin…je croyais qu’au moment de ma mort, j’irais tout droit en enfer pour avoir partagé la couche d’un homme marié…Oh Henry, ne va pas croire que je regrette ce qui s’est passé! Je t’ai aimé, mais, je n’étais effectivement plus à bord. J’ai survécu au naufrage et j’ai vécu une longue vie avant de mourir et revenir ici. Je ne suis plus tout à fait la Pernelle que tu as connue à l’époque… »

Je parlais, mais j’avais l’impression que mes mots étaient vides de sens. Si ces retrouvailles avaient eu lieu avant que je retrouve Marcus, peut-être que tout aurait été différent, mais c’est ce dernier que j’avais revu et c’est de lui que j’étais maintenant amoureuse. Étais-je amoureuse du souvenir d’Henry aussi? Probablement, mais pourquoi n’étais-je donc pas capable de me laisser aller à ces retrouvailles qui auraient tu être heureuses et passionnées? Ne l’avais-je donc pas été, pendant un instant dans cet ascenseur?
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MessageSujet: Re: « On croit ce que l'on veut croire. »[Pernelle&Roderick]    « On croit ce que l'on veut croire.  »[Pernelle&Roderick] EmptySam 7 Sep - 1:14


 « On croit ce que l'on veut croire.  »[Pernelle&Roderick] Tumblr-mo3dd6vvh51ru34cuo8-250_imagesia-com_bbmtLa jeune femme, Pernelle, restait étrangement silencieuse alors que les deux prétendument anciens amants se retrouvaient. Enfin, étrangement... Peut-être était-ce dans sa nature; mais c'était l'un des nombreux détails dont Roderick n'avait pas connaissance. C'était agaçant à la fin; il marchait sur des oeufs sans savoir ce qui étaient durs et ceux qui étaient frais, pardonnez lui la comparaison. Il était doué pour manipuler autrui, mais il n'était ni prestidigitateur, ni télépathe, voyez-vous. Il scruta les traits de la jeune femme pour tout de même essayer de lire entre les lignes à défaut de lire dans esprit, alors qu'elle s'écartait légèrement de lui, défaisant son étreinte.

« En ta présence, j’ai toujours rougi et je crois que justement, parce qu’il y a eu cette nuit, je me dois de rougir encore plus! Je n’avais pas le droit de faire cela…Tu as…enfin…je croyais qu’au moment de ma mort, j’irais tout droit en enfer pour avoir partagé la couche d’un homme marié…Oh Henry, ne va pas croire que je regrette ce qui s’est passé! Je t’ai aimé, mais, je n’étais effectivement plus à bord. J’ai survécu au naufrage et j’ai vécu une longue vie avant de mourir et revenir ici. Je ne suis plus tout à fait la Pernelle que tu as connue à l’époque… » ...Echec et mat, où comment sa phrase précédente venait tout juste de le dévoiler. Comment aurait-il pu savoir qu'elle rougissait toujours en sa présence, hein ? Une vague d'agacement emplit soudain Roderick qui ne le chassa que par curiosité perverse; car c'était bien cela qui l'animait et le pousser à une telle comédie. Ca et l'ennui profond dans lequel le plongeait cette damnation.

Le bon côté de la chose était qu'il venait d'apprendre des informations essentielles; ils avaient bien passé la nuit ensembles, et le dénommé Henry pour qui elle le prenait était à l'époque du naufrage – et sans aucun doute encore aujourd'hui, logiquement – un homme marié. Infidèle et visiblement accoutumé aux amours d'une nuit... Quelqu'un pour qui Roderick aurait pu avoir de la sympathie en somme, et connaître les mauvais penchants de cet homme le faisait se sentir plus proche de lui qu'il ne l'avait été sous l'étreinte de Pernelle. Elle avait survécu au naufrage. Le genre d'information dure à encaisser: il parlait à quelqu'un qui était … sorti du Titanic ? Pouvait-on dire cela ? Elle avait vu ce qui … ce qui était après ? Les hypothèses qui se bousculaient à l'esprit de Roderick était vertigineuse, et comme une crise de panique ne lui semblait pas opportune au moment présent, il s'efforça d'oublier ce détail pour inspirer à fond. Roderick eut une grimace, passa une main dans ses cheveux alors que son cerveau travaillait à toute allure;

«Tu vois quelqu'un. »

Pas une accusation, une constatation. Légèrement attristée, comme de circonstance.. Ce n'était pas bien difficile, tout se savait sur le paquebot à présent, et elle l'avait dit elle-même: elle n'était plus tout à fait la Pernelle de l'époque. Espérons que Roderick avait également le droit d'avoir changé, même s'il n'avait pas d'aussi bonnes raison.

« Je ne vais pas te le reprocher» Roderick eut un léger rire. « - Sans doute, que je mérite l'enfer, oui. Mais cette nuit-là, c'était... » Les mots semblèrent lui manquer, et il sourit faiblement «-...Tu semblais pourtant heureuse de me voir. Tout semble si différent. Mais tu es toujours aussi belle.»

Roderick semblait prêt à s'en aller, à faire demi-tour et se résigner avec peine, mais dans le même temps il attrapait le poignet de la jeune femme, resserrait l'étreinte de ses doigts autour de son poignet, effleurait sa peau du pouce; il n'avait pas envie de s'en aller.

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